Tournée à la va-vite, Angel 2 : la vengeance est une série B très bis à l’humour camp qui amuse, malgré de grosses lacunes au niveau du script. Il faut dire que Betsy Russell n’a pas le charisme de Donna Wilkes.
Synopsis : Molly Stewart a quitté les bas-fonds de Hollywood Boulevard grâce au lieutenant Hugh Andrews. À présent, elle étudie le droit et est amoureuse d’un étudiant qui ne connait rien de son passé. Mais Andrews, son sauveur, est froidement assassiné. Pour le venger, elle redevient Angel et part à la recherche du meurtrier avec l’aide du shérif Kit…
Une suite tournée dans la précipitation
Critique : Après le succès rencontré par le premier Angel (1983), aussi bien au cinéma qu’en VHS, la firme New World Pictures ne pouvait pas passer à côté d’une inévitable suite. Engagé par contrat à livrer deux films en cas de belles rentrées d’argent, le réalisateur Robert Vincent O’Neil est contraint de rempiler, de même que son complice Joseph Michael Cala au scénario. Seul problème, les exécutifs du petit studio souhaitent profiter le plus rapidement possible de l’engouement pour ce personnage et fixent une date de sortie américaine en janvier 1985, soit tout juste un an après le premier volet.
Pressés par le temps, les duettistes doivent donc livrer en quatrième vitesse un script qui tienne la route, puis effectuer le tournage et le montage en un temps record qui laisse peu de possibilités pour le remord et la réflexion. Autre avanie, les producteurs refusent de céder à la demande de l’actrice Donna Wilkes qui souhaitait une augmentation de son cachet, bien consciente qu’elle était le point fort du film précédent. Alors que le script a été écrit pour elle, les producteurs ont donc pris la décision de la remplacer par Betsy Russell qui n’avait jusque-là qu’une expérience limitée devant les caméras, au grand désespoir du cinéaste Robert Vincent O’Neil. Par contre, il parvient à convaincre Rory Calhoun et Susan Tyrell de revenir faire un tour sur les boulevard de Los Angeles.
Humour camp à tous les étages
Cette fois-ci, point de tueur de prostituées, mais un gang de mafieux qui terrorise Hollywood Boulevard afin de racheter les immeubles en perdition. Au passage, les truands tuent le policier qui a autrefois sorti Angel du trottoir. La vengeance est donc en marche et si notre lycéenne est devenue avocate, elle retrouve pourtant le trottoir afin d’occire les coupables. Afin de l’aider dans sa vendetta, elle retrouve le cowboy d’opérette incarné avec une certaine verve par Rory Calhoun et la lesbienne jouée par l’excellente Susan Tyrell, en mode cabotinage.
Si le ton est à nouveau proche de celui du premier volet, avec une certaine tendresse pour les cabossés de la vie, ainsi qu’un humour très camp (qui désigne un regard propre à la culture gay). Outre l’emploi ad nauseam de la chanson Why ? de Bronski Beat qui faisait rage dans les clubs de l’époque, on retrouve également une scène très drôle où des transsexuels empoignent des truands pour les empêcher de nuire. Pour autant, le réalisateur ne se moque jamais de ses personnages et son regard est toujours en empathie avec les marginaux qu’il décrit.
Une réalisation peu inspirée, notamment lors des scènes d’action
Malheureusement, si les intentions sont plutôt bonnes, on ne peut qu’être déçu devant cette intrigue qui reprend consciencieusement les règles définies dans le premier, mais sans en renouveler l’inspiration. Angel 2 : la vengeance manque sans aucun doute d’un antagoniste aussi fort que celui du tueur fou du premier film. Ici, il s’agit juste de mafieux qui n’ont guère de charisme. C’est d’autant plus vrai que les séquences d’action sont assez mollement menées par un cinéaste que l’on ne sent pas motivé. Les moyens et le temps ont dû sérieusement manquer pour soigner ces séquences pourtant importantes dans un vigilante movie qui s’apparente finalement davantage à une comédie.
On notera également un assagissement au niveau des dialogues, nettement moins orduriers et donc moins percutants, tandis que le sexe reste toujours le grand absent d’une œuvre qui évoque pourtant la prostitution. Le réalisateur préfère donc insister sur les relations d’amitié entre les personnages, ce qui ne fonctionne qu’à moitié car Betsy Russell ne paraît pas très à l’aise devant une caméra malgré un physique chatoyant.
Une série B sympathique, mais très bis
Le résultat à l’écran est donc très bis, parfois franchement drôle, occasionnellement raté, mais toujours sympathique pour peu que l’on aime revisiter le cinéma d’exploitation des années 80. D’un point de vue sociologique, on remarquera aussi la prescience de la fin d’un monde puisque les protagonistes insistent sur la normalisation à l’œuvre dans les grandes métropoles américaines pour se débarrasser des marginaux. Opération qui sera effectivement menée dès la fin des années 80, à New York, puis dans la plupart des villes américaines.
Sorti aux États-Unis en janvier 1985, Angel 2 : la vengeance a déçu les attentes des producteurs en cumulant 5,6 M$ (14,6 M$ au cours ajusté en 2022), soit trois fois moins que le précédent volet. Le long-métrage a également été distribué discrètement en France à partir du 29 octobre 1986, mais l’essentiel de sa carrière a été effectué en VHS. Désormais, le film est disponible dans une édition correcte chez Carlotta qui l’a inclus dans sa Midnight Collection. Le film est également présent dans le coffret regroupant les trois premiers films de la saga.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 29 octobre 1986
© New World Pictures, Avenging Venture, Republic Entertainment International
Box-office :
Une exclusivité VHS, avant le cinéma
Film à l’exploitation chaotique en France, Angel II la vengeance a très vite connu une exploitation en VHS chez Les Films du Diamant avant même sa diffusion en salle qui s’est faite via le distributeur CDO pendant les vacances de la Toussaint, en 1986. Un fait rare qui mérite d’être souligné.
Angel 2 contre Madonna et Meryl Streep
Alors que Stallone entamait sa seconde semaine en tête du box-office avec Cobra, suivi par Twist Again à Moscou, débarquaient sur les écrans ce 29 octobre AIDS trop jeune pour mourir, drame d’exploitation sur le sida, le film indépendant Parting Glances (alias Clin d’oeil pour un adieu), et les deux grosses sorties de la semaine, La Brûlure, avec le duo Meryl Streep Jack Nicholson et Shanghai Surprise avec un autre tandem, Sean Penn et Madonna. Alors que ces deux derniers films finiront leur carrière dans les mêmes eaux, autour des 460 000 pour le drame conjugal, et des 480 000 entrées pour le film d’aventure oriental, Angel 2 sort en catimini dans les salles parisiennes. Le premier jour est convenable, avec 1 013 entrées sur 9 écrans contre 13 797 dans 37 salles pour le blockbuster avec la madone.
L’asphalte de banlieue en première semaine
En première semaine, Angel II la vengeance est surtout exposé en banlieue. En intra-muros, le polar ne dispose que de 4 écrans, les UGC Montparnasse et Ermitage, le Rex et les Images. Il doit composer avec 5 salles de périphérie, dont le Méliès à Montreuil.
Avec 8 771 entrées sur PP (dont 2 688 entrées au Rex) pour son démarrage hebdomadaire, cette suite peut aussi compter sur la province où elle trouve l’appui de 7 364 entrées pour une 29e place nationale. Peu de grandes villes l’ont programmé pour sa première semaine, le film fait le trottoir à Strasbourg, aguiche des clients à Lyon, et traîne sa péloche à Marseille.
En seconde semaine, Angel 2 voit ses entrées dégringoler, puisque les salles se débarrassent de cette série B de zone bis, avec un distributeur sans grand pouvoir pour faire un bras de fer. Seuls le Rex et l’UGC Montparnasse le conservent sur Paris Périphérie pour 2 876 entrées de plus. Sur la province, le film trouve encore refuge à Marseille et déambule à Grenoble, soit 1 377 spectateurs pour ces deux villes réunies.
Production à gambettes destinée aux cinémas de (bas) quartier
En 3e semaine, les grandes villes de province ont décroché. Angel 2 la vengeance flingue toutefois encore 3 062 clients sur Paris à l’inénarrable Gaîté Rochechouart, au métro Barbès.
La copie se balade ensuite dans un autre cinéma de quartier, près de Strasbourg St-Denis, au Paris Ciné, pour 1 662 amateurs de séances bon marché. Le Hollywood Boulevard récupère la chose pour sa 5e et ultime semaine, avec 1 533 abonnés hebdomadaires au temple de René Chateau. Le film achève donc son exploration des bas quartiers parisiens à 17 895 spectateurs.
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© New World Pictures, Avenging Venture, Republic Entertainment International
Biographies +
Robert Vincent O’Neil, Rory Calhoun, Susan Tyrell, Betsy Russell, Ossie Davis