Oranges sanguines est un film sans limite et sans filtre qui pointe du doigt les dérives de nos sociétés pas si civilisées qu’elles ont l’air. Savoureusement provocateur !
Synopsis : Au même moment en France, un couple de retraités surendettés tente de remporter un concours de rock, un ministre est soupçonné de fraude fiscale, une jeune adolescente rencontre un détraqué sexuel. Une longue nuit va commencer. Les chiens sont lâchés.
Oranges sanguines, du trash interdit aux moins de 12 ans
Critique : Ames prudes, s’abstenir. Car du viol d’une jeune fille par un prédateur sexuel à la sodomie d’un ministre finalement écartelé sur les grilles de l’Assemblée nationale dans le plus simple appareil, en passant par le suicide d’un couple âgé, aucune situation crue ne nous est épargnée. Oranges sanguines exploite la puissance brutale du rire pour construire un film politique et militant dans le but de déranger pour mieux indigner. Saignant et jouissif !
Fondateur de la troupe théâtrale Les chiens de Navarre, Jean-Christophe Meurisse, cinq ans après Apnée, une farce burlesque dans la lignée des Valseuses, reprend du service pour tirer à boulets rouges sang sur ces systèmes démocratiques en pleine décomposition. En fin limier, avant de porter l’estocade, il prend le temps de d’esquisser le portrait de quelques personnages emblématiques qui s’animent à travers quelques saynètes sans lien apparent les unes avec les autres.
Enfin une comédie irrespectueuse !
La scène d’ouverture, ponctuée de réflexions loufoques et de propos réalistes, laisse libre cours à la fantaisie d’une bande d’acteurs rompus à l’improvisation théâtrale et donne le ton de cette comédie joyeusement irrespectueuse. Un couple de retraités (Loretta Cravotta et Olivier Saladin) compte bien remporter la première place du concours de rock auquel il s’est inscrit dans l’espoir de pouvoir éponger ses dettes. Un ministre (Christophe Paou) emberlificoté dans quelques malversations est prêt à tout pour se refaire une virginité. Afin d’optimiser sa première relation sexuelle, une jeune fille (Lilith Grasmug) cherche conseil auprès d’une gynécologue débridée à qui Blanche Gardin prête toute sa gouaille. Un avocat sans scrupules (Alexandre Steiger) renie père et mère pour booster sa carrière. Autant de personnages d’âges et de conditions sociales opposés qui ont en commun de voir leur destin malmené par des événements totalement imprévus, quand ils ne sont pas dramatiques.
Un parti pris de violence et vulgarité assumées pour mieux secouer les consciences
Le récit passe alors à la vitesse supérieure et se dote de scènes trash, pour mieux transformer ces êtres humains ordinaires en monstres, en évitant cependant toute forme de manichéisme, chacun pouvant se retrouver indifféremment dans le camp des vainqueurs, puis celui des vaincus. Un parti pris de violence et vulgarité assumées pour mieux secouer les consciences et questionner le spectateur sur son rapport aux relations humaines.
Une mise en scène ample sert d’écrin de liberté à une pléiade de comédiens venus de tous horizons, (des membres des Chiens de Navarre, des Chiche Capon, des Deschiens côtoient en parfaite harmonie quelques noms de cinéma immédiatement identifiables) dont on devine le bonheur à s’emparer de dialogues merveilleusement écrits et de situations improbables. Riche de son univers décapant et de ses personnages hors du commun, Oranges sanguines est un film singulier qui, s’il risque de choquer, a l’avantage de sortir des sentiers battus en osant prendre à rebrousse-poil cette désormais inévitable bien-pensance érigée en mode de pensée unique.