Le temps du châtiment : la critique du film (1961)

Drame, Policier | 1h43min
Note de la rédaction :
7,5/10
7,5
Le temps du châtiment avec Burt Lancaster sur CinéDweller

  • Réalisateur : John Frankenheimer
  • Acteurs : Burt Lancaster, Shelley Winters, Telly Savalas, Dina Merrill, Edward Andrews
  • Date de sortie: 23 Août 1961
  • Année de production : 1961
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : The Young Savages
  • Titres alternatifs : Die jungen Wilden (Allemagne) / Unga vildar (Suède) / Los jóvenes salvajes (Espagne) / Verdade Amarga (Portugal) / Młodzi dzicy (Pologne) / De ville unge (Norvège) / Il giardino della violenza (Italie) / A veszettek (Hongrie) / Suurkaupungin sudet (Finlande) / Juventude Selvagem (Brésil)
  • Autres acteurs : Vivian Nathan, Larry Gates, John Davis Chandler, Stanley Kristien, Luis Arroyo, Neil Burstyn
  • Scénaristes : Edward Anhalt et J. P. Miller
  • D'après : le roman A Matter of Conviction d'Evan Hunter
  • Monteur : Eda Warren
  • Directeur de la photographie : Lionel Lindon
  • Compositeur : David Amram
  • Chef Maquilleur : Robert J. Schiffer
  • Chef décorateur : James Crowe
  • Directeur artistique : William Smidt
  • Producteurs : Pat Duggan, Harold Hecht
  • Producteur exécutif : Gilbert Kurland
  • Société de production : Contemporary Productions
  • Distributeur : Les Artistes Associés
  • Distributeur reprise : -
  • Date de sortie reprise : -
  • Editeur vidéo : Rimini Editions (DVD et blu-ray, 2020)
  • Date de sortie vidéo : 18 février 2020
  • Budget : -
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 411 789 entrées / 113 814 entrées
  • Box-office nord-américain : 5 000 000 $ (soit 51 890 000 $ au cours de 2024)
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdiction aux de 18 ans (16 ans à partir de 1990)
  • Formats : 1.75 : 1 / Noir et Blanc / Son : Mono
  • Festivals : -
  • Nominations : -
  • Récompenses : -
  • Illustrateur/Création graphique : © Dreano (jaquette blu-ray). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse : -
  • Tagline : Oscar 1961
Note des spectateurs :

Drame social sur la délinquance juvénile, Le temps du châtiment marque la rencontre entre Burt Lancaster et le cinéaste John Frankenheimer pour un résultat plutôt enthousiasmant.

Synopsis : Dans un quartier populaire d’une grande ville américaine, la guerre des gangs vient de faire une nouvelle victime : un jeune aveugle portoricain a été assassiné par trois adolescents d’origine italienne. L’opinion publique exige un châtiment exemplaire. Hank Bell, adjoint du procureur, mène l’enquête.

Quand la délinquance juvénile inquiétait l’Amérique

Critique : Au milieu des années 50, le phénomène de la délinquance juvénile inquiète particulièrement les autorités américaines, avec notamment le développement des gangs dans les principales villes du pays. Prenant le pouls d’un pays qui paraît désarçonné face au problème, deux œuvres connaissent un énorme retentissement en 1955. Il s’agit tout d’abord de La fureur de vivre (Nicholas Ray, 1955) qui est porté par le formidable James Dean, mais aussi de Graine de violence (Richard Brooks, 1955) avec Glenn Ford. Ce dernier est d’ailleurs tiré d’un roman d’Evan Hunter, également connu des lecteurs sous son autre pseudonyme Ed McBain.

L’énorme succès rencontré par ces deux œuvres a poussé les studios à s’intéresser à cette problématique qui pouvait attirer le public adulte, mais séduisait également les adolescents par des séquences violentes et une bande sonore souvent marquée par l’usage du rock. Le cinéma d’exploitation s’est également engouffré dans la brèche, mêlant cette thématique avec celle des bikers. Même Broadway s’est emparé du sujet avec West Side Story, la comédie musicale qui triomphe dès 1957 et qui a donné lieu à l’adaptation cinéma triomphale de Robert Wise en 1961.

Frankenheimer impose un tournage à Harlem

C’est durant cette même année que sort sur les écrans Le temps du châtiment, une production Harold Hecht qui surfait sur la vague et adaptait le roman d’Evan Hunter A Matter of Conviction, écrit en 1959. La première version du scénario est rédigée par Edward Anhalt qui suggère le nom de John Frankenheimer pour mettre en boite ce long-métrage. Le cinéaste ne lui rendra pas la pareille, puisqu’il n’a pas aimé son adaptation et qu’il a demandé une totale réécriture du script par J. P. Miller. A cette époque, Frankenheimer n’a qu’un seul film de cinéma à son actif (Mon père, cet étranger en 1957), mais il est très apprécié pour ses dramatiques télévisées qui ont rencontré de beaux succès d’audience.

Loin de n’être qu’un simple exécutant, John Frankenheimer impose notamment un tournage en extérieur dans le quartier de Harlem où est censé se dérouler l’action. Si cela a causé de nombreux problèmes d’insécurité et de racket, cet aspect documentaire participe à la crédibilité de l’entreprise et contribue à la magnificence des premières séquences du long-métrage. En comparaison, les scènes de procès tournées en studio semblent nettement moins inspirées par leur mise en forme plus conventionnelle.

Le temps du châtiment milite contre la peine de mort

Malgré une ambiance assez médiocre durant le tournage à cause des heurts entre le cinéaste et sa star Burt Lancaster – connu pour son mauvais caractère et sa volonté de tout diriger – Le temps du châtiment est assurément le premier grand film du réalisateur. Cela apparaît dès les premiers plans qui se servent magistralement des décors naturels en jouant sur la profondeur de champ et des cadrages savants. Ainsi, le meurtre initial apparaît comme absolument glaçant, permettant au réalisateur de placer le spectateur dans l’attente d’une punition exemplaire envers les trois jeunes agresseurs.

Afin de renverser l’opinion des spectateurs, le cinéaste a opté pour un personnage principal qui est un procureur persuadé des bienfaits de la peine capitale. Pourtant, à mesure que le magistrat va mener son enquête, il va mettre au jour des secrets inavouables. Brillamment construit, le scénario de Le temps du châtiment permet ainsi au spectateur de s’interroger sur la complexité de l’être humain. Et si la victime n’était pas si innocente que cela malgré son handicap ? Et si les jeunes meurtriers n’étaient pas si responsables que cela de leurs actes ? A quoi sert de punir aveuglément au lieu d’essayer de comprendre les faits et d’en dégager la vérité ? Autant de questions posées dans cette œuvre progressiste qui milite pour une justice plus équilibrée et qui ne serait pas seulement un exutoire des pulsions animales de la foule déchaînée.

Le temps du châtiment, la jaquette vidéo

© 1961 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. / Design : Dreano. Tous droits réservés.

Un grand film social

Bien entendu, on reconnaît là la marque des productions de Hecht, associé à Burt Lancaster, tous deux étant des fers de lance d’un Hollywood démocrate et luttant pour une plus grande tolérance au sein de la société américaine. Même si le procès final n’échappe pas toujours à un certain didactisme, Le temps du châtiment s’impose avant tout comme une œuvre cinématographique enthousiasmante, portée par des jeunes acteurs formidables, mais aussi par des stars très impliquées comme Burt Lancaster et une excellente Shelley Winters. On est en revanche davantage réservé quant à la qualité de jeu de Dina Merrill qui fut d’ailleurs très critiquée à l’époque pour cette prestation ratée.

Sorti en mai 1961 aux Etats-Unis, Le temps du châtiment a connu un succès assez limité avec un résultat approchant les 5 000 000 $ (soit 51 890 000 $ au cours de 2024). Le drame social a gagné de l’argent car son budget n’était pas très élevé, mais cela restait décevant pour une œuvre menée par Burt Lancaster, alors l’une des plus grandes stars américaines.

Une lourde interdiction aux moins de 18 ans à l’époque

En France, il a fallu attendre la fin du mois d’août 1961 pour voir débarquer le drame juvénile à Paris et dans le reste de la France. Le métrage s’installe à la 27ème place du box-office national avec 20 519 entrées sur sa première semaine d’exploitation, avec 18 004 entrées à Paris où il est proposé en première exclusivité au Richelieu et à l’Ambassade. Cela lui vaut une 4e place hebdomadaire sur la capitale, derrière En pleine bagarre (39 000 entrées en première semaine), Vendredi 13 heures (26 000 entrées en première semaine), et Les Robinsons des mers du Sud (23 000 entrées en première semaine).

En réalité, le métrage commence à mieux circuler en deuxième semaine, qui est celle de la rentrée, et monte à la septième place avec 40 174 spectateurs supplémentaires, mais seulement 11 274 spectateurs parisiens, où la chute est provoquée par de nombreuses nouveautés comme le fameux Gorgo, Le monocle noir, Mourir d’amour ou L’inconnu de Las Vegas. On note que Burt Lancaster se voit propulsé cette semaine-là dans 2 cinémas à Lyon où il donne rendez-vous à 15 000 spectateurs.

En troisième semaine, la carrière parisienne du film s’achève, avec 10 958 retardataires.

Plombé par une lourde interdiction aux moins de 18 ans, Le temps du châtiment voyage de région en région et glane ainsi ses entrées au long d’une exploitation en dents de scie. En bout de course, la première collaboration entre John Frankenheimer et Burt Lancaster se solde par 411 789 tickets déchirés sur toute la France. Un score médiocre qui explique l’oubli dans lequel est tombé le drame. Burt Lancaster, qui a connu deux déceptions supplémentaires en France en 1961 (Elmer Gantry et Jugement à Nuremberg) arrive bien loin des productions millionnaires comme Tant qu’il y aura des hommes, Vera Cruz, Trapèze, La flèche et le flambeau, Le vent de la plaine, Règlements de comptes à O.K. Corral, L’Odyssée du sous-marin Nerka…

Ainsi, il a fallu attendre 2020 pour que l’éditeur Rimini lui offre une sortie en DVD et en blu-ray. Signalons enfin que malgré leur mauvaise entente sur le plateau, John Frankenheimer et Burt Lancaster se sont rapidement rendus compte que leur association fonctionnait parfaitement à l’écran. Ils se sont rapidement retrouvés et ont signé un véritable chef d’œuvre avec Le prisonnier d’Alcatraz en 1962.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 23 août 1961

Acheter le film en blu-ray

Voir le film en VOD

Biographies +

John Frankenheimer, Burt Lancaster, Shelley Winters, Telly Savalas, Dina Merrill, Edward Andrews

Mots clés

Critique sociale, Les délinquants au cinéma, New York au cinéma, Les drames de l’adolescence

x