A couteau tiré (Cop Killer) : la critique du film (1986)

Polar | 1h55min
Note de la rédaction :
6/10
6
A couteau tiré, affiche française du film avec Nicole Garcia et Harvey Keitel

  • Réalisateur : Roberto Faenza
  • Acteurs : Nicole Garcia, Harvey Keitel, Leonard Mann, Sylvia Sidney, John Lydon, Carla Romanelli
  • Date de sortie: 22 Jan 2022
  • Année de production : 1983
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : Cop Killer, Copkiller (l'assassino dei poliziotti)
  • Titres alternatifs : Copkiller (VHS, France), Cop Killer, Order of Death (US, Australie), Corrupt (Royaume-Uni), A Ordem é Matar (Brésil), Rendőrgyilkos (Hongrie), Zły policjant (Portugal)
  • Scénaristes : Ennio De Concini, Hugh Fleetwood, Roberto Faenza
  • D'après le roman de : Hugh Fleetwood, The Order of Death
  • Directeur de la photographie : Giuseppe Pinori
  • Monteur : Nino Baragli
  • Compositeur : Ennio Morricone
  • Producteurs : Elda Ferri
  • Sociétés de production : Aura Film, Cooperativa Jean Vigo, RAI Radiotelevisione Italiana
  • Distributeur : Les Films de la Rochelle (France), New Line Cinema (USA)
  • Editeur vidéo : VIP
  • Date de sortie vidéo : 1986 (VHS, sous le titre de Copkiller)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 8 183 entrées / 1 789 entrées
  • Box-office nord américain / monde :
  • Budget :
  • Rentabilité :
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans
  • Formats : 1.66 : 1 / Couleur (Eastmancolor, 35mm) / Mono
  • Festivals et récompenses : Berlin International Film Festival (1983), Festival du Film Policier de Cognac (1985)
  • Illustrateur / Création graphique : Pierry (graphiste), Jean Louis Lafon (illustrateur) © Lafon (VHS, France). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © 1983 Aura Film, Cooperativa Jean Vigo, RAI Radiotelevisione Italiana. Tous droits réservés / All rights reserved, VHS © 1985 Candice Productions
Note des spectateurs :

Véritable objet culte aux titres multiples, A couteau tiré (alias Copkiller en VHS), est une rareté du polar urbain des années 80 dans laquelle il ne fait pas bon d’être flic. Un casting grandiose, dont les premiers pas cinématographiques de l’égérie des Sex Pistols, Johnny Rotten, et Harvey Keitel. Musique signée par le maestro Ennio Morricone. Vous nous excuserez du peu. 

Synopsis : Fred O’Connor, inspecteur de la Brigade des Stupéfiants, et son collègue Bob, mènent une double vie? Bien qu’habitant un logement modeste, ils sont propriétaires d’un appartement de haut standing à Central Park. Ils y sont connus sous une fausse identité, et même Léonore, la femme de Bob ignore cette situation.

Une mystérieuse série de meurtres est commise contre des agents de la Brigade. Un après-midi, dans son appartement secret, Fred reçoit la visite d’un jeune homme, Léo, qui prétend être l’assassin.

Fred ne croit pas à sa culpabilité, mais parce que Léo connaît sa véritable identité, il décide de le garder prisonnier chez lui.

A couteau tiré (Copkiller) : dossier film

© Les Archives CinéDweller

Critique : Sélectionné au festival de Cognac (l’ancêtre de Beaune) en 1985, A couteau tiré n’est sorti en France qu’en 1986, soit plus de trois ans après le tournage et deux ans après la sortie américaine qui s’est effectuée en 1984.

Balancé dans le circuit français avec grande difficulté (voir le dossier box-office plus bas), faute d’écrans disponibles, un mois de janvier de 1986 caractérisé par la sortie écrasante de Rocky IV et d’une véritable omniprésence médiatique pour les productions d’Avoriaz, l’échec est cuisant. Les Français qui ne lisent pas les revues de cinéma, passeront même complètement à côté de sa distribution en catimini. Et pourtant on y retrouve dans un second rôle séduisant Nicole Garcia (Partenaires, Péril en la demeure, Mort un dimanche de pluie), malheureusement doublée dans la version originale, avec un timbre de voix qui trahit sa singularité vocale.

Les polars italiens de l’époque étaient, il est vrai, riches en acteurs de notre terroir, on pense la même année à Carole Bouquet dans Mystère de Carlo Vanzina qui sortira deux mois plus tard sur nos écrans, dans l’indifférence générale. Mais pas la nôtre.

Le réalisateur, Roberto Faenza, qui a souvent collaboré avec des acteurs français (voir sa bio), s’expatriait aux USA une première fois, après la réception mouvementée de ses deux plus grands films des années 60/70, le surréaliste H2S, aux allures décadentes et outrageuses d’Orange Mécanique, et le documentaire Forza Italia sur une nation qui refusera de voir son vrai visage. Les deux films coups de poing furent retirés des salles transalpines illico et valurent de grandes difficultés à son auteur, considéré comme un gauchiste radical à l’œuvre dangereuse pour le pouvoir en place.

Corrupt, aka Order of Death, Copkiller, A couteau tiré / John Lydon, VHS Thorn Emi (Royaume-Uni)

Corrupt, aka Order of Death, Copkiller, A couteau tiré / John Lydon, VHS Thorn Emi (Royaume-Uni) – Copyright : 1984 New Line. All Rights Reserved.

Avec A couteau tiré, Faenza tourne entre Rome et New York avec une figure anarchiste bien connue, John Lydon, leader des Sex Pistols et de PiL, connu surtout sous le nom de Johnny Rotten. Le punk fait ses premiers pas à l’écran. Acteur britannique d’un film, à la réputation sulfureuse, Rotten ne posera aucun problème sur le tournage et développera même de bonnes relations avec le cinéaste, le scénariste et auteur du livre original, Order of Death, à savoir Hugh Fleetwood, qui restera un proche collaborateur de Faenza tout au long de sa filmographie, mais aussi Harvey Keitel qui l’impressionne. Ce dernier, qui incarne l’esprit de l’Actors Studio, ne quitte jamais son personnage de flic véreux en dehors du tournage, de quoi fasciner la star britannique issue de la scène musicale punk.

Johnny Rotten, alors en pause entre deux projets avec sa nouvelle formation, PiL (Public Image Limited) , présente quelques difficultés avec ses dialogues, il est vrai prolixes. Et pourtant, il est bon dans la démence, la perversité et l’ambiguïté. Il incarne un jeune bourgeois dérangé qu’un policier viril (Keitel, grandiose) qui le soupçonne d’être le tueur de flics qui sévit à New-York, le séquestre dans un appartement qu’il a acheté avec un partenaire (Leonard Mann, éternel beau gosse de service), avec l’argent de la corruption (d’où le titre britannique, Corrupt).

Entre les personnages forts de Keitel et de Lydon, s’établit un jeu de manipulation réciproque, tordu et masochiste qui vaut au film ses meilleures scènes, au sein d’un décor design d’un appartement chic, inabordable pour un simple policier, qui est magnifié par la réalisation ample de Faenza.

Dans un New York déliquescent où la poulaille est plumée par un homme cagoulé, il est intéressant de constater que le gros du film se situe dans un beau quartier où le paraître dissimule bien des noirs desseins. La musique est importante, Ennio Morricone joue avec les codes du polar urbain (voir son album remasterisé, Copkiller, Order of Death) qui sonde la noirceur du propos tout en livrant une chanson folk discordante, Tchaikovski’s Destruction, qui évoque le besoin vital d’évasion de personnages enclavés dans une cité où le social détermine.

Préfigurant par certains aspects Bad Lieutenant de Ferrara, de par le rôle corrompu d’Harvey Keitel, A couteau tiré est à redécouvrir, ailleurs que sur sa triste copie VHS V.I.P qui hante le marché francophone sous le titre de CopKiller.

Un DVD italien existe, bien peu mémorable. Comme sa carrière cinématographique à découvrir ci-dessous…

Copkiller, A couteau tiré, VHS (Faenza), VIP

Copkiller, A couteau tiré – VHS VIP, Candice Productions, 1985 – Visuel Lafon – Tous droits réservés

Box-office France :

A couteau tiré a connu une sortie délicate, puisqu’il fut repoussé d’une semaine, à la toute dernière minute, en raison d’un encombrement dans les salles le mercredi 15 janvier 1986. Son distributeur, Les Films de la Rochelle, tout petit indépendant qu’il était, a pu le placer in fine le 22 janvier, dans 5 cinémas, face aux nouveautés prestigieuses qu’étaient Rocky IV (65 salles), Chorus Line (17 écrans) et au nanar de Richard Balducci, avec le groupe Les Forbans, Banana’s Boulevard (18 sites).

Pour sa première journée, A couteau tiré divertit 243 curieux contre 79 103 pour le flamboyant Rocky IV qui bat des records dans tous les domaines (marketing, écrans, et nombre d’écrans).

Où voir A couteau tiré sur sa seule semaine à l’affiche au cinéma?

En première semaine, le polar urbain italien réalise un score lamentable de 1 789 spectateurs. On peut le voir aux Halles, aux Forum Cinémas, au Paramount Marivaux, à la Maxéville sur les Grands Boulevards et au Bastille, ainsi qu’en banlieue, à l’Alpha Argenteuil. Sa moyenne catastrophique par écran lui vaut d’être éjecté du circuit à l’issue de sa première semaine.

Le distributeur Les Films de la Rochelle pouvait à peine compter sur le mondo Les interdits du monde, proposé en salle une semaine plus tôt, pour se consoler. Celui-ci réalisait 11 895 entrées pour sa deuxième semaine (total de 29 514), fort d’une présence sur le circuit Paramount.

Malgré la présence de Nicole Garcia au premier plan sur l’affiche, le film réalisera tout juste 8 183 spectateurs en France.

Le thriller est depuis devenu rare en France, après une parution chez V.I.P, en VHS, au milieu des années 80. On ne compte aucun DVD et blu-ray sur notre territoire. A bon entendeur.

Frédéric Mignard

Sorties de la semaine du 22 janvier 1986

A couteau tiré, affiche française du film avec Nicole Garcia et Harvey Keitel

Pierry (graphiste), Jean Louis Lafon (illustrateur) © 1983 Aura Film, Cooperativa Jean Vigo, RAI Radiotelevisione Italiana Tous droits réservés / All rights reserved

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