Zipp ! (Le surdoué de la promo) est une comédie adolescente faussement gonflée du balconnet qui triompha au box-office aux USA.
Synopsis : Un nerd, scientifique en herbe, acquiert des pouvoirs de télékinésie après un accident dans le laboratoire du lycée. Il les utilise pour se venger de ses harceleurs et faire tomber dans ses bras la fille de ses désirs.
Un Surdoué chez les Sous-doués
Critique : Des surdoués, par opposition aux Sous-doués de Claude Zidi, on en trouvait beaucoup dans la comédie d’exploitation des années 80. Les surdoués de la première compagnie de Michel Gérard (1981) et La pension des surdoués alias Les sous-doués à la retraite, de Claude Plault (donc Olivier Mathot), une production Eurociné. Mais, on n’oubliera pas de mentionner Le surdoué de la promo, une variation par le titre du fameux Zipp !, programmé en province, en juillet 1983.
Zipp !, avec une affiche de l’illustrateur Landi, était distribué par Tridis et Corodis pour le Sud de la France et Marseille. Ce fut aussi le titre d’exploitation du film en VHS, chez Embassy Home Entertainment.
Zapped ! un gros succès du cinéma potache aux Etats-Unis
L’onomatopée reprenait plus ou moins le titre original, Zapped ! de la comédie américaine d’Embassy Pictures qui avait triomphé aux USA, avec pas moins de 16 897 000$, soit 46M$ si on ajuste les chiffres au cours de l’inflation en 2023. La comédie indépendante s’était même positionnée en 46e place annuelle, grâce à son insolente régularité au box-office local, entre le 23 juillet et la fin du mois de septembre 1982. Chaque semaine, aux USA, sur 200 écrans le premier week-end, la comédie potache qui mélange science-fiction et délire de mecs burlesques et sexy empochait plus d’1 million de dollars au B.O., avec un beau pic, un mois après sa sortie, à 1 860 000$. Zipp ! ou Zapped ! est un beau petit phénomène dans la foulée du premier Porky’s qui sorît quelques mois auparavant et dont le triomphe (111M$) contraint l’équipe de Zapped ! d’insérer des scènes un peu plus sexy à la dernière minute pour ne pas être ringardisée par la comédie cul(te) de Bob Clark. C’est ainsi que Le surdoué de la promo devient à sa sortie une comédie R, c’est-à-dire interdite aux adolescents non accompagnés d’un adulte. On notera que le PG-13 n’existait pas encore et qu’il faudra attendre 1984 et la polémique autour du PG accordé à Indiana Jones et le temple maudit pour que Steven Spielberg pousse à la création de la classification intermédiaire, entre le PG et le R, afin de sortir sa production Gremlins sans entrave.
Zip ! devient Le surdoué de la promo pour une sortie franchouillarde à Paris
Les Français, peu fans des comédies estudiantines de nos voisins yankees, sont plutôt dans la franchouille et c’est toute l’ambiguïté qui se greffe à la distribution hexagonale du film qui tombe dans de mauvaises mains pour en tirer quelque chose de concluant. Elysée Films, petit distributeur spécialisé dans les films graveleux et autres pellicules d’exploitation, voit dans cette production mise à l’écart des grands distributeurs nationaux, l’occasion de se faire de l’argent facile. Ils vont donc ringardiser l’œuvre au goût de la légendaire franchouille et “zapper” le changement générationnel opéré par de nombreux jeunes qui commencent à se nourrir davantage en divertissements américains dans le ton d’Amblin qu’en spectacles loufoques dans celui de Zidi. Le nouveau titre (Le surdoué de la promo) et l’affiche de E. Faugéré évoquent clairement davantage la comédie franchouillarde de celles qu’Elysée Films a l’habitude d’envoyer en salle, qu’un film pour la jeunesse qui bouffe désormais du John Hugues ou du Spielberg en VHS.
Zapped! face à Polanski, Friedkin et Mocky
En France, Zapped! réapparaît au cinéma à l’échelle parisienne, le 6 mai 1986. Le distributeur compte sur le vide cannois (Pirates de Polanski ouvrait les festivités le lendemain, le 7 mai), pour grappiller quelques salles. Cette semaine-là voit comme nouveautés très peu de titres apparaître. Les Films Jacques Leitienne expose un Jean-Pierre Mocky (La machine à découdre) dans 15 salles à Paris Périphérie et CIC trouve 28 écrans au culte Police Fédérale Los Angeles du regretté William Friedkin.
Le surdoué de la promo compte tout de même 12 cinémas à son parc parisien, mais il démarre indéniablement très bas, avec 995 spectateurs. Sans efforts promotionnels, à l’insu de toute presse, toutes les conditions de distribution vont être rédhibitoires pour ce divertissement qui aurait dû rester la VHS qu’il était, puisqu’il n’attire que 5 940 spectateurs.
Le circuit UGC, en manque de films, ose programmer Le surdoué de la promo
Mai est un mois sinistré ; la crise du cinéma gronde. De surcroît, Disney, via sa filiale jeune et dans le vent Touchstone Pictures (Splash de Ron Howard), propose bien mieux pour le jeune spectateur : Les aventuriers de la 4e dimension (My Science Project de Jonathan R. Betuel), dans 19 salles, réalise encore 24 425 spectateurs en 2e semaine, et c’est considéré comme un échec.
Les cinémas qui ne savaient guère quoi programmer cette semaine-là avaient pour noms l’UGC Ermitage, l’UGC Boulevard, l’UGC Gare de Lyon, l’UGC Gobelins, la Maxéville et les Images. Cinq salles le diffusaient en banlieue dont le Méliès à Montreuil qui n’était pas alors l’établissement art et essai adulé par les bobos des années 2000.
Enfer et damnation en deuxième semaine. Elysée Films perd cinq écrans et se contente de deux UGC (Boulevard, Gare de Lyon) et d’un autre cinéma des Boulevard, Les Arcades, ainsi que de 4 écrans de banlieue, pour 1 339 spectateurs. Désormais, la messe est dite. La reprise de notre Zapped et première exploitation parisienne est un fiasco à 7 229 spectateurs. On adore.
Un réalisateur obscur connu pour Touche pas à mes tennis
Le film, lui, on l’adore moins. Les frasques romantico-potaches de ses protagonistes sont surtout marquées par une absence de mise en scène. Ce cachet télévisuel caractérisait une certaine industrie cinématographique américaine de l’époque jusque dans le rythme. Robert J. Rosenthal, quasi anonyme pour ce qui est de sa biographie sur internet, avait surtout réalisé Touche pas à mes tennis (Malibu Beach), vite vu, vite oublié, mais avec Jeff Apple, avec lequel il co-produira Dans la ligne de mire, de Wolfgang Petersen, avec Clint Eastwood, en 1993, il produit Zapped! via la société Apple/Rose. Point de génie à la Steve Jobs dans cette pomme un peu pourrie à croquer, Zipp!… est l’occasion d’exploiter les succès de l’époque, avec quelques nom à la mode que l’on va trouver… à la télévision. Ainsi, les deux héros têtes à claques du film sont deux jeunes vedettes, Scott Baio et Willie Aames, issues de sitcoms à succès. Le premier, a connu ses Happy Days entre 1977 et 1984 (le trognon Chachi, c’était lui) ; le second était l’une des vedettes de Huit, sans ça suffit !. Après le succès de Zapped !, des producteurs les réuniront à l’écran pendant 5 saisons dans Charles s’en charge.
Un teen-movie de science-fiction entre Jerry Lewis et Stephen King ?
Nous voilà embarqués au plus beau des âges dans une histoire qui emprunte aux thèmes à la mode, notamment celui de la Weird Science (titre original d’Une créature de Rêve, trois ans plus tard!), des expériences scientifiques de lycéens qui jouent du tube à l’essai pour sonder les mystères de la vie. Ici, un accident maladroit, à base de whisky et de weed, provoquera l’élaboration d’une potion qui permettra à Scott Baio de jouir de pouvoirs télékinétiques. On oublie Jerry Lewis et Docteur Jerry et Mister Love, cela ne sera jamais aussi loufoque. Quant à Stephen King, le film s’achève plus ou moins lors d’une séquence se tenant dans un bal de fin d’année. L’influence de Carrie au Bal du Diable de Brian de Palma est une évidence, même si les enjeux seront moins effrayants, puisque Scott Baio n’abuse guère de ses pouvoirs, si ce n’est pour arracher le corsage de la bimbo du bahut (Heather Thomas, la vedette cyclonique de Cyclone de Fred Olen Ray) ou faire voler une maquette de l’Enterprise dans sa chambre (on exagère, mais à peine).
Dans ce divertissement qui place dans les mains adolescentes le pouvoir rêvé de tout gamin qui se respecte, l’expérience interdite est évidemment une métaphore empirique, celle du rite du passage à l’âge adulte, avec tous les clichés qu’inspirent ce script sans prétention et surtout dans le talent. On n’en voudra à personne. Cela se regarde même sans déplaisir pour peu qu’on ait connu cette époque. La nostalgie ajoute certainement une plus-value à cet exemple de teen-movie comme il y en avait tant d’autres alors et dont on aura surtout aimé revenir sur la carrière méconnue, plus passionnante que le film en lui-même.
L’héritage de Zipp et de Zap(ped)… !!!
Pour le reste, Le surdoué de la promo connaîtra une suite tardive, pour le marché de la vidéo, en 1990. Robert J. Rosenthal et Jeff Apple en sont de nouveau les producteurs. Zapped Again en VO devient Zip II en VHS chez Delta Vidéo, en France. La comédie inspirera un remake indirect, Zapped : une application d’enfer !, avec Zendaya, en 2014, même si officiellement cette production Disney Channel est une adaptation du roman Boys are Dogs de Leslie Margolis.
Pour ceux qui veulent découvrir Zapped!, aucune édition DVD et blu-ray n’est disponible en France. Il faut se tourner vers des imports (allemand, américain ou espagnol). Mais là encore les sorties physiques, déjà anciennes, commencent à coûter cher. En revanche, la bande-originale est disponible sur les plateformes de streaming.