La bête tue de sang froid : la critique du film et le test blu-ray (1978)

Epouvante, Drame, Thriller, Rape and revenge | 1h32min (VO et VF non censurées) / 1h25min (VF censurée)
Note de la rédaction :
7/10
7
La bête tu de sang froid, affiche cinéma

  • Réalisateur : Aldo Lado
  • Acteurs : Dalila Di Lazzaro, Enrico Maria Salerno, Marina Malfatti, Macha Méril, Gianfranco De Grassi, Flavio Bucci, Franco Fabrizi
  • Date de sortie: 30 Août 1978
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : L'ultimo treno della notte
  • Titres alternatifs : Le dernier train de la nuit (VHS, Ciné Hollywood / DVD, Neo Publishing), La chienne du train de nuit (Cinéma Belgique), Le train de l'enfer (VHS, Réflex Vidéo Production), Le train de la mort (VHS, Concorde), Train de nuit pour un tueur (VHS, Videociné),
  • Année de production : 1974
  • Scénariste(s) : Renato Izzo, Aldo Lado, d'après une histoire de Roberto Infascelli et Ettore Sanzò
  • Directeur de la photographie : Gábor Pogány
  • Compositeur : Ennio Morricone
  • Société(s) de production : European Incorporation, Rewind Film
  • Distributeur (1ère sortie) : R.I.D.
  • Distributeur (reprise) :
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Concorde (VHS), CinéHollywood (VHS), Réflex Vidéo Production (VHS), Vidéociné (VHS), Neo Publishing (DVD), Le Chat qui Fume (Blu-ray)
  • Date de sortie vidéo : Août 2020 (blu-ray)
  • Box-office Paris-périphérie : 5 733 entrées
  • Box-office nord-américain -
  • Budget : -
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans (1978)
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs - Eastmancolor / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : Frédéric Domont (édition blu-ray 2020)
  • Crédits : Rewind Film, Surf Film Srl, Neo Publishing, Le Chat qui fume
Note des spectateurs :

La bête tue de sang-froid est l’un des grands choc des années 70. Son aura sulfureuse n’a depuis cessé d’émaner au-dessus d’un cinéma bis, fort d’une audacieuse métaphore politique. Un pamphlet choquant mais effroyablement efficace.

Synopsis : Lisa, jeune italienne qui étudie en Allemagne, rentre dans son pays natal pour voir sa famille pendant les vacances de Noël. Elle est accompagnée d’une de ses amies, Margaret. Pendant leur trajet en train, elles font la connaissance de deux fraudeurs un peu étranges. Après un incident technique, les jeunes filles doivent changer de train, se retrouvant seules dans un compartiment, jusqu’à ce que les deux hommes rencontrés plus tôt débarquent, accompagnés d’une mystérieuse femme. Entre torture et viol, elles vont alors subir la pire nuit de leur vie…

Critique : Généralement méprisé par la critique, en particulier italienne, le cinéaste Aldo Lado a toutefois signé quelques petites perles du cinéma bis transalpin au début des années 70, et ce, dès son premier film, Je suis vivant!, un jalon du giallo de l’étrange (1971).

La bête tue de sang froid, avec Enrico Maria Selerno

© 1976 Rewind, Marzia Cinematografica, European Incorporation

Le Dernier train de la nuit ou La bête tue de sang-froid ?

Clairement inspiré par des bobines extrêmes comme La dernière maison sur la gauche de Wes Craven, Lado se lance dans la réalisation d’un thriller jusqu’au-boutiste en 1975 avec La bête tue de sang-froid, son film le plus efficace, connu également en vidéo sous le titre de Dernier train de la nuit (1975). L’œuvre forte a été largement coupée en son temps, en raison de sa violence extrême, même si le cinéaste parvint à diffuser une version non-approuvée par la commission de censure italienne, en secret, Editée maintes fois en VHS, sous différentes appellations, la série B tordue, au caractère particulièrement osé, a toujours su nourrir une curiosité extrême. Neo Publishing, dans les années 2000, avait pu proposer une copie agrémentée de bonus qui avait fait l’effet d’une bombe auprès de bien des cinéphiles qui n’avaient pu le voir dans les années 90, époque où il fut difficile de le revoir.

Macha Méril dans son rôle le plus diabolique

La bête tue de sang-froid, avec Macha Méril

© 1976 Rewind, Marzia Cinematografica, European Incorporation

Si le cinéaste, qui depuis affirmera ne pas avoir vu La dernière maison sur la gauche, cherche un certain réalisme durant la première demi-heure, il fait basculer par la suite son métrage dans un véritable délire d’une perversité sans nom qui l’éloigne du film hippie de Wes Craven. Les principales critiques à l’égard du film généralement ont porté en leur temps sur le postulat pour le moins peu crédible – une passagère bien sous tous rapports, pousse deux petites frappes à violer et à tuer deux jeunes filles innocentes. Macha Méril jubilatoire en incarnation du Mal absolu, définitivement perverse, incarne cette bourgeoise ambiguë qui l’éloigne de ses compositions françaises, durant la Nouvelle Vague, et ce avec un plaisir non dissimulé.

Ceux qui se sont abattus sur le film en le taxant de simple provocation, à la fois voyeuriste et putassière, n’ont pas tout à fait tort, mais se sont contentés d’une lecture superficielle d’une œuvre puissamment politique, audacieuse et dérangeante. Macha Méril, qui venait de tourner pour Dario Argento, dans un contre-emploi qu’elle n’a jamais cherché à nier dans sa filmographie, incarne une haute-bourgeoisie qui tire toutes les ficelles et qui se sert de la petite racaille pour mener à bien ses plans de destruction d’une classe sociale jugée inférieure. Ce qui se joue donc dans ce train hautement symbolique est bien une forme aigüe de lutte des classes. Le prolétariat étant vu par Aldo Lado comme la nécessaire victime d’une bourgeoisie hypocrite dont les crimes restent impunis (cf. l’effroyable plan final). Le discours de Gauche est celui qu’entretenait déjà le alors socialiste Aldo Lado dans Je suis vivant!, où il se délectait d’une métaphore des nantis, dans un entre-soi orgiaque et déliquescent. Des monstres ivres de pouvoir qui se nourrissait de cette jeunesse pour conserver leur toute puissance. Méril incarne bien la descendance de ces personnages odieux qui hantent le premier long de l’auteur. Evidemment, on retrouve chez Aldo Lado cette tendance gauchiste de l’époque à taper sur le curé. Les années 70 n’étaient pas celle des cultes religieux, mais bien celle du cinéma culte où être de Gauche signifiait renverser le système, politique et religieux. La bête tue de sang-froid, plus discrète que son prédécesseur sur ce plan là, n’échappe pas à la règle.

Flavio Bucci et Gianfranco De Grassi dans La bête tue de sang-froid

© 1976 Rewind, Marzia Cinematografica, European Incorporation

Une œuvre profondément choquante

Le jeu de massacre est souvent traité sans nuance (le jeu excessif des jeunes acteurs masculins et leur péripéties grotesques avant de virer dans la violence absolue), mais cette tendance à l’exagération fait également partie du charme de ce spectacle infernal. Osant toutes les dérives (essentiellement sexuelles), le cinéaste dresse le portrait d’une société en perte de repères moraux, ce qui peut se lire comme une métaphore des années de plomb que traverse alors l’Italie.

Œuvre majeure dans le cinéma d’exploitation transalpin, La bête tue de sang-froid est surtout brillante dans sa réalisation, envoûtante dans sa photographie qui prend tout son sens sur le magnifique support haute-définition contemporain. La musique exaltante d’Ennio Morricone y est pour beaucoup, jusqu’à l’utilisation atmosphérique d’un morceau de Demis Roussos en ouverture et fermeture de ce récit poignant et révoltant.

En 2020, il est largement temps de réhabiliter à nouveau le courage cinématographique d’Aldo Lado qui, dans la transgression ultime, filmer le viol dans tout ce que la période post #MeToo vomira, a réalisé une œuvre historiquement insoutenable qui n’en finit plus d’infliger ses souffrances. Une claque que Gaspar Noé gardera en tête pour un certain Irréversible.

Critique  en binôme de Virgile Dumez et Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 30 août 1978

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Le test blu-ray

Edition blu-ray formidable en provenance du Chat qui Fume dont on reconnaît la griffe dans le packaging, cohérent avec tous les collectors sortis ces dernières années ; il forme un magnifique tout avec l’ensemble et plaira incontestablement aux collectionneurs.

Avant l’image même du film Dernier train dans la nuit, l’éditeur restaure la réputation d’Aldo Lado le méconnu avec le brio qu’on lui connaît, accompagnant même la sortie de deux titres en vidéo d’un ouvrage-entretien indépendant de l’édition vidéo, passionnant de bout en bout, avec le cinéaste rare et subversif des années 80.

Attention, désormais, les luxueux collectors du félin malin ne comportent plus de galette DVD, il faudra miser sur la HD exclusivement. En 2020, c’est une exigence que l’on partage.

Le bête tue de sang-froid, édition Le Chat qui Fume

Copyrights : Le Chat qui Fume / Design : Frédéric Domont

Suppléments : 4 / 5

L’éditeur ne reprend pas les bonus de Neo Publishing, comprenant notamment le point de vue de Macha Méril. On peut regretter l’absence de celle-ci sur cette édition tant son rôle est pivotal dans le film. En revanche, on gagne une interview concluante avec Irene Miracle qui relate son histoire italienne, son exil chez des cinéastes d’exception et une époque formidable qu’elle ne redoute pas. Elle revient, sans faire de procès à l’auteur, sur le mensonge quant à la fameuse scène de viol qui fut éprouvante à tourner. Evoquer cette jeunesse semble raviver le bonheur chez l’interprète féminine de Midnight Express, enchaînant alors les projets à la fin des années 70.

Le gros de l’édition revient à un entretien d’1h17min avec le maître Aldo Lado. Un morceau de choix pour ce complément très politique dans sa manière d’analyser le film, les coupes, la symbolique des vêtements et de la hiérarchie… Lado est passionnant et tout ce qu’il dit est à mettre en lien avec Je suis vivant !, son premier film, également disponible en blu-ray chez Le chat qui Fume. Les deux oeuvres forment une sorte de diptyque pertinent sur la société corrompue que le jeune socialiste décriait à l’époque.

Je suis vivant

Design : Frédéric Domont pour Le Chat qui fume

Image : 5 / 5

Après la catastrophe de Lisa et le diable chez ESC, on avançait un peu à reculons sur une œuvre dont on n’avait jamais perçu la beauté esthétique, ni en VHS ni en DVD sur le blu-ray de Néo.

Nos appréhensions s’évaporent vite, dès les premières images, puisque jamais le film d’Aldo Lado n’était paru aussi resplendissant. Le nouveau transfert HD de La Bête tue de sang froid relève de la perfection, avec des éclairages particulièrement travaillés, ceux élaborés avec finesse par le chef op, dont on peut vraiment profiter en 2020. L’œuvre nocturne donne des dimensions et une profondeur de décor au fameux train de la mort ; les séquences diurnes chez le docteur sont splendides de lumières et d’équilibre, notamment dans les couleurs d’un jardin qui revêt une valeur métaphorique. Une telle réussite esthétique est juste époustouflante pour une œuvre qui avait été massacrée sur bien des supports.

Son : 4 / 5

Deux pistes mono  DTS HD. La VO s’impose, car la piste française connaît quelques faiblesses. L’occasion de profiter de la magnifique partition d’Ennio Morricone qui a pris un sacré coup de jeune. Vraiment, le travail audio est impeccable.

LAa bête tue de sang-froid en blu-ray chez Le Chat qui Fume

© 1976 Rewind, Marzia Cinematografica, European Incorporation

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La bête tu de sang froid, affiche cinéma

Bande-annonce de La bête tue de sang-froid

Epouvante, Drame, Thriller, Rape and revenge

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