La dernière vague : la critique du film (1982)

Drame, Fantastique | 1h46min
Note de la rédaction :
8,5/10
8,5
La dernière vague, l'affiche

  • Réalisateur : Peter Weir
  • Acteurs : David Gulpilil, Richard Chamberlain, Frederick Parslow, Olivia Hamnett
  • Date de sortie: 16 Juin 1982
  • Nationalité : Australien
  • Titre original : The Last Wave
  • Titres alternatifs : Die letzte Flut (Allemagne) / La última ola (Espagne) / A Última Vaga (Portugal) / L'ultima onda (Italie) / Utánam a vízözön (Hongrie) / Den sidste bølge (Danemark)
  • Année de production : 1977
  • Scénariste(s) : Peter Weir, Tony Morphett, Petru Popescu
  • Directeur de la photographie : Russell Boyd
  • Compositeur : Groove Myers (sous le pseudo Charles Wain)
  • Société(s) de production : McElroy & McElroy, The South Australian Film Corporation, The Australian Film Commission
  • Distributeur (1ère sortie) : AAA
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Thorn Emi Vidéo (VHS, 1985) / G.C.T.H.V. (DVD, 2004) / Opening (DVD, 2006)
  • Date de sortie vidéo : 26 octobre 2006 (DVD)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 83 559 entrées / 35 237 entrées
  • Box-office nord-américain : 866 250 $
  • Budget : 810 000 $ australien
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : Festival international du film fantastique d'Avoriaz en 1978 : Prix spécial du jury / Australian Film Institute Awards en 1978 : Meilleure photographie et meilleur son (Don Connolly, Greg Bell et Phil Judd) / Festival international du film de Catalogne (Sitges) en 1982 : Meilleur acteur pour Richard Chamberlain
  • Illustrateur / Création graphique : Gilbert Raffin
  • Crédits : © 1977 Ayer Productions PTY, LTD
Note des spectateurs :

Grand film fantastique, La dernière vague malmène son spectateur en multipliant les niveaux de lecture, sans jamais être explicite. Peter Weir signe donc une œuvre atmosphérique, à la puissance d’évocation remarquable.

Synopsis : En quelques jours, l’Australie est frappée par plusieurs phénomènes atmosphériques étranges. Le jeune avocat David Burton doit assurer la défense de cinq aborigènes accusés du meurtre de l’un des leurs. Très vite, il acquiert la conviction qu’il s’agit non seulement d’un crime rituel, mais aussi que ce crime a un lien avec les perturbations climatiques que connaît le pays…

Peter Weir creuse la thématique d’un monde à double fond

Critique : Porté par l’excellent accueil critique réservé à son Pique-nique à Hanging Rock (1975), le réalisateur Peter Weir a convaincu une grande partie de l’équipe technique et artistique de rempiler pour un nouveau film fantastique. Puisque Peter Weir a déjà expérimenté avec succès une forme de fantastique épurée et métaphorique, il remet le couvert avec La dernière vague (1977) qui pousse la logique du précédent opus à son point ultime. Selon Peter Weir, il est inutile de mâcher le travail du spectateur et de donner donc des explications sur ce qui se déroule à l’écran. Finalement, Weir préfère suggérer que montrer.

Ainsi, dans La dernière vague, Peter Weir pose les bases d’un monde en déliquescence par le biais de séquences anodines qu’il parvient à rendre anxiogènes. Dès l’introduction, il fait tomber sur des écoliers une pluie de grêlons venue de nulle part, alors même que le ciel demeure d’un bleu immaculé. Sans chercher à donner d’explication sur cet étrange phénomène, Weir va multiplier les petits dérapages par rapport au réel, nous faisant ainsi ressentir l’existence d’un monde parallèle, d’une réalité qui serait à double fond.

La dernière vague ou le reflet rêvé d’une sombre réalité

Le réalisateur, en s’inspirant fortement de la pensée tribale des aborigènes d’Australie, reprend à son compte le mythe de la caverne de Platon et nous décrit un monde où il est parfois difficile de distinguer la réalité de son ombre (théorisée ici sous la forme du rêve prémonitoire). A l’aide de moments qui sont dédoublés, le cinéaste suggère que ce qu’il montre peut autant appartenir au réel qu’au domaine du rêve. Toutefois, Peter Weir ne cherche aucunement à hiérarchiser ces deux niveaux qu’il considère avec le même respect, à l’image des théories aborigènes.

Afin de faciliter l’entrée du spectateur dans cet univers de signes plus ou moins cryptiques, Peter Weir nous propose de suivre les pas d’un juriste blanc plutôt matérialiste incarné par Richard Chamberlain. L’acteur à l’allure sympathique parvient à générer l’empathie du spectateur, ce qui lui permet de le suivre dans la découverte de cet autre monde qui est celui des esprits et des puissances de la nature. Au fur et à mesure que le personnage principal perd ses repères, le spectateur est invité à s’affranchir de son cartésianisme pour se laisser embarquer dans une superbe histoire millénariste.

Un film poétique et atmosphérique, jamais démonstratif

Effectivement, derrière un propos parfois abscons, Peter Weir réfléchit à plusieurs problèmes fondamentaux, comme la destruction de la culture aborigène par les colons blancs, mais aussi celui de la nature sauvage domestiquée. Très préoccupé par l’écologie, le réalisateur avertit déjà la population mondiale des désordres climatiques à venir et se fait ainsi prophète d’une situation qui n’a cessé de se dégrader depuis. Il règle également ses comptes avec une certaine frange de la population australienne qui préfère oublier la destruction du peuple aborigène et se noyer dans une bien-pensance qui n’efface pourtant rien du préjudice subi.

Cette incroyable richesse thématique ne donne pourtant pas lieu à une œuvre théorique qui serait explicite, et donc barbante. Effectivement, Peter Weir préfère créer un long-métrage atmosphérique qui bénéficie d’une superbe photographie contrastée de son fidèle complice Russell Boyd, mais aussi de plages musicales synthétiques magnifiques signées Groove Myers (sous le pseudonyme de Charles Wain). La musique sonne comme du Tangerine Dream, tout en profitant de l’inquiétante présence du didjeridoo, instrument traditionnel aborigène qui résonne ici comme une sourde menace. Cela donne une puissance exceptionnelle à des images par ailleurs superbes et à des cadrages inspirés.

Un prix spécial du jury à Avoriaz qui est sorti tardivement en France

Profitant d’une aide financière de la part de la société américaine United Artists, Peter Weir a pu approcher l’acteur Richard Chamberlain qui a souhaité travailler avec le cinéaste de Pique-nique à Hanging RockLa dernière vague fut d’ailleurs son unique incursion dans le cinéma australien. Il y est pourtant parfaitement à sa place, mais le long-métrage, malgré de nombreux prix glanés dans le monde, fut un échec commercial patent. En réalité, La dernière vague a surtout été peu diffusé pendant de longues années.

En France, par exemple, il a fallu attendre 1982 pour que La dernière vague sorte en salles, alors même qu’il avait remporté le Prix spécial du Jury à Avoriaz en 1978. Le résultat a été confidentiel, mais loin d’être déshonorable, au vu du peu de copies allouées. Cette plongée dans le subconscient de l’homme blanc australien, coupable de la disparition d’une culture entière, a connu un petit bouche-à-oreille favorable. Pour un film fantastique majeur, doublé d’une réflexion à la profondeur insondable sur la responsabilité collective d’un peuple, c’était la moindre des choses. Une œuvre absolument brillante.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 16 juin 1982

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L’Ozploitation au cinéma

La dernière vague, l'affiche

© 1977 Ayer Productions PTY, LTD / Affiche : Gilbert Raffin. Tous droits réservés.

Box-office :

Sorti le 16 juin 1982, au creux de la vague pour l’exploitation, le classique de Peter Weir était estampillé cinéma d’auteur de qualité et ne bénéficiait que de 6 écrans sur Paris. Aucun site de banlieue n’en a voulu. On remercie donc l’Elysées Lincoln, le St-Germain Studio, les Parnassiens, le Forum Cinéma, le St-Lazare Pasquier et l’Olympic Entrepôt de lui avoir fait une place. Des salles mineures dans l’ensemble, mais in fine, La dernière vague a quand même submergé 9 434 spectateurs pour son lancement.

Cette semaine-là, les nouveautés étaient peu sensationnelles et aucune n’avait su se démarquer. A part la comédie adolescente On s’en fout nous on s’aime (46 080), l’essentiel des sorties résidait dans le fantastique : L’incroyable alligator (35 061), Halloween II (33 986), La galaxie de la terreur (19 670), Cannibal Ferox… Un festival de l’horreur à part entière.

Bras d’acier contre Dragon noir (7 149) était le kung-fu de la huitaine. Du côté du porno, Enfonceuses expertes (5 780) comblait (ou pas) les pornophiles. On n’oubliera pas la reprise de Trinita, en veux-tu, en voilà (5 766). Au moins pour son titre culte.

En deuxième semaine, La dernière vague de Peter Weir surfait sur un bouche-à-oreille solide et se maintenait à 9 630 entrées. Ce qui était même une légère progression par rapport à la semaine passée. La 3e semaine fait moins de remous (4 975, total de 24 139).

Pour sa 4e semaine, la production australienne trouve un écran en banlieue, à Asnières, et demeure dans 4 cinémas en intra-muros (3 488). En 5e semaine, le circuit parisien est stable et la salle de périphérie est à chercher du côté d’Argenteuil (3 020). En plein milieu de l’été, le distributeur AAA ne peut placer le film que sur 2 derniers écrans (les Parnassiens et L’Epée de bois) pour 1 129 retardataires. Le futur classique passe ensuite 8 semaines dans la salle du Marais, où il se rétractera après 14 semaines de service et 35 000 baigneurs dans ses eaux apocalyptiques.

Frédéric Mignard

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La dernière vague, l'affiche

Bande-annonce de La dernière vague (VO)

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