Valérian et la Cité des mille planètes : la critique du film (2017)

Science-fiction | 2h17min
Note de la rédaction :
5/10
5
Valérian et la cité des mille planètes, affiche

Note des spectateurs :

Valérian et la Cité des mille planètes, film de la chute pour EuropaCorp, est une épopée dispendieuse bâtie sur un script inexistant, dans laquelle les personnages sont sacrifiés dans une course effrénée aux effets spéciaux. On peine à comprendre à qui s’adresse ce ratage.

Synopsis : Au 28ème siècle, Valérian et Laureline forment une équipe d’agents spatio-temporels chargés de maintenir l’ordre dans les territoires humains. Mandaté par le Ministre de la Défense, le duo part en mission sur l’extraordinaire cité intergalactique Alpha – une métropole en constante expansion où des espèces venues de l’univers tout entier ont convergé au fil des siècles pour partager leurs connaissances, leur savoir-faire et leur culture. Un mystère se cache au cœur d’Alpha, une force obscure qui menace l’existence paisible de la Cité des Mille Planètes. Valérian et Laureline vont devoir engager une course contre la montre pour identifier la terrible menace et sauvegarder non seulement Alpha, mais l’avenir de l’univers.

Valérian et la cité des 1000 planètes ou un pari raté sans retour en arrière possible

Critique :  Non présenté à une grande partie de la presse à sa sortie Valérian et la Cité des Mille planètes, vendu comme le plus gros budget du cinéma français (200 millions de dollars), le film ultime de Luc Besson, a suscité beaucoup de curiosité en France, au risque d’être déçu.

La sortie ratée aux USA, en amont, ne permettait pas de donner dans l’optimisme flou : 40M= pour un blockbuster, loin du carton de Lucy, précédent projet du nabab d’EuropaCorp qui a misé la santé de toute sa boîte pour concrétiser son rêve de môme.

Scruté par tous à sa sortie française, Valérian et la Cité des 1000 planètes était difficilement évaluable lors de son apparition presque humble de tant d’ambitions déplacées, d’assurance inopportune… Pourquoi diable avoir voulu placer tout son avenir dans un seul film au parti pris esthétique tellement nineties, ringard et outrageusement singulier ?

L’esprit critique, le regard cynique du blogueur, la nonchalance du pilier des réseaux sociaux, et la défiance des médias écrits en ont eu pour leur attente, Valerian était raté, et pas qu’un peu. De plus, avec une sortie estivale, l’événement médiatique n’y était pas, et même si en France, 4 millions de spectateurs ont renouvelé leur confiance envers le réalisateur de Nikita et Léon, le total allait rester bien loin des espoirs caressés d’une congrégation locale de 7 millions de voyageurs.

Une débandade cinématographique qui transpire l’argent à l’écran

Sur un plan cinématographique, c’est même la débandade à bien des moments. 2h20 de divertissement plutôt alerte, jamais chiche en décors, toujours fécond en effets spéciaux ambitieux. Il ne fait aucun doute que l’argent s’affiche à l’écran, malgré le goût inné pour le kitsch du réalisateur du Cinquième élément. Le ton Besson, celui d’Arthur, malheureusement, tend à rendre l’exercice parfois un peu artificiel, factice, voire franchouillard. Valerian a eu l’outrecuidance de penser que le style du cinéaste était intergénérationnel et que ses tics allaient encore pouvoir fonctionner en 2017. Mais le nouveau monde était là, prêt à se rappeler à la réalité d’un auteur qui, soudainement, avait perdu de sa prestance.

Dane DeHaan et Cara Delevingne dans Valerian et la Cité des mille planètes

Copyright EuropaCorp – VALERIAN SAS – TF1 FILMS PRODUCTION

Luc Besson inaudible

Visionnaire Besson ? Dans les années 80-90 effectivement, la fraîcheur de son cinéma était indéniable mais depuis trilogie gnomesque de Arthur et les Minimoys ou le biopic The Lady, la réalité est autre. A l’écran, l’adaptation des BD de Christin et Mézières n’a jamais la prestance d’un Star Wars ou la fluidité de La Stratégie Ender, qui a pourtant coûté bien moins cher. Le résultat ressemble à la fois aux couleurs du clip-écran vert que Besson signa pour Madonna (Love Profusion, très laid) et à la trilogie des lutins souterrains dans laquelle l’auteur s’était égaré pendant près d’une décennie, au détriment de son talent de conteur ludique pour adultes (Le Grand Bleu, Nikita, Léon, respect éternel).

Oui, Valerian et la cité des 1000 planètes, à l’écran, n’a pas de public acquis. L’œuvre de Christin et Mézières est surtout connue des 40-60 ans, mais ceux-ci ont été bien rares à apprécier le ton juvénile autour de ce spectacle qui fait du pied aux adolescents et mômes d’aujourd’hui, cf. la présence de Rihanna dont il est difficile de cerner le jeu en VF. Les dialogues et l’explicitation des enjeux et du sous-texte sur les migrants de l’espace, dans les répliques, tirent le spectacle vers le bas, et semble davantage s’adresser aux spectateurs assidus des multiplexes américains quand on espère toujours de Besson un grand spectacle équivalent dans l’amplitude à un Dunkerque de Nolan.

Une approche de la science-fiction vieillotte

Pour autant, la tranche d’âge des milléniaux n’y trouvera pas son compte non plus, tant les côtés vieillots de l’univers dépeint à l’écran font injure aux ficelles des (ronflants) Marvel qui obsèdent les jeunes d’aujourd’hui. Besson n’est jamais le dernier quand il s’agit de clamer à l’écran son amour pour les BD de Valerian et Laureline, et forcément essaie d’être fidèle à l’esprit des comics hexagonaux édités chez Dargaud. On ne lui reprochera pas sa dévotion, son jusqu’au-boutisme. Son regard de môme est une manifestation patente de la nostalgie qui l’habite et on trouve sûrement davantage d’éléments personnels dans son film que dans les récents Les Gardiens de la Galaxie 2 et Star Trek sans limites réunis. Valerian, c’est totalement Besson. Toutefois, pour ceux qui ne partagent pas ses bagages de môme, cette approche psychologique anémique et son récit suranné apparaîtront comme des fautes de goût de la part d’un artiste de son âge qui gagnerait à enfin accomplir un vrai récit de divertissement adulte, comme Nolan, son concurrent d’un film sur les écrans, cet été de 2017, le faisait inlassablement.

La défaite historique du cinéma français

Besson a été capable de tellement mieux, avec tellement moins d’argent… Lucy était un bel exemple de pop-corn movie inventif et intelligent. Valerian et la Cité des 1000 planètes, lui, risque de mettre tout le monde d’accord sur un point : s’octroyer un tel budget pour pareille histoire ? Était-ce raisonnable ? Les plus patriotes des Français ont fait de la projection un effort national, les autres l’ont snobée pour voir et revoir le drame de guerre de Nolan. Décidément le Britannique au sommet de sa forme ne loge pas sur la même planète que le gourou un peu dépassé d’EuropaCorp qui allait forcément vaciller après pareil échec, le conduisant a fermé le département distribution de sa boîte et à arrêter de produire à tout va. Bref, Valerian est la triste histoire d’une déroute artistique doublée d’une déconvenue financière rédhibitoire pour une mini major française. Une page d’histoire se tournait brusquement durant cet été carrément meurtrier.

Quelques années plus tard, c’est bien toute la production française qui en subit encore les soubresauts, dans l’incapacité de retrouver l’inspiration pour produire de l’action et du cinéma de genre ambitieux depuis que Besson a jeté l’éponge. Nos recettes mondiales ont fondu comme neige et plus rien ne sera jamais comme avant.

Critique : Frédéric Mignard

Voir le film en VOD

Les sorties du mercredi 26 juillet 2017

Valérian et la cité des mille planètes, affiche

Copyright EuropaCorp – VALERIAN SAS – TF1 FILMS PRODUCTION

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