Entièrement portée par l’interprétation de Tomas Milian, Echec au gang est une comédie policière divertissante qui ne recule devant aucune exagération pour faire sourire. Amusant.
Synopsis : Rome, années 1970 – Tandis que Sergio Morazzi, dit Monnezza, vit de petits larcins et de boulots précaires, son frère jumeau, Vincenzo, surnommé le Bossu, est un bandit de grande envergure, revenant dans la capitale après un séjour en prison, en Corse. Vincenzo envisage de braquer un fourgon blindé, avec l’aide de complices parmi lesquels Milo Dragovic et Perrone. Mais ces derniers décident d’éliminer le Bossu une fois le braquage achevé. Les gangsters pensent avoir réussi, mais Vincenzo parvient à s’échapper par les égouts. Il n’a, dès lors, qu’une seule idée en tête : se venger !
Deux personnages culte pour le prix d’un seul
Critique : Face aux beaux succès remportés par les films policiers tournés par Umberto Lenzi avec en vedette Tomas Milian, le producteur Luciano Martino commande aux duettistes une nouvelle itération pour sa compagnie, la Dania Film. Cette fois-ci seul à la barre du scénario, Umberto Lenzi décide de confronter deux personnages devenus culte aux yeux du public italien de l’époque.
Ainsi, pour Echec au gang (1978), il propose à Tomas Milian d’incarner deux personnages censés être jumeaux, à savoir le Bossu et Poubelle. Le premier est apparu pour la première fois dans Brigade spéciale (1976), tandis que le second a déjà eu les honneurs de deux longs métrages, à savoir Le cave sort de sa planque / Le clan des pourris (1976) et L’exécuteur vous salue bien (Stelvio Massi, 1977). L’argument purement commercial était donc d’attribuer au même acteur les deux rôles majeurs qui ont fait sa popularité au cœur d’une intrigue originale.
Edition blu-ray © 2023 Le Chat Qui Fume. © 1978 Dania Film – Medusa Distribuzione. Tous droits réservés.
Tomas Milian, star incontournable du genre poliziottesco
D’ailleurs, le scénario de Lenzi est loin d’être irréprochable, puisqu’il s’appuie uniquement sur le charisme de son acteur principal. Structuré comme un simple film de vengeance, Echec au gang oublie même son fil rouge en cours de route puisque les différents membres du gang qui ont trahi le Bossu ont été éliminés au bout d’une heure de projection. Ne reste plus qu’à suivre les mésaventures du Bossu qui cherche à fuir les autorités. Etrangement, cette absence de structure ferme n’est aucunement un frein au plaisir ressenti par le spectateur durant la projection.
Effectivement, l’intégralité d’Echec au gang est porté par l’interprétation outrée, mais convaincante, d’un Tomas Milian en roue libre. Affublé de perruques impossibles, mais aussi de costumes dépareillés, le comédien s’en donne à cœur joie et parvient à faire oublier qu’il est seul à l’écran, même lorsqu’il se donne lui-même la réplique. Umberto Lenzi s’avère un technicien tout à fait professionnel lorsqu’il s’agit de mystifier le spectateur. Toutefois, il a pris soin de raconter des aventures parallèles mettant en scène chaque personnage. A ce petit jeu, on préfère d’ailleurs largement suivre la cavale du Bossu, truand handicapé qui attire la sympathie malgré son caractère psychotique.
Umberto Lenzi se découvre une âme d’anarchiste
Avec ce protagoniste, Umberto Lenzi a laissé parler sa petite fibre anarchiste (de droite) et offre donc une critique sociale tout à fait pertinente où il prend pour une fois la défense des marginaux et autres déclassés. Certes, tout ceci fleure bon le populisme, mais l’auteur davantage connu pour ses positions réactionnaires se lance ici dans une franche critique de la bourgeoisie hypocrite et des autorités incapables de faire régner l’ordre. Il réussit à faire du couple formé par le Bossu et sa petite amie prostituée (excellente Isa Danieli) des amants touchants par-delà leur aspect populaire à la lisière des Bidochons.
La séquence apparemment inutile où ils investissent une boite privée pour grands bourgeois est ainsi jubilatoire. Tout d’abord dévisagés par l’assistance, puis moqués à cause de la difformité physique du bossu, les deux amants finiront par renverser les rôles en provoquant la terreur parmi ces gens comme il faut. L’inversion de la situation ne peut que provoquer l’euphorie, tant la méchanceté des bourgeois est ici pointée du doigt. Dans Echec au gang, on trouve donc bien peu de personnages vraiment positifs.
Echec au gang met fin à la collaboration Milian – Lenzi
Pourtant, tout ceci n’a guère d’autre prétention que de divertir le spectateur. Il s’agit clairement d’une comédie policière entièrement vouée au culte de son acteur principal qui en fait des tonnes. Pour cela, il est soutenu par des acteurs plutôt doués, dont un très sérieux Pino Colizzi, mais aussi des gueules comme l’inusable Sal Borgese. Ponctué de scènes de courses poursuites en automobile tournées à même la circulation romaine, Echec au gang est donc un poliziottesco tout à fait recommandable, même s’il est indéniablement inférieur à des œuvres bien plus maîtrisées comme les excellents La rançon de la peur (1974), Brigade spéciale (1976) ou encore Opération casseurs (1976).
© 1978 Dania Film – Medusa Distribuzione. Tous droits réservés.
En fait, le long métrage souffre de la volonté de plus en plus affirmée de Tomas Milian de jouer dans des comédies entièrement fondées sur son jeu. Cela fut à l’origine de nombreux désaccords avec Umberto Lenzi, dont le caractère bien trempé ne pouvait plus s’accorder avec l’égo de sa star. Ainsi, Echec au gang fut la dernière collaboration entre les deux hommes et Tomas Milian a trouvé en Bruno Corbucci un réalisateur plus malléable et disposé à investir totalement le champ de la comédie.
Boosté par une musique funky et jazzy de Franco Micalizzi, Echec au gang est donc un divertissement recommandable pour tous les amoureux de comédie policière, et ceci malgré l’absence de scénario solide. Même si le site Encyclociné évoque une hypothétique sortie du film dans le sud de la France, on peut considérer Echec au gang comme inédit sur notre territoire. Il n’est apparu réellement qu’en cassette VHS chez Carrère Vidéo au cours des années 80, avant de disparaître totalement de la circulation. Il a donc fallu attendre 2023 pour que l’éditeur Le Chat qui Fume exhume le poliziottesco dans un blu-ray bardé de suppléments et bénéficiant d’une belle copie.
Critique de Virgile Dumez
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Umberto Lenzi, Tomás Milián, Solvi Stubing, Valentino Macchi, Sal Borgese, Rosario Borelli, Massimo Bonetti, Pino Colizzi, Isa Danieli
Mots clés
Cinéma italien, Poliziottesco, Comédie policière, Les cavales au cinéma