Nostalgia (Cannes 2022) : la critique du film (2022)

Drame | 1h57min
Note de la rédaction :
8/10
8
Nostalgia de Mario Martone

  • Réalisateur : Mario Martone
  • Acteurs : Pierfrancesco Favino, Giuseppe D’Ambrosio, Tommaso Ragno, Sofia Essaïdi, Francesco Di Leva
  • Date de sortie: 04 Jan 2023
  • Année de production : 2022
  • Nationalité : Italien, Français
  • Titre original : Nostalgia
  • Acteurs : Pierfrancesco Favino, Sofia Essaidi, Tommaso Ragno
  • Scénaristes : Mario Martone, Ippolita Di Majo, d'après un roman de Ermanno Rea
  • Directeur de la photographie : Paolo Carnera
  • Compositeur : -
  • Monteur : Jacopo Quadri
  • Producteurs : Roberto Sessa
  • Sociétés de production Picomedia, Mad Entertainment, Medusa Film, Rosebud Entertainment Pictures
  • Distributeur : ARP Sélection
  • Date de sortie vidéo : 10 mai 2023
  • Editeur vidéo : ARP Sélection (DVD et blu-ray, 2023)
  • Format : 2.35 : 1 / Couleur (2.38) / Dolby Digital
  • Budget :
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 177 191 entrées / 58 222 entrées
  • Box-office nord américain / monde :
  • Classification : Tous publics
  • Festivals : Sélection officielle en compétition Cannes 2022, Arras Film Festival 2022, Motovun Film Festival 2022 (Croatie), Helsinki International Film Festival (Finlande, 2022), Zurich Film Festival (2022), Cinelibri Book&Movie Festival (Bulgarie 2022), Rio de Janeiro International Film Festival (2022), Mostra de València (Espagne 2022), Fort Lauderdale International Film Festival (USA, 2022), Palm Springs International Film Festival (USA, 2022), Stockholm International Film Festival (2022), Lisbon & Sintra Film Festival (2022)
  • Récompenses : Une nomination aux European Film Awards 2022 (Meilleur acteur) ; Meilleur(es) acteur, actrice et montage aux FICE - Federazione Italiana Cinema d'Essai 2022 ; 4 prix dont Meilleur réalisateur et acteur aux Italian National Syndicate of Film Journalists 2022
  • Illustrateur/Création graphique : © Couramiaud - Caractères. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Picomedia, Mad Entertainment, Medusa Films Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Mêlant adroitement drame intimiste et évocation de la ville de Naples, Nostalgia est une œuvre ambitieuse qui séduit par son atmosphère sombre et son ambiance tragique. A découvrir.

Synopsis : Après 40 ans d’absence, Felice retourne dans sa ville natale : Naples. Il redécouvre les lieux, les codes de la ville et un passé qui le ronge.

Naples, personnage central de Nostalgia

Critique : Réalisateur d’origine napolitaine, Mario Martone ne risque pas d’éprouver la fameuse nostalgie de son titre – qui originellement veut dire mal du pays – puisqu’il a consacré l’intégralité de sa filmographie à l’évocation de cette cité qu’il a visiblement dans la peau. Tiré du roman éponyme d’Ermanno Rea, Nostalgia offre au cinéaste l’occasion de faire le point sur l’évolution de la cité campanienne entre les années 70 et nos jours. Et le constat s’avère particulièrement accablant.

Ainsi, depuis maintenant des décennies, Naples demeure coincée entre deux pôles qui tiennent fermement la ville en main : l’Eglise d’un côté et la Camorra de l’autre. Il est assez impressionnant de constater le manque d’évolution dans ce domaine, preuve que l’Etat italien a définitivement abandonné toute ambition pour le Mezzogiorno. D’ailleurs, la situation est tout à fait identique en Sicile. En filmant au plus près cette cité napolitaine, Mario Martone en révèle à la fois les beautés, mais aussi ses quartiers entiers laissés à l’abandon et entièrement gangrenés par les gangs et la violence.

Nostalgia, une tragédie napolitaine ?

Pourtant, Nostalgia est également l’histoire d’un homme expatrié qui revient quarante ans plus tard sur les traces de son passé. Mario Martone parvient ainsi à mêler inextricablement le sort d’un personnage et celui de la ville qui sert de cadre à son histoire. Poussé à revenir dans sa ville natale par un puissant mal du pays (nostalgie, donc), Felice – dont le prénom est particulièrement ironique ici puisque cela signifie heureux – va retrouver sa vieille mère durant la première demi-heure du film. Ces scènes, pourtant très douces et tendres émeuvent au plus haut point tant on sent l’amour qui étreint les deux êtres, pourtant séparés depuis plusieurs décennies. Dès cette entame, Mario Martone marque des points car il parvient à humaniser son personnage principal, apparemment muré derrière une carapace, parfaitement interprété par Pierfrancesco Favino. Dès le départ, on sent que l’homme dissimule un terrible secret et l’atmosphère de l’œuvre est déjà pesante grâce à l’emploi de musiques additionnelles signées pour beaucoup Tangerine Dream.

Lorsque Felice décide de rester dans cette ville malgré les avertissements de ses proches, le film bascule véritablement dans une forme de tragédie antique. Effectivement, le poids du destin pèse désormais sur les épaules du protagoniste dont l’avenir ne semble plus vraiment faire de doute. Menacé dans sa vie par celui qui fut autrefois son meilleur ami – glaçant Tommaso Ragno – Felice s’entête à rester sur place au risque de déchaîner la foudre sur sa tête. Dès lors, le réalisateur arrive à créer un réel suspense lorsque Felice déambule dans les rues. Et si la Vespa qui s’avance en arrière-plan était signe de mort ? Et quid de ce passant au regard insistant ?

Labyrinthe des rues contre labyrinthe mémoriel

Dès lors, la cité de Naples apparaît comme un véritable labyrinthe mental où le personnage principal aime à se perdre au gré de ses souvenirs. Construit comme un puzzle autour de lieux et de flux mémoriels, Nostalgia est également porté par une très belle réalisation, sublimée par la superbe photographie de Paolo Carnera. A la fois drame intime et évocation d’une ville, le long-métrage s’impose comme l’un des meilleurs films italiens de ces dernières années, enterrant notamment un nombre conséquent d’œuvres stylistiquement plus proches du téléfilm que du cinéma.

Son succès en Italie rassure sur la capacité des Italiens à identifier les œuvres vraiment valeureuses, même si l’académie des David di Donatello ne l’a récompensé que pour l’interprétation de Francesco Di Leva dans le second rôle du prêtre, alors que le film était nanti de 9 nominations. A Paris, le démarrage du film à 14h fut très encourageant puisque le film a même devancé Tirailleurs avec Omar Sy qui bénéficiait de plus d’écrans et d’une publicité plus intensive. Bien entendu, le schéma est inversé sur l’ensemble du territoire français, mais Nostalgia a pu compter sur un joli démarrage avec 6 714 spectateurs lors de son premier jour (hors avant-premières). Au bout d’un mois d’exploitation, le drame italien affichait encore une belle stabilité et dépassait les 150 000 spectateurs. Il ira jusqu’à 177 191 entrées, ce qui peut être considéré comme un succès pour le cinéma italien qui n’attire plus vraiment les cinéphiles.

Critique de Virgile Dumez

Notes cannoises :

Mario Martone n’avait pas connu la compétition officielle depuis 1995 et L’amour meurtri qui n’avait été vu que par 15 000 spectateurs. En 1998 il connaissait un passage discret dans la catégorie Un Certain Regard, avec Teatro di Guerra qui ne sortira que dans 3 salles, sept mois plus tard.

Malheureusement, tous les longs du réalisateur ne connaîtront que des sorties confidentielles dans l’Hexagone. La curiosité autour de Nostalgia est donc au firmament.

Napoli, Nostalgia & Camorra

Véritable succès en Italie où le film est resté onze semaines consécutives dans le top 20 et plus de 25 semaines en salle, Nostalgia a même été choisi par les Italiens pour représenter le pays aux Oscars, en 2023.

Pour recréer un sentiment de mélancolie et de nostalgie mortifère prégnant tout au long de la projection, Mario Martone a préféré recourir à des titres instrumentaux souvent électroniques et progressifs célèbres, plutôt que d’employer un compositeur pour un score original. Les spectateurs reconnaitront notamment le travail de Tangerine Dream, avec pas moins de quatre morceaux, Peter Baumann qui faisait lui-même partie de la formation allemande entre 1971 et 1977 ou Schiller.

Après avoir fui son passé de criminel, le personnage joué par la star italienne  Pierfrancesco Favino (Suburra, Romanzo Criminale, Le traitre) retrouve Naples, ville labyrinthique de crime et de traumas, d’amour et de fraternité, qui semble figée dans le temps. La mort rode et la nostalgie est surtout l’accomplissement de son propre destin.

L’un des grands films à découvrir en ce début d’année 2023.

Notes cannoises de Frédéric Mignard

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