Mélodie en sous-sol : la critique du film (1963)

Policier, Drame | 1h58min
Note de la rédaction :
8/10
8
Mélodie en sous-sol, l'affiche

Note des spectateurs :

Par sa réalisation à l’américaine, Mélodie en sous-sol peut être considéré comme un grand classique du film de casse, sublimé par la confrontation Gabin – Delon, alors au sommet de leur talent respectif.

Synopsis : A peine sorti de prison, Charles, un truand à la retraite, refuse de s’acheter une bonne conduite. Ce dernier décide de monter un gros casse: le cambriolage du casino Palm Beach à Cannes. Pour mener à bien ce projet, Charles aura à ses côtés Francis, un jeune voyou sans scrupules et Louis, beau-frère de celui-ci. Chacun aura un rôle bien défini : Charles surveillera les salles du casino, Francis utilisera ses charmes pour visiter les coulisses du lieu et Louis sera le chauffeur des deux compères.

Un polar classique qui impose Delon face à Gabin

Critique : Après le triomphe remporté par Un singe en hiver (1962) qui opposait Jean Gabin à Jean-Paul Belmondo sous la direction experte d’Henri Verneuil, le producteur Jacques Bar pousse la fine équipe à se reconstituer, cette fois sans Bébel, mais toujours avec Gabin, devenue une star incontournable en ce début des années 60. Après l’abandon de quelques projets complexes à monter, Michel Audiard propose d’adapter avec son complice Albert Simonin une série noire américaine intitulée Mélodie en sous-sol de John Trinian.

Mélodie en sous-sol, la jaquette du digibook

© 1962 Cité Films / Conception graphique : © 2013 EuropaCorp Home Entertainment. Tous droits réservés.

La transposition de l’intrigue en France pose quelques petits soucis, mais la trame globale est tout de même respectée par Simonin qui rédige le scénario, tandis qu’Audiard se charge de pimenter quelque peu les dialogues. Dans le même temps, Alain Delon harcèle la production pour pouvoir obtenir le rôle du jeune malfrat sur lequel repose une grande part de l’intrigue. Le jeune homme aux dents longues rêve effectivement de donner la réplique à Gabin et accepte de jouer gratuitement face à lui, contre l’obtention des droits d’exploitation du film au Japon. Coup de poker risqué pour l’acteur, mais belle réussite puisque le métrage a remporté un triomphe au Japon, faisant de Delon une star incontournable dans cette contrée éloignée.

Place à la jeunesse !

Si le tournage s’est globalement bien déroulé grâce au savoir-faire impeccable d’Henri Verneuil, Jean Gabin ne fut pas toujours de bonne humeur, certain de se faire voler la vedette par un jeune premier qui se taillait la part du lion. Effectivement, à revoir rétrospectivement, Jean Gabin se borne à monter le casse, puis à donner des ordres, mais son personnage n’a pas de part vraiment active dans le récit. Celui de Delon doit par contre séduire une jeune femme, effectuer le casse avec quelques cascades complexes à la clé, tandis que l’intégralité de la dernière séquence de suspense tourne autour des décisions prises par son personnage.

Pivot de l’intrigue, son personnage est bien le plus intéressant du film, et de très loin. Il serait toutefois excessif d’affirmer qu’un réel déséquilibre existe entre les deux stars puisque ces partenaires se renvoient parfaitement la balle et l’on se souvient autant de l’un que de l’autre.

Verneuil s’impose comme un maître du cinéma commercial de qualité

Si l’intrigue est d’un classicisme absolu, la qualité essentielle du long-métrage vient de la classe de sa réalisation. Meilleur que la plupart des cinéastes commerciaux de la même époque, Henri Verneuil possède un sens inné du placement de la caméra, au point de se hisser très souvent au niveau de ses pairs américains. Féru de cinéma hollywoodien, Verneuil n’est jamais aussi bon que lorsqu’il rend hommage à ce cinéma tourné vers l’efficacité maximale.

Ainsi, le cinéaste ose tourner une séquence de casse de vingt-cinq minutes quasiment sans dialogue, ce que reprendra Jean-Pierre Melville bien plus tard dans son chef d’œuvre Le cercle rouge, de manière encore plus dépouillée. Malheureusement, les critiques oublient souvent que cette audace tant saluée chez Melville était déjà présente dix ans auparavant chez Verneuil, et donc au sein d’un cinéma plus commercial, généralement mal considéré par une certaine intelligentsia.

Une exploitation virtuose d’un décor imposant

Si l’on peut clairement souligner ici le manque d’audace d’un script très balisé, on ne peut qu’admirer le travail de mise en scène qui permet d’ailleurs de crédibiliser des pans entiers du film. Ainsi, la dernière séquence d’un quart d’heure autour de la piscine peut apparaître sur le papier hautement improbable, mais elle fonctionne merveilleusement à l’écran grâce à une réalisation virtuose entièrement organisée en fonction du placement des acteurs et du jeu de leurs regards. Le suspense est ainsi porté à son comble, alors même que cela ne tient pas vraiment debout sur le plan purement narratif.

C’est aussi cela la magie du cinéma lorsqu’il est pratiqué par des artisans talentueux et inspirés tel que Monsieur Verneuil qu’il va falloir définitivement réhabiliter en tant que réalisateur. Ici, il tire le meilleur parti de son décor, ainsi que de ses acteurs, tous impeccables. Le réalisateur profite également de la verve des dialogues de Michel Audiard qui ne sont pourtant pas aussi inspirés que d’habitude. Là encore, l’ensemble reste tenu et cohérent.

Un triomphe au box-office français et américain

L’excellence du spectacle lui a permis de connaître un foudroyant succès public, aussi bien en France qu’à l’étranger. Diffusé dans le monde entier, Mélodie en sous-sol a même connu un imposant succès aux Etats-Unis où le métrage a glané plus d’un million de dollars de recettes sous le titre Anyone Can Win. Ce beau succès a également permis à Alain Delon d’entamer une carrière anglophone (La Rolls-Royce jaune, Les tueurs de San Francisco, Les centurions, Texas nous voilà) et d’offrir à Henri Verneuil un passeport pour Hollywood (La bataille de San Sebastian en 1968). En France, le film a assis un peu plus le statut de Jean Gabin et fait de Delon une star désormais confirmée grâce à ses 3,5 millions d’entrées.

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Critique du film : Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 3 avril 1963

Mélodie en sous-sol, l'affiche

© 1962 Cité Films / Illustrateur : Roger Soubie. Tous droits réservés.

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Bande-annonce de Mélodie en sous-sol

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