Deguejo : la critique du film (1966)

Western | 1h33min
Note de la rédaction :
5,5/10
5,5
Deguejo, l'affiche de Rodolfo Gasparri

Note des spectateurs :

Deguejo est un western correct qui ne se démarque toutefois pas assez de ses influences hollywoodiennes pour totalement convaincre.

Synopsis : Deux bandits assassinent un ancien soldat sudiste sous les yeux de son fils Norman. Ce dernier va tenter de comprendre la raison du meurtre en compagnie d’anciennes connaissances de son père. Leurs investigations les mènent jusqu’au village de Danger City, que terrorise Ramon, un bandit mexicain.

Critique : Deguejo, premier film de Giuseppe Vari, fait référence au toque a degüello, un air de trompette militaire signifiant que les soldats ne feront pas de prisonniers. En dépit d’un titre hispanisant évoquant une violence exacerbée, ce western de 1966 relève beaucoup plus de la sobriété de la série B américaine que des excès du western spaghetti.

Deguejo marque les débuts d’un bon artisan du genre

Le métrage pose les bases de ce qui fera le style des westerns de Vari : une réalisation sobre mais efficace, un réel talent pour tirer le maximum d’un petit budget et un goût pour les intrigues policières. Ce Deguejo est malheureusement loin d’en mettre plein la vue au niveau de la mise en scène. La caméra est très statique et la réalisation assez plate, en dépit de fulgurances très ponctuelles. Le tout reste néanmoins très lisible, notamment lors des scènes d’action.

Un scénario somme toute classique, qui n’hésite néanmoins pas à mélanger les genres

La grande force de Deguejo réside dans l’efficacité de son script, signé entre autres par le futur réalisateur de spaghettis Sergio Garrone. Il mélange en effet avec brio des situations de western classique (Rio Bravo, Les sept mercenaires) et des éléments de film noir avec un suspense maintenu jusqu’à la fin et une femme fatale. La scène d’ouverture, qui se conclut par un plan sur la tombe des assassins du père du héros flanquée de l’inscription “Two bastards” laissait présager davantage de cynisme. Certes, la violence est bien présente dans Deguejo mais elle est au service d’un ton tragique un peu trop académique, à l’image de cette scène où femmes et maris fusillés rampent pour tenter de se retrouver une dernière fois. Le traitement des personnages se veut beaucoup plus probant. Même s’il s’agit d’archétypes, ils sont suffisamment développés pour que l’on s’y attache.

Un casting de seconds couteaux pour Deguejo

Le personnage principal constitue l’élément le plus à même de fournir une transition vers une esthétique plus “spaghetti”. En dépit d’un physique impeccable, il ose une barbe de trois jours et verra ses mains mutilées comme celles de son collègue Django la même année. Malheureusement, Giacomo Rossi Stuart livre une performance convenable sans plus, à l’image de ses partenaires de jeu. En effet, le casting est principalement constitué de seconds rôles et manque d’acteurs marquants. Certes, les aficionados du genre seront ravis de retrouver des visages bien connus, à l’image de José Torres ou Daniele Vargas, ici dans un de ses rares rôles positifs. Dana Ghia joue bien les femmes vénéneuses, mais sera bien plus convaincante l’année suivante dans El Desperado. Enfin, le musculeux Dan Vadis incarne un antagoniste impressionnant de brutalité qui pourra toutefois en agacer certains, la faute à un jeu trop outré.

Une esthétique très correcte à défaut d’être flamboyante

En dépit d’un budget réduit, Deguejo demeure un film de bonne tenue. Les décors et les costumes sont tout à fait seyants, tout comme la photographie de Silvano Ippoliti, ici à l’œuvre sur son premier western, en dépit d’un recours à la nuit américaine. A noter que la ville fantôme de Danger City possède une vraie ambiance, notamment lorsqu’un vent poussiéreux la balaie, préfigurant le superbe travail d’Ippoliti sur des Corbucci de haute tenue tels que Le grand silence ou Navajo Joe. La bande-son, qui constitue l’ultime travail du compositeur Alexandre Derevitsky, très orchestrale, renforce l’aspect classique du film et n’aide pas à lui conférer une réelle personnalité. Reste un thème marquant, alliant guitare et trompette , sur lequel s’ouvre le métrage, typique quant à lui des majestueuses mélodies funèbres qui font le sel du genre.

En définitive, Deguejo est un film honnête ayant hélas assez mal vieilli, qui ne se démarque pas assez au sein du western au sens large.  Les fans de westerns américains trouveront qu’il ressasse des personnages et des situations déjà vus dans des séries B  hollywoodiennes au budget plus conséquent. Casting mis a part, il décevra les amateurs de westerns spaghetti à cause de son manque d’audace. Néanmoins, a défaut d’être marquant, Deguejo demeure un agréable divertissement , qui annonce la belle carrière dans le genre qu’accomplira Giuseppe Vari.

Critique : Kevin Martinez

Les westerns spaghettis sur CinéDweller

Deguejo, l'affiche de Rodolfo Gasparri

©1966 Gar Film. Tous Droits réservés/ Illustrateur affiche : Rodolfo Gasparri. Tous droits réservés.

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