Le fils du Mask est une suite catastrophique qui relève du calvaire cinématographique. Le film compte parmi les 30 œuvres les plus détestées des spectateurs sur l’encyclopédie en ligne IMDB.
Synopsis : Plus de malice…plus de folie… plus de magie ! Le Masque est de retour. 10 ans après avoir fait des ravages à Edge City, le légendaire Masque de Loki se retrouve entre les mains du dessinateur Tim Avery, dont le fils est né avec les pouvoirs spectaculaires de l’artefact. Mais les gros problèmes commencent quand Loki lui-même, le dieu de la malice, vient chercher son masque et il est prêt à tout pour le récupérer.
Une suite tardive sans lien artistique direct avec l’original
Critique : L’idée saugrenue de l’année 2004. Accorder un budget de plus 80 millions de dollars à la suite d’un film antédiluvien (le premier volet réalisé par Chuck Russell est sorti en 1994 !), sans aucune star bankable dans le casting !
Rien d’étonnant a priori que Le Fils du Mask ait été un bide retentissant aux USA, avec moins de 20 millions de dollars engrangés à l’issue de son exploitation au cinéma, ce qui a été douloureux pour les comptes de New Line qui a longtemps repoussé la sortie estivale à une sortie en février 2005, plus anonyme, aux USA. Le résultat est une abomination.
Une œuvre qui brisa de nombreuses carrières
Quand Chuck Russell entreprend de réaliser The Mask, adaptation d’un Comics au succès grandissant depuis le début des années 90, il aligne déjà sur son CV Freddy, les griffes du cauchemar (plus gros succès de la saga) et le remake du Blob qui a plutôt été bien perçu par la critique, malgré son insuccès américain. Il a par ailleurs produit des œuvres aussi différentes que le film d’horreur Hell Night – une nuit en enfer, slasher avec Linda Blair, en 1981, l’ambitieux projet de science-fiction onirique Dreamscape (1984) et deux comédies sur fond de fac, School Girls (1985) et A fond la fac, avec le vétéran Rodney Dangerfield (1986). Bref, l’expérience coule dans ses veines. Celle du cinéaste Lawrence Guterman est tout autre. Un film pour mômes à succès, totalement impersonnel, essentiellement basé sur les effets spéciaux, Comme chiens et chats ont conduit New Line à lui faire confiance. Auraient-ils dû ? Jamais. Clamant à juste titre avoir été dépossédé du projet par un studio qui a imposé son propre montage du film, c’est-à-dire un cut PG au lieu du film PG-13 attendu, le cinéaste canadien a bel et bien commis tout ce qui peut être vu à l’écran, à commencer par la direction d’acteur qui est loin d’égaler la synergie existante entre Jim Carrey – alors habité par le rôle du Mask -, et Cameron Diaz, star glamour immédiate.
Des acteurs en roue libre, Alan Cumming, travesti, en tête
Le casting de 2005, nullement rattaché par le script aux personnages historiques, est affligeant de médiocrité. Alan Cumming est Loki, fils d’Odin (Bob Hoskins, aux apparitions ruinées par l’accoutrement et les effets numériques) qui ne cesse de se travestir affreusement pour atteindre ses objectifs. Un personnage qui ne lui sied nullement, voire qui le ridiculise, l’acteur avec ses yeux de biche en fait des tonnes dans le rôle d’un méchant burlesque dont il n’a pas l’étoffe physique et dramatique pour l’incarner. L’objectif de son personnage transformiste ? Retrouver le masque que le chien d’un couple benêt a trouvé sur un terrain vague et qu’il va ramener à la niche de ses maîtres où la question d’avoir un nouveau-né révolutionne le foyer.
Un bébé numérique en star comique : la pire des idées de la décennie
Effectivement, la comédie est démasquée et sera familiale. Exit la truculence des dialogues risqués entre adultes consentants du premier long, ici ceux qui portent le masque sont essentiellement le bébé (affreuse créature numérique et pire idée de cinéma de la décennie 2000) et le chien cartoonesque, dont on ne nous épargne rien, à commencer par le trou de balle lors d’un plan déplacé. Il faut de tout pour faire rire les enfants qui auront également le droit à la conception du bébé via le parcours de spermatozoïde masqué lors d’un moment anthologique.
Le jeune couple, de son côté, est éclipsé par le cut imposé par New Line pour permettre un virage improbable dans la comédie pour nourrissons. Le duo, interprété par Jamie Kennedy et Traylord Howard, n’a de ce fait rien à produire pour exister. Les personnages que jouent les deux comédiens sont invariablement assommants de mièvrerie et s’effacent dans une intrigue portée sur l’hystérie d’effets spéciaux hideux.
Jamie Kennedy ne sera jamais Jim Carrey
Jamie Kennedy, premier rôle improbable du film, accède à l’opportunité de jouer dans un blockbuster après s’être notamment distingué dans la trilogie originelle Scream. L’acteur comique, alors populaire à la télévision, avait longtemps hésité avant de marcher sur les pas de son idole, Jim Carrey. Il espérait pouvoir libérer le niveau de déconne qui est le sien. Durant le tournage australien, on ne lui en laissera jamais la liberté artistique. Pis, l’acteur prometteur est éclipsé par un marmot digital. Le comique, une fois grimé en Mask, notamment lors d’une scène musicale foireuse, ou plus sobrement, sans masque, dépeint en père de famille immature qui voue une adoration pour son pote le chien, n’en est pas pour autant convenable dans son jeu. Il est irritant, et son jeu outrancier est exacerbé par des angles de caméra qui relèvent de la vidange intestinale. Après ce naveton, Hollywood l’a gentiment écarté des acteurs à suivre pour le cantonner aux produits vidéo.
Aux côtés de Jamie Kennedy, l’actrice Traylor Howard, issue du petit écran, est une nouvelle erreur de casting qui sera de la même façon fustigée par la critique et même les Razzie. Punition ultime pour la jeune dame, elle disparaîtra des écrans, y compris télévisuels. Le Fils du Mask détruit tout sur son passage, surtout les carrières.
Produit transformé aux additifs technologiques cancérigènes
Un naufrage artistique qui trouve écho dans son affiche abominable mais qui vend bien la réalité du produit. Visuellement Le Fils du Mask est laid, un véritable ectoplasme filmique aux couleurs acidulées qui essaient de retrouver l’esthétique des cartoons à la Tex Avery dans le synthétique de son époque 2000. Surjouant la carte des effets spéciaux numériques, notamment via les talents (sic) de la boîte de George Lucas, ILM, déjà à l’origine des effets révolutionnaires de The Mask avec Jim Carrey, en 1994, Le fils du Mask accumule les fautes de goût au-delà de l’imaginable, en s’accordant à réorchestrer dans le vomi d’additifs technologiques, Allo maman, ici bébé, Bébé part en vadrouille et Maman, j’ai raté l’avion.
Sur le plan du contenu, Le Fils du Mask sonde les profondeurs d’un vide intarissable niant la capacité humaine à exister au profit d’un scénario MacDo, famélique qui cherche sa raison d’être dans une déferlante d’effets spéciaux envahissants et puériles.
Une suite seulement pour les moins de 12 ans
Le large public de Qui veut la peau de Roger Rabbit ? qui mélangeait en son temps (1988) toons et êtres humains, ne pouvait pas être rassemblés à nouveau, l’ambition de la New Line se heurtant à la complexité du spectacle pour bambins incapable de séduire les plus de douze ans en raison de la systématisation de gags scatologiques qui relèvent d’une gigantesque supercherie aux yeux des fans du premier Mask, qui était déjà tout sauf subtil dans ses propres gags. En fait, au vu de l’avorton filmique qu’est Le Fils du Mask, la production originale avec Jim Carrey, succès générationnel ciblé, passerait presque pour un instant de gloire intergénérationnelle de la comédie américaine.
Box-office : un désastre généralisé
Le nanar démasqué, les Français ont refusé de se fourvoyer dans cette pathétique mésaventure pour ne pas griller leurs neurones. Ils ont eu raison. Ils ont toutefois été plus de 330 000 à faire le déplacement en mars 2005, un mois après le flop américain.
Distribué par Pathé dans 389 cinémas, le film passera de 196 000 spectateurs en première semaine à 34 000 retardataires en semaine 3, démontrant la négativité du bouche-à-oreille. Pathé qui comptait sur les vacances de Pâques pour prolonger l’amusement, a dû se contenter de 2 379 000$ de recettes, soit les 5e mondiales après les USA (17$), le Japon (12M$), le Royaume-Uni (6.1M$), et le Mexique (3.2M$). Les dates de sortie mondiales n’ont pas été ciblées autour du même mois, les distributeurs ignorant comment exploiter pareil machin explosif pour l’équilibre de leurs comptes.
Le marché physique va tenter de sauver l’avorton
Au moins, la société française a pu se rattraper partiellement via les ventes de DVD, à partir de 2005, le support étant à ce moment à son paroxysme. Un blu-ray viendra compléter l’offre au début des années 2010.
Dans les années 2020, Metropolitan FilmExport, qui travaille historiquement avec New Line depuis plusieurs décennies, a récupéré les droits français pour une nouvelle sortie en DVD, en 2021. Attention, l’éditeur se gardera bien de rééditer le nanar en blu-ray. La ressortie est à destination des enfants et non des parents plus soucieux de la qualité de l’image et du son.
Les sorties de la semaine du 23 mars 2005
Biographies +
Lawrence Guterman, Jamie Kennedy, Traylor Howard, Bob Hoskins, Alan Cumming,