Agent trouble : la critique du film (1987)

Policier, Thriller | 1h30min
Note de la rédaction :
5/10
5
Agent trouble, affiche par Arsenal, gros succès en 1987

Note des spectateurs :

Polar classique, Agent trouble souffre d’un scénario un peu trop caricatural et de personnages mal définis. Sa facture technique est toutefois irréprochable et les acteurs sont correctement dirigés.

Synopsis : Un beau matin d’hiver, un autocar transportant des vacanciers tombe dans un lac des Pyrénées. Bilan : cinquante morts. Il ne s’agit pas d’un banal accident de la route, c’est une affaire commandée “d’en haut” au nom de la sécurité nationale. Victorien, témoin de l’accident, en profite pour détrousser les cadavres. Il comprend vite qu’il est tombé sur une grosse affaire et tente de trouver les instigateurs pour les faire chanter. Mal lui en prend, il est aussitôt supprimé. Sa tante, Amanda Weber, la quarantaine fringante, décide de venger son neveu…

Un polar classique au sein d’une filmographie d’ordinaire plus aventureuse

Critique : Même s’il connaît quelques échecs commerciaux au sein d’une production pléthorique, le cinéaste Jean-Pierre Mocky est à nouveau au top durant les années 80. Il peut s’enorgueillir d’avoir su déplacer les foules pour des films aux sujets difficiles comme Y a-t-il un Français dans la salle ? (1982), A mort l’arbitre (1984) et Le miraculé (1987). Il est désormais courtisé par tout le gratin du cinéma français qui veut travailler avec lui, et ceci malgré un caractère réputé difficile, voire impossible.

Au sein d’une filmographie farouchement marquée par un esprit d’indépendance, Agent trouble (1987) apparaît comme un film bien plus classique. Tout d’abord, le script est directement tiré d’un roman noir signé Malcolm Bosse intitulé L’homme qui aimait les zoos (1974). Cette base plutôt solide permet de canaliser Mocky qui avait généralement tendance à arpenter des chemins de traverse au lieu de s’en tenir à une ligne directrice. Ici, il est contraint de suivre une narration classique afin de guider le spectateur dans cette sombre histoire de complot étatique visant à étouffer une bavure.

Agent trouble Jaquette VHS

© 1987 AFC Koala Films, FR3 Dilms Production, Canal + Productions;. Tous droits réservés. Affiche Arsenal

Une dénonciation politique en toile de fond

On reconnaît là ce qui a intéressé Mocky, toujours décidé à malmener les pouvoirs en place. Son appétence pour l’anarchie se révèle au cours d’une intrigue qui met en cause les autorités, ainsi que les dérives policières des démocraties. Pourtant, cela ne va pas très loin puisqu’aucune dénonciation directe n’est effectuée, hormis une petite notation sur l’affaire du Rainbow Warrior. Pas de quoi fouetter un chat !

Si l’ensemble du long-métrage apparaît comme nettement plus soigné que d’ordinaire, jusque dans sa photographie crépusculaire et ses décors volontairement modernes, le scénario demeure quelque peu maladroit. Certes, on ne comprend que vers la fin les raisons qui poussent le gouvernement à camoufler des faits embarrassants, mais l’enquête en elle-même est assez inégale. Tout d’abord parce que les tenants et aboutissants ne sont pas exposés de manière très claire, et ensuite parce que les personnages sont avant tout des archétypes et non des êtres de chair et de sang.

Des personnages archétypaux, sans réelle profondeur

Catherine Deneuve est évidemment très juste, mais les caractéristiques de son personnage se limitent à un relooking complet, sans que la moindre psychologie vienne affleurer. Même problème avec le personnage de policier incarné avec charisme par Richard Bohringer. Ici, il représente une forme de suprématie policière, sans que l’on comprenne vraiment ses motivations personnelles. On peut d’ailleurs le dire de la plupart des autres protagonistes, souvent réduits à l’état de figures brossées à grands traits. Ce manque de profondeur dans l’écriture se ressent donc sur la tension de l’ensemble.

Pour le dire de manière claire, le spectateur finit par trouver le temps un peu long durant ce film policier qui ne cesse d’hésiter entre parodie, caricature et dénonciation sérieuse. Ce flottement dans le ton peut désarçonner. Toutefois, on n’est pas ici en présence d’un détournement volontaire de la part d’un cinéaste en mode guérilla. En réalité, Agent trouble est surtout une tentative un peu maladroite de rendre hommage à un certain cinéma américain, que le réalisateur singe au lieu d’essayer de l’égaler.

Un succès pour Mocky

Toutefois, avec son duo de stars à l’affiche et une histoire intrigante, Mocky est parvenu à attirer dans les salles 636 232 spectateurs, à une époque où le cinéma français entamait la pire crise de son histoire. Autant dire que le film peut donc être considéré comme un succès, même si la qualité artistique n’a rien d’exceptionnel. On lui préfère certaines œuvres du cinéaste plus foutraques certes, mais aussi plus personnelles.

Acheter le film en DVD

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 19 août 1987

Agent trouble, affiche par Arsenal, gros succès en 1987

© Affiche par Arsenal

x