Comédie anodine, La vie pour de vrai souffre de ressorts comiques usés et d’une tendance irritante à la mièvrerie. Seuls les comédiens sauvent encore les meubles.
Synopsis : Tridan Lagache a passé sa vie au Club Med, à changer d’amis tous les 8 jours. À 50 ans, il démissionne du club de vacances mexicain où il est né, bien décidé à retrouver, 42 ans plus tard, son grand amour d’enfance, Violette. Il débarque à Paris, naïf et perdu mais heureux d’être hébergé chez Louis, un demi-frère dont il ignorait l’existence. Pour se débarrasser d’un Tridan encombrant, Louis supplie une de ses conquêtes, Roxane, de se faire passer pour Violette que Tridan croit reconnaître au premier regard.
Comme un air d’Un idiot à Paris
Critique : Après un piteux 8 rue de l’humanité (2021) tourné durant le confinement et qui s’est retrouvé directement diffusé sur Netflix, Dany Boon a voulu retrouver un vrai plateau de cinéma avec une nouvelle comédie écrite par ses soins. Pour rédiger son script, il s’est inspiré de sa propre expérience lorsqu’il a passé des vacances au Club Med et qu’il y a rencontré un directeur de restaurant dont les parents travaillaient au club et qui a donc naturellement continué dans cette voie. Le comique y a vu l’opportunité de développer une comédie autour d’un personnage lunaire qui ne serait jamais vraiment sorti du Club Med depuis son enfance.
Ainsi, La vie pour de vrai s’est construit petit à petit autour de la découverte du monde réel par un grand naïf quelque peu inadapté à notre période cynique. A cela, il a agrégé une intrigue sentimentale tournant autour de la recherche de son amour d’enfance par cet être déconnecté du monde moderne. On y retrouve ainsi des éléments qui faisaient notamment le sel d’une comédie comme Un idiot à Paris (Serge Korber, 1967) où Jean Lefebvre incarnait un paysan simplet confronté au cynisme des Parisiens.
Des acteurs corrects mais dans une comédie aux ressorts usés
Conscient que ce ressort comique risquait d’être rapidement épuisé, Dany Boon a complexifié la donne en ajoutant un demi-frère méconnu, ainsi qu’une intrigue sentimentale à base de manipulation et d’usurpation d’identité. Dans le rôle de celle qui doit remplacer son amour d’enfance, Charlotte Gainsbourg retrouve un emploi assez similaire à celui de Prête-moi ta main (Éric Lartigau, 2006) où elle donnait la réplique à Alain Chabat. Autant dire que la plupart des ressorts comiques à l’œuvre ici sont plutôt communs et fortement usés depuis plusieurs décennies.

© 2023 Pathé Films, 26 DB Productions, TF1 Films Productions / Photo : Denis Tribhou. Tous droits réservés.
Cela commence d’ailleurs assez mal avec la description peu crédible du personnage principal incarné par un Dany Boon assez exaspérant de naïveté et qui force le trait dès qu’il en vient aux bons sentiments. Finalement, il faut patienter jusqu’à son arrivée à Paris pour que certains éléments comiques arrivent à nous faire sourire. Toutefois, on est bien loin des éclats de rire autrefois entendus lors des projections de son célèbre et triomphal Bienvenue chez les Ch’tis (Dany Boon, 2008). En fait, c’est surtout le couple formé par Kad Merad et Charlotte Gainsbourg qui parvient à nous intéresser. On peut aussi compter sur l’alchimie comique entre Kad Merad et Dany Boon qui se donnent toujours avantageusement la réplique. De même, Charlotte Gainsbourg fait preuve d’une réelle fraîcheur dans son jeu et relève les scènes où elle intervient.
La vie pour de vrai ramène Dany Boon à la réalité
Malheureusement, Dany Boon n’évite pas toujours le sentimentalisme et bascule un peu trop fréquemment dans la mièvrerie. Cette tendance lourde qui s’est invitée dans son cinéma depuis maintenant plusieurs années n’est guère convaincante et peut même franchement indisposer par moments. Dans La vie pour de vrai, on ne retrouve pas non plus les efforts de réalisation qui étaient parfois perceptibles dans des œuvres comme Raid dingue (2016) et l’on se pose fréquemment la question de l’utilité d’avoir dépensé une telle somme (on parle d’un budget compris entre 23 et 31 millions d’euros tout de même) pour un rendu aussi peu cinématographique.
Jamais vraiment enthousiasmante, ni catastrophique, cette comédie n’a donc pas de réel intérêt. La réaction du grand public n’est finalement pas si étonnante, avec des chiffres peu valeureux au vu de son budget astronomique. Sorti sur 702 écrans dans la France entière le 19 avril 2023, La vie pour de vrai n’a séduit que 80 254 spectateurs lors de son premier jour (mais en comptant aussi les avant-premières). Le film réunit donc 423 667 GO en une semaine. Le score démontre que l’acteur a encore un peu de ressources, mais que ses budgets ne sont plus en adéquation avec son potentiel commercial.
Preuve que le long-métrage n’a pas réellement convaincu les spectateurs, ils ne sont plus que 196 249 retardataires en seconde septaine. Pire, le film s’est rapidement effondré et n’a été exploité que durant deux petits mois, dépassant avec peine les 800 000 entrées. On rappelle que pour rembourser un tel budget, Pathé devait compter sur plus de 3,5 millions d’entrées. Le compte n’y est pas, d’autant qu’il s’agit du premier film de Boon réalisateur à ne pas parvenir au million d’entrées. Un signe des temps!
Critique de Virgile Dumez
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Affiche RYSK Photo © Marcel Hartman / © 2023 Pathé Films, 26 DB Productions, TF1 Films Productions
Biographies +
Kad Merad, Dany Boon, Carole Brana, Aurore Clément, Charlotte Gainsbourg, Tatiana Gousseff, Caroline Anglade, Wabinlé Nabié
Mots clés
Comédie romantique, Paris au cinéma, La famille au cinéma, Les films Pathé