Spectacle abrutissant, Godzilla x Kong : le nouvel empire concentre le pire des blockbusters de ces dernières décennies en moins de deux heures. De la bouillie.
Synopsis : D’abord ennemis et ensuite alliés, Kong et Godzilla vont devoir à nouveau combattre côte à côte face à un nouvel ennemi qui a pris le pouvoir dans le monde des titans et qui en menace l’équilibre naturel : le Skar King.
Warner et Legendary Pictures creusent encore…
Critique : Alors que la majorité des fans de kaijū eiga déplore l’exploitation catastrophique opérée par Warner Bros et Legendary Pictures du catalogue des grands monstres du genre, les producteurs de ce MonsterVerse ne cessent de mettre en chantier de nouvelles itérations, toutes plus calamiteuses les unes que les autres. De ce corpus franchement pas fameux, on ne sauvera pas grand-chose et certainement pas le catastrophique Godzilla Vs Kong (2021) d’Adam Wingard, dont on pensait qu’il avait touché le fond de la franchise. Mais comme la Terre est creuse, les scénaristes – ou plutôt le staff de gamins de douze ans qui se revendique comme tel – continuent d’explorer les vastes étendues de la nullité cinématographique, s’asseyant au passage sur les personnages culte qu’ils sont censés valoriser.
Diffusé majoritairement par le biais de la SVOD, le précédent volet est apparemment rentré dans ses frais, malgré son absence de diffusion en salle dans certains pays comme la France où le COVID était encore d’actualité. De quoi permettre aux producteurs et au réalisateur Adam Wingard de remettre le couvert avec ce Godzilla x Kong : le nouvel empire (2024) qui s’offre cette fois-ci une belle sortie mondiale sur grand écran. Malheureusement, si la surenchère d’effets spéciaux, de combats titanesques, de bruit et de fureur est bien présente, ce cinquième volet du MonsterVerse cumule toutes les tares des blockbusters américains de ces dernières décennies. Le spectacle peut même être vu comme un concentré de tout ce que l’on déteste retrouver dans un blockbuster contemporain.
De la bouillie numérique et des personnages en carton
Cela commence par une surcharge d’effets spéciaux numériques qui débute dès les premiers plans et qui donne l’impression à plusieurs reprises de visionner un pur film d’animation. A ce petit jeu, plus rien n’est véritablement impressionnant puisque l’intégralité du film semble avoir été réalisé par ordinateur. Au bout d’une quinzaine de minutes, les enjeux narratifs ont été sommairement posés par des personnages humains omniscients qui se chargent d’expliquer au spectateur les interactions entre titans. Ces personnages n’ont d’ailleurs aucune autre utilité. De toute façon, ils sont interprétés par des acteurs-endives qui n’ont aucune personnalité – la palme revient à Dan Stevens, déplorable en sous Chris Pratt, sans une once de charisme ou encore à l’adolescente Kaylee Hottle qui n’imprime toujours pas la pellicule.
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Totalement accessoires, les êtres humains donnent lieu aux pires séquences du film, avec notamment des passages humoristiques ou censément cool. Mais comme Adam Wingard n’est pas à cours d’idée saugrenue, il nous livre également des moments embarrassants comme l’arrachage d’une dent de King Kong par notre héros dentiste (Dan Stevens, toujours lui) ou encore la découverte inopinée d’un bras bionique qui va permettre au grand Kong de compenser sa blessure. En fait, le problème principal de Godzilla x Kong : le nouvel empire vient de son abus de suspension d’incrédulité. Chaque scène vient ajouter une absurdité à tout un chapelet d’incongruités, donnant le sentiment que l’ensemble de l’équipe a abusé de puissants psychotropes.
Un opus crétin et même pas impressionnant
D’une crétinerie assez rare, le scénario aligne donc les propositions les plus absurdes avec une régularité qui frise la déraison. On se demande même s’il n’est pas possible de perdre des neurones durant la projection ce nanar ayant tout de même coûté plus de 135 millions de dollars.
Toutefois, les amateurs de combats titanesques pouvaient espérer de grands moments de pugilat. Encore une fois, le blockbuster n’est jamais réellement impressionnant. Effectivement, ce que le réalisateur Takashi Yamazaki a compris avec son excellent Godzilla Minus One (2023), Adam Wingard se plait à ne jamais l’appliquer. Afin de rendre les séquences de combat impressionnantes, le cinéaste japonais n’a eu de cesse de montrer à l’écran les rapports d’échelle entre humains et titans, jouant sur leurs interactions et le gigantisme pour effrayer le public, avec une belle réussite à la clé.
Adam Wingard, lui, filme systématiquement les hommes et les monstres à part. Situé dans sa quasi-globalité dans la Terre creuse, le récit met en scène des titans absolument gigantesques, mais qui sont noyés dans des décors eux-mêmes titanesques. Le résultat à l’écran donne le sentiment de voir des singes normaux (bien que numériques) s’affronter durant deux heures. Il faut attendre les dix dernières minutes pour que leurs combats se déroulent enfin dans notre monde (on y détruit ainsi Rome, puis les pyramides d’Egypte). On s’aperçoit alors de leur taille exceptionnelle, mais il est bien trop tard pour nous réveiller.
Godzilla Mean One
Durant ce film tonitruant, la bande originale électro de Tom Holkenborg (Junkie XL) tient lieu de bouillie sonore qui ajoute une couche supplémentaire de bruit au cœur d’un spectacle décidément abrutissant. Bien entendu, il n’est pas interdit au public le plus jeune (de préférence de moins de 12 ans) d’apprécier la projection par son absence logique de recul critique. Tous les autres fuiront ce très mauvais exemple du cinéma fast-food insipide qu’Hollywood tient à nous faire ingurgiter.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 3 avril 2024
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Biographies +
Adam Wingard, Brian Tyree Henry, Rebecca Hall, Dan Stevens, Rachel House, Fala Chen, Kaylee Hottle
Mots clés
MonsterVerse, Godzilla au cinéma, King Kong au cinéma, Kaiju Eiga