Comédie souvent désopilante, Et plus si affinités table sur un script vaudevillesque très bien écrit et des acteurs au diapason, le tout dans les limites du théâtre filmé.
Synopsis : Usé par vingt-cinq ans de vie commune, le couple formé par Xavier et Sophie semble à bout de souffle. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’idée de Sophie d’inviter à dîner leurs voisins, Adèle et Alban, n’enchante pas Xavier. Il reproche à ce couple, visiblement très amoureux, son manque de discrétion, surtout la nuit ! Au contact de ces voisins aux mœurs débridées, Xavier et Sophie vont devoir se confronter à leur réalité, avant d’être poussés dans leur retranchement par une proposition quelque peu… indécente.
Le remake d’un film espagnol
Critique : En 2016, le cinéaste et dramaturge espagnol Cesc Gay (Krámpack en 2000) monte la pièce de théâtre Los vecinos de arriba qui connaît un énorme succès aussi bien sur les planches à Barcelone qu’à Madrid. Cela a encouragé le réalisateur à en tourner une version pour le cinéma qui est sortie en France sous le titre Sentimental (Cesc Gay, 2020) au mois d’août 2021, en pleine vague de la Covid. Le résultat en France est une fois de plus déplorable dès qu’il s’agit d’œuvres ibériques hors Almodovar, avec seulement 21 966 tickets vendus, malgré des critiques plutôt positives.
© 2024 Soyouz Films, Wild Bunch / Photographie : Julien Panié. Tous droits réservés.
Ce sont les producteurs Romain Brémond et Daniel Preljocaj qui ont l’idée d’acheter les droits d’adaptation du film pour la France. Ils avaient déjà procédé de la même manière pour 10 jours sans maman (Ludovic Bernard, 2020), gros succès avec Franck Dubosc qui était le remake d’une comédie venue d’Argentine. N’oublions pas que cette méthode est devenue fréquente puisque des films à succès comme Le jeu (Fred Cavayé, 2018) d’après un hit italien, sont en réalité des remakes de succès européens.
Du théâtre filmé porté par un casting impeccable
Pour tourner Et plus si affinités (2024), les producteurs ont fait appel aux réalisateurs de la comédie Jumeaux mais pas trop (2022) avec Ahmed Sylla, à savoir Olivier Ducray et Wilfried Méance, par ailleurs scénaristes et producteurs. Les deux cinéastes ont l’idée astucieuse de recomposer le duo formé par Isabelle Carré et Bernard Campan pour Se souvenir des belles choses (Zabou Breitman, 2003) et La dégustation (Ivan Calbérac, 2022) en leur octroyant le rôle d’un couple usé par des années de fidélité et de routine.
Face à eux, ils engagent Julia Faure et Pablo Pauly pour jouer le jeune couple invité à déjeuner afin de crever l’abcès d’un voisinage marqué par des bruits nocturnes gênants. Dès le départ, le spectateur comprend que le long métrage est issu d’une pièce de théâtre puisque les réalisateurs ne tentent même pas de faire illusion en filmant l’extérieur de l’appartement. En cela, ils assument pleinement l’origine vaudevillesque du script. Cela n’est finalement pas gênant outre mesure car les dialogues sont particulièrement bien écrits et que les situations dérapent suffisamment pour déclencher régulièrement le rire du spectateur.
Du couple et du libertinage!
Ainsi, le vieux couple usé se retrouve face au propre vide de sa libido lorsque leurs voisins leur proposent un plan à quatre. Les fameux ébats bruyants dénoncés par le vieux ronchon incarné avec saveur par Bernard Campan ne sont donc pas le fait de l’unique couple, mais aussi de leurs multiples partenaires lors des parties fines organisées chez eux. Le comique naît donc de la confrontation entre ce couple ouvert au libertinage et celui plus conventionnel interprété avec beaucoup de justesse par Isabelle Carré et Bernard Campan.
Par la suite, le script ajoute quelques rebondissements qui déclenchent l’hilarité dans une mécanique qui rappelle celles du Prénom (Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte, 2012) ou encore du Jeu (Fred Cavayé, 2018), précédemment cité. Petit à petit, Et plus si affinités devient même touchant lorsqu’il aborde de manière plus dramatique l’effondrement potentiel du couple usé par tant d’années d’incompréhension et d’habitudes. Très maîtrisé dans sa mécanique comique, le film permet de retrouver Bernard Campan tel qu’on l’aime vraiment, tandis que ses partenaires lui rendent la pareille avec efficacité.
Et plus si affinités, plébiscité au Festival comique de l’Alpe d’Huez
Comédie fort agréable malgré son aspect théâtral, Et plus si affinités a connu un sacré triomphe au Festival de la comédie de l’Alpe d’Huez 2024 où le métrage a décroché quatre prix importants : le Prix du public, le Prix spécial du jury, ceux de la meilleure actrice pour Isabelle Carré et du meilleur acteur pour Bernard Campan. Cela augurait donc un joli parcours en salles.
© 2024 Soyouz Films, Wild Bunch / Photographie : Julien Panié. Tous droits réservés.
Sorti sur les écrans le mercredi 3 avril 2024 dans une large combinaison de 463 salles Et plus si affinités effectue un démarrage décevant à la quatrième place du box-office et 149 749 échangistes. Cette même semaine, la comédie doit affronter le blockbuster hollywoodien Godzilla x Kong : le nouvel empire (Adam Wingard) et surtout la comédie pour enfants Ducobu passe au vert (Elie Semoun).
Box-office français de Et plus si affinités
Bizarrement, le grand public a boudé le film puisque sa deuxième semaine est catastrophique avec une perte de 60,9 % pour 58 491 retardataires, alors même que le film est passé à 500 copies. En injectant 150 copies de plus, le distributeur Wild Bunch évite l’hémorragie en troisième semaine avec encore 44 193 amateurs de vaudeville. Mais le film vient seulement de franchir péniblement la barre des 250 000 entrées. Le métrage est retiré de l’affiche en seulement deux mois avec un total de 288 000 entrées.
On notera qu’au moment où la comédie est retirée de l’affiche, elle laisse la place à Un p’tit truc en plus (Artus), comédie que l’on estime nettement inférieure mais qui comptabilisera plus d’un million de spectateurs dès sa première semaine, soit trois fois plus que Et plus si affinités sur l’ensemble de sa carrière. Cet échec public s’est traduit par l’édition d’un unique DVD, les fans de HD devant passer obligatoirement par la case VOD.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 3 avril 2024
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© 2024 Soyouz Films, Wild Bunch / Affiche : RYSK. Photo : Jaïr Sfez. Tous droits réservés.
Biographies +
Wilfried Méance, Olivier Ducray, Bernard Campan, Isabelle Carré, Pablo Pauly, Julia Faure
Mots clés
Cinéma français, Comédie de mœurs, Remake, Adaptations de pièces de théâtre, Le couple au cinéma
