Avec son intrigue invraisemblable, La mort caresse à minuit n’en demeure pas moins un giallo fort sympathique, grâce à quelques excès bis qui feront le bonheur des fans du genre.
Synopsis : Top model en vogue pour une agence italienne, Valentina essaie une toute nouvelle drogue proche du LSD. Au cours de sa traversée psychédélique, elle assiste à un meurtre d’une cruauté surprenante. Persuadée que cet assassinat n’est pas que le fruit de son imagination, elle se met en quête de l’assassin.
Troisième volet d’un triptyque giallesque
Critique : Producteur essentiellement spécialisé dans le cinéma populaire des années 60, Luciano Ercoli (1929-2015) a finalement décidé de sauter le pas en 1970 en devenant cinéaste. Il signe alors coup sur coup trois gialli qui resteront comme sa plus importante contribution au septième art. Cela débute en 1970 par Photo interdite d’une bourgeoise, suivi rapidement par Nuits d’amour et d’épouvante en 1971 et enfin par La mort caresse à minuit (1972) qui constitue donc le troisième volet de ce que l’on peut considérer comme un triptyque.
Si les trois films n’entretiennent aucun rapport sur le plan narratif, ils ont en commun de mettre en scène les aventures de Susan Scott (pseudo de Nieves Navarro) qui se trouve être l’épouse du producteur et réalisateur. Notons enfin que des trois longs-métrages, seul ce dernier n’a pas connu une vraie distribution en France, le site Encyclociné évoquant pour sa part une sortie uniquement régionale dans le sud du pays.
Largement inspirée par les échafaudages narratifs des premiers Argento, l’intrigue signée Sergio Corbucci (aidé comme toujours par l’inévitable Ernesto Gastaldi, déjà à l’œuvre sur les deux films précédents) s’appuie sur un procédé typique du giallo, à savoir le témoin gênant. Tout ceci se réfère bien entendu aux intrigues d’Alfred Hitchcock, maître absolu en la matière, que les Italiens ne font que reprendre en leur ajoutant une excentricité toute latine faisant le bonheur des amateurs de cinéma bis.
Un script hautement improbable, compensé par des excès bis bienvenus
Car La mort caresse à minuit ne doit surtout pas être vu par des amoureux de constructions narratives exemplaires et de farouches défenseurs de la cohérence. Au royaume du script invraisemblable, le métrage en question serait parmi les grands gagnants tant son explication finale relève de la plus pure fantaisie. Peu importe diront les fans du genre puisque le métrage bénéficie d’autres qualités qui sauront compenser ces insuffisances.
Tout d’abord, le premier meurtre est particulièrement gratiné avec ce tueur possédant un gant d’acier serti de pointes lui permettant d’arracher le visage de ses victimes. Si le gore est évité de justesse, le sang coule à flot, parfois directement sur la caméra. Point de subtilité donc, mais une efficacité qui ne se démentira guère durant l’ensemble d’une œuvre plutôt bien rythmée.
Un giallo racoleur à réserver aux amateurs du genre
Les autres meurtres sont sans doute moins enthousiasmants, mais le spectateur reste toujours en éveil face à cette histoire bien tordue. Si la réalisation ne possède pas la grâce de bon nombre de productions transalpines de l’époque, elle est compensée par une musique emballante de Gianni Ferrio et l’originalité de son cadre barcelonais. De même, les amateurs de cinéma bis seront ravis de découvrir quelques fulgurances rappelant fortement le western spaghetti comme ce duo de tueurs dont l’un est affublé d’un rire hystérique (l’inénarrable Luciano Rossi, à fond dans l’excès). Ici, les baffes sont distribuées à intervalles réguliers et l’actrice principale surjoue l’hystérie avec un bonheur communicatif.
Œuvre excessive, souvent de mauvais goût, mais finalement fort sympathique à suivre, La mort caresse à minuit n’est certainement pas un très bon thriller, mais il remplit tout de même son office de spectacle populaire racoleur et finalement assez jouissif pour peu que l’on apprécie ce genre volontiers excessif.
Critique de Virgile Dumez