Sympathique conte pour enfants, Le trésor de la montagne sacrée se regarde avec plaisir, même si les effets spéciaux ont mal vieilli et malgré le manque de charisme d’une partie du casting. Pour nostalgiques.
Synopsis : Pour accroître démesurément ses pouvoirs, le féroce magicien Alquazar, sultan tyrannique de Jadur, a l’idée de confier au jeune prince Hasan la périlleuse mission d’aller cueillir la légendaire “Rose d’El Il” une rose enchantée, qui pousse dans une île inaccessible, en échange de la main de sa belle-fille, Zuleira. Un jeune enfant, Majeed, suivi de son fidèle singe, vont suivre Hasan sur son tapis volant et affronter avec lui les pires dangers…
Un hommage direct au Voleur de Bagdad de Michael Powell
Critique : Au cours des années 70, les Britanniques ont tourné de nombreux films d’aventures fantastiques qui ont pour cadre le Moyen-Orient, à travers notamment la série des Sinbad initiée par Ray Harryhausen. Mais d’autres réalisateurs ont cherché à exploiter ce filon, comme Kevin Connor qui vient tout juste de consacrer plusieurs de ses œuvres aux explorations des mondes perdus (Le sixième continent, Centre Terre : 7e Continent, Le continent oublié et Les Sept cités d’Atlantis).
Le réalisateur s’appuie ici sur un script rédigé par Brian Hayles, avec qui il a déjà travaillé sur Les Sept cités d’Atlantis, l’année précédente. L’écrivain, mort tragiquement avant même la sortie du film à l’âge de 48 ans, a cherché à rendre hommage aux écrits des Mille et une nuits, ainsi qu’au cinéma britannique des années 30-40. Il s’est notamment beaucoup inspiré du Voleur de Bagdad (Powell, Burger, 1940), auquel on pense nécessairement durant toute la projection. Ainsi, le rôle de méchant sorcier incarné par Christopher Lee est une référence directe à celui tenu par Conrad Veidt dans le film des années 40, tandis que le jeune Puneet Sira est là pour remplacer l’iconique Sabu.
Des effets old school dépassés, mais charmants
Si la référence est prestigieuse, elle peut également s’avérer embarrassante pour Kevin Connor qui n’a clairement pas le talent visuel de Michael Powell. Malgré le passage des décennies, les effets spéciaux ne semblent pas nécessairement mieux maîtrisés en cette fin des années 70 qu’au début des années 40. Cela vient d’un cruel manque de moyens à l’heure où le cinéma britannique était sur le déclin ; toutes les grandes sociétés de production fermant les unes après les autres. De nombreux décors sont constitués de superbes matte paintings qui crient malheureusement leur caractère artificiel. On reste également légèrement dubitatif face aux incrustations nécessaires pour faire voler les tapis volants. Les effets spéciaux ne sont donc pas le point fort de cette libre adaptation des contes orientaux, même si l’aspect bricolé comporte sa part de charme.
Autre gros défaut du film, l’interprétation s’avère assez inégale. Alors que le cinéaste s’appuie sur quelques valeurs sûres comme Christopher Lee, Peter Cushing, Milo O’Shea ou encore Mickey Rooney (en mode cabotinage toutefois), il échoue à imposer des jeunes héros. Le gamin Puneet Sira ne dégage pas de réel charisme, mais écrase pourtant sans problème le très fade Oliver Tobias qui n’a pas la carrure pour interpréter le héros sans peur et sans reproches. On ne sera pas trop cruel avec Emma Samms qui fait une princesse assez transparente.
Quelques séquences réussies emportent le morceau
Film essentiellement destiné à un public jeune (la cible se situant entre huit et douze ans), Le trésor de la montagne sacrée développe des thématiques très classiques sur la dualité entre le Bien et le Mal. Pas de quoi bouleverser les adultes qui pourront toutefois y retrouver occasionnellement leur âme d’enfant, pour peu qu’ils aient vu ce long-métrage au bon âge. Toujours agréable, mais parfois un peu longuette, la projection est agrémentée par quelques séquences plus réussies que d’autres.
Les cinéphiles férus de fantastique pourront notamment apprécier toutes les séquences se déroulant dans l’antre du méchant sorcier. La grotte est ainsi éclairée avec des couleurs violentes comme autrefois un certain Mario Bava, époque Hercule contre les vampires (1961), déjà avec Christopher Lee. On apprécie également la séquence légèrement horrifique où les héros doivent franchir un pont fait de racines afin d’atteindre la rose tant convoitée. Esthétiquement superbe, la scène occasionne quelques frissons. On notera d’ailleurs que ce passage anticipe quelque peu la mode de l’heroic fantasy qui déferlera quelques années plus tard.
Le trésor de la montagne sacrée est le plus gros échec commercial de Kevin Connor
Inégal, le spectacle est donc à réserver aux nostalgiques d’une époque révolue. Déjà démodé lors de sa sortie, Le trésor de la montagne sacrée n’a guère attiré le public dans les salles françaises avec seulement 73 658 curieux sur tout le territoire national. Face à ce camouflet, Kevin Connor se tournera ensuite vers le film d’horreur avec le très sympathique Nuits de cauchemar (1980). Le Trésor, lui, n’a été édité chez nous qu’en VHS par Thorn Emi Vidéo, avant de disparaître de la circulation. Le long-métrage est à nouveau disponible sur les plates-formes de Canal+ qui en détient les droits, mais aucun DVD n’a été pressé chez nous.
Critique de Virgile Dumez