Octopussy est sans doute l’un des pires épisodes de la saga James Bond par sa propension à tout tourner en dérision et son kitsch qui frise l’indigestion. Laid et profondément stupide.
Synopsis : Chargé d’enquêter sur la mort très suspecte de l’agent 009 (pourquoi avait-il donc cet inestimable œuf Fabergé dans la main ?…), James Bond assiste à la mise aux enchères de l’œuf. Le richissime Kamal Khan en fait l’acquisition. Ce prince Indien exilé semble nourrir de secrètes accointances avec le général renégat Orlov. Mais quel lien y a-t-il entre l’œuf, les complots du tandem russo-indien et la désirable, bien que mystérieuse, Octopussy ?
Octopussy concurrencé par Jamais plus jamais
Critique : Alors qu’une question de droits permet la mise en route d’un James Bond concurrent intitulé Jamais plus jamais (Irvin Kershner, 1983) avec en plus Sean Connery de retour dans la peau de 007, Albert Broccoli ne se laisse pas impressionner et initie un treizième épisode de la série officielle. Pour mettre tous les atouts de son côté, il négocie le retour de Roger Moore dans la peau de l’espion de Sa Majesté alors que l’acteur n’est plus sous contrat.
Ce nouvel épisode est placé sous le contrôle de John Glen qui a déjà relevé le défi avec Rien que pour vos yeux, un épisode bourré d’action, mais qui pâtissait d’un scénario un peu léger. Ici, on fait appel à George MacDonald Fraser pour donner forme à une histoire originale qui s’inspire du titre d’une nouvelle signée Ian Fleming. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’équipe de ce nouveau numéro ne s’est pas posée beaucoup de questions sur la crédibilité d’une intrigue kitsch à souhait.
La parodie n’est jamais très loin
A la limite de la parodie, Octopussy est sans nul doute le pire James Bond tourné à l’époque de Roger Moore. Dès la séquence d’ouverture – qui n’entretient aucun rapport avec le reste du film – l’action est traitée de manière totalement fantaisiste au point qu’il est impossible de croire un seul instant aux péripéties filmées. On continue avec un générique décevant et une chanson médiocre pourtant signée John Barry, avant d’être propulsés durant la première heure dans une Inde de pacotille.
On n’échappe ici à aucun cliché afin de faire couleur locale, jusque dans les décors kitsch qui font pâle figure à côté des merveilleuses créations de Ken Adam sur les précédents Bond. Ici, on ne retiendra qu’un bric-à-brac d’objets hétéroclites qui n’ont d’autre but que de remplir un écran surchargé. Plombé par un humour qui pèse aussi lourd que les éléphants aperçus lors de la scène de chasse à l’homme, cet épisode permet également de se convaincre de l’âge trop avancé de Roger Moore, jamais crédible en agent secret dynamique.
Un épisode nanardesque qui a toutefois rencontré le succès
Enfin, le scénario tente de mêler avec une rare maladresse un trafic de bijoux, un attentat à la bombe dans le contexte de la guerre froide et la revanche d’une communauté d’Amazones sur leurs commanditaires véreux. Le sommet de l’indigence intervient lors de l’assaut final de la forteresse par des dames voluptueuses et habiles au lasso. La série James Bond atteint ainsi le degré zéro le plus absolu, se dotant d’une dose inattendue de nanardise.
Malgré sa médiocrité, ce treizième Bond a permis aux producteurs de tirer de substantiels bénéfices puisque le long-métrage a engrangé des recettes avoisinant 187 millions de billets verts pour un budget initial de 75,5 M$, au cours ajusté de 2021. Il a approché les 3 millions d’entrées rien qu’en France (14ème place du box-office annuel), battant un peu partout le dissident Jamais plus jamais, pourtant légèrement supérieur d’un point de vue qualitatif. La série, elle, continuera sur sa lancée avec un épisode généralement jugé catastrophique (Dangereusement vôtre), mais finalement bien plus sympathique que cette mauvaise blague d’Octopussy.
Critique de Virgile Dumez