L’association Alain Delon / Jean-Paul Belmondo fait des merveilles dans Borsalino, film de gangsters très classique, mais d’une redoutable efficacité. De quoi exploser le box-office de l’époque et affirmer le statut de star des deux complices.
Synopsis : A Marseille, dans les années 1930. Libéré pour bonne conduite après quatre mois à l’ombre, Roch Siffredi, un jeune truand, apprend que sa maîtresse Lola, une ravissante danseuse de cabaret, est passée dans les bras d’un autre voyou, François Capella. Après une première rencontre pour le moins musclée, les deux hommes se lient d’amitié et décident de s’associer. Rapidement, ils se lancent dans des opérations de petit banditisme pour le compte de petits notables crapuleux. Le duo, à l’ambition grandissante, s’attaque bientôt à un parrain de la pègre locale.
Borsalino, un rêve de producteur
Critique : Véritable rêve de producteur que ce Borsalino (1970) réunissant les deux stars françaises les plus populaires des années 70-80 dans un polar classique réalisé par un Jacques Deray en pleine ascension ! Sortant tout juste du succès de La piscine (1969), Alain Delon demande au cinéaste de l’aider à concrétiser son envie d’adapter à l’écran l’ascension de deux truands marseillais notoires nommés Paul Bonaventure Carbone et François Spirito.
Avec l’aide précieuse de Jean-Claude Carrière et Claude Sautet, les complices signent un pur hommage aux films de gangsters américains des années 30, dans la lignée du Scarface de Howard Hawks. Entièrement fondé sur l’opposition entre les deux champions du box-office, Borsalino est avant tout l’occasion de donner aux deux stars des rôles taillés sur mesure. Alain Delon, figure sévère et mutique, incarne un ange noir avec un charisme hors du commun, tandis que Jean-Paul Belmondo se complaît dans l’outrance qui lui est familière depuis le milieu des années 60. Sautillant, drôle, léger et séducteur en diable, Bébel sort le grand jeu, au risque d’en faire trop.
© Paramount Pictures
Jacques Deray rend hommage à ses maîtres américains
Les autres comédiens ont un peu de mal à exister face au duo, mais Jacques Deray parvient toutefois à maintenir un délicat équilibre entre la description du Marseille des années 30 et les passages obligés du film de genre. Ainsi, les fusillades – dont la séquence de massacre dans la boucherie – sont réalisées avec un certain talent et un immense respect envers les grands maîtres américains. Aucune fioriture ne vient nous détourner du but initial : raconter avec efficacité une histoire d’amitié entre deux gangsters.
Au passage, les auteurs dressent un intéressant portrait de cette Troisième République en fin de parcours, totalement minée par la corruption et de béantes inégalités sociales. Les deux petites frappes sont effectivement issues d’un milieu populaire et cherchent à s’élever dans la hiérarchie sociale par des moyens illégaux. Pourtant, ils sont vite confrontés à la corruption des élites, autres truands se camouflant sous un masque de respectabilité.
Un film événement au succès conséquent
Cette opposition fait aussi le sel d’une œuvre très classique, soutenue par une impeccable partition musicale de Claude Bolling. Ce métrage événementiel, toujours soucieux de satisfaire son public, a séduit plus de 4,7 millions de spectateurs français lors de sa sortie. Un tel triomphe ne pouvait rester sans suite et Alain Delon retrouva Jacques Deray quatre ans plus tard pour Borsalino & Co, bien moins convaincant sur les plans artistique et financier.
Sorties de la semaine du 20 mars 1970
© Paramount Pictures
