The King’s Man : Première Mission est un prequel qui tente de mêler la grande Histoire avec la mythologie de Kingsman. La greffe ne prend pas toujours au cœur d’un divertissement sympathique, mais inégal.
Synopsis : Lorsque les pires tyrans et les plus grands génies criminels de l’Histoire se réunissent pour planifier l’élimination de millions d’innocents, un homme se lance dans une course contre la montre pour contrecarrer leurs plans.
Le préquel d’une saga rafraichissante
Critique : Après les beaux succès rencontrés par les deux premiers volets de la saga Kingsman (Kingsman : Services secrets, puis Kingsman : Le cercle d’or), son créateur Matthew Vaughn a souhaité tourner un grand film d’aventures à l’ancienne, tout en approfondissant la mythologie développée dans les films précédents. Désireux de faire bifurquer la saga vers quelque chose de légèrement différent, Vaughn a donc opté pour un prequel.
Effectivement, avec The King’s Man : Première Mission, le cinéaste reprend une idée qu’il avait déjà eu pour son excellent X-Men : Le commencement (2011), à savoir plonger des personnages fictifs au cœur de la grande Histoire. Dans le long-métrage mettant en scène les mutants, il faisait de ses héros des acteurs à part entière de la crise des fusées à Cuba en 1962, lors de la guerre froide entre États-Unis et URSS. Avec The King’s Man : Première Mission, il réécrit de manière fictive l’histoire de la Première Guerre mondiale, depuis son déclenchement jusqu’aux derniers combats. Il réutilise aussi à ses propres desseins des personnages iconiques entrés dans l’imaginaire collectif. Ainsi, le spectateur croise tour à tour Raspoutine, Mata Hari, Lénine, Gavrilo Princip (l’assassin de l’archiduc François-Ferdinand) et même un certain Adolf Hitler encore jeune.
Comment réécrire l’Histoire ?
Tous ces personnages se retrouvent au cœur d’une machination diabolique ourdie par un personnage mystérieux dans une ambiance complotiste qui démontre le goût de Vaughn pour les intrigues tarabiscotées des serials, au risque de mettre en péril toute forme de crédibilité. Si l’histoire racontée ne manque pas de piquant et qu’elle se fonde sur de bonnes connaissances historiques – la reconstitution de l’assassinat de François-Ferdinand est plutôt bien fichue et correcte sur le plan historique – le long-métrage a parfois du mal à concilier la volonté de Vaughn de créer un film sérieux et en même temps de respecter la charte pétillante de la saga.
Dès lors, on a parfois l’impression d’assister à deux films en un, l’un ne voulant définitivement pas être assujetti à l’autre. Parfois très sérieux – trop diront certains – The King’s Man : Première Mission s’autorise tout de même un certain nombre de débordements bis, notamment lors des scènes de combat qui sont toujours aussi délirantes. On peut compter parmi les moments bien décalés, l’affrontement entre les héros et Raspoutine (excellent Rhys Ifans en mode cabotin), ou encore une séquence bien Z avec des bouquetins facétieux et revanchards. Dans ces moments-là, le métrage devient très drôle et fun, mais cette impression s’évapore dès que l’on revient à l’intrigue à proprement parler.
Deux parties distinctes qui ont du mal à cohabiter
Plutôt lent dans sa première partie qui prend un peu trop son temps pour nous présenter chaque protagoniste, The King’s Man : Première Mission trouve enfin son rythme de croisière dans la dernière partie plus dynamique et enthousiasmante grâce à une réalisation toujours aussi inventive. On peut également regretter l’emploi d’un casting parfois un peu timoré. Une actrice comme Gemma Arterton demeure sous-employée, de même que Matthew Goode. On peut également trouver le jeu de Harris Dickinson un peu faible et en recherche de charisme. Enfin, Ralph Fiennes, tout bon acteur qu’il est, n’a pas nécessairement les épaules pour porter à lui seul le poids d’une telle aventure. Heureusement qu’il est secondé par un imposant Djimon Hounsou, mais aussi par Rhys Ifans ou encore Daniel Brühl.
Réalisé avec beaucoup de talent, le film reste donc un divertissement très agréable à suivre et qui mérite largement sa place sur un grand écran. Toutefois, il demeure un cran au-dessous des précédents volets et peut donc être considéré comme une œuvre indépendante au cœur de la franchise.
Une sortie maintes fois repoussée
Tourné depuis 2019, The King’s Man : Première Mission a fait partie des derniers projets de la Fox avant son rachat par Disney. Du coup, après une sortie prévue fin 2019, le film a été repoussé au mois de février 2020. Entre-temps, la pandémie de la Covid-19 s’est abattue sur le monde, et le studio a décidé de repousser sa sortie d’un an au mois de février 2021. Comme la pandémie sévissait toujours, le long-métrage a encore été décalé au mois d’août 2021, et finalement il a pu enfin sortir dans le monde en décembre 2021. Son démarrage aux États-Unis n’est d’ailleurs pas grandiose, tandis qu’en France, il peine encore à atteindre le million d’entrées. Mais son exploitation est encore en cours à l’heure où nous rédigeons ces lignes.
Critique de Virgile Dumez