Quadrophenia : la critique du film (1980)

Drame social, Musical | 2h00min
Note de la rédaction :
8/10
8
Quadrophenia, l'affiche de 1980

  • Réalisateur : Franc Roddam
  • Acteurs : Sting, Ray Winstone, Timothy Spall, Phil Daniels, Leslie Ash, Phil Davis, Mark Wingett
  • Date de sortie: 02 Avr 1980
  • Nationalité : Britannique
  • Titre original : Quadrophenia
  • Titres alternatifs : Quadrophenia: A Way of Life (titre britannique de la reprise) / Quadrophenia - A História de Uma Geração (Portugal) / Kwadrofonia (Pologne) / Kvadrofónia (Hongrie) / Quadrophenia - 60-luvun kapinalliset (Finlande) / Er du gal, mand? (Danemark) / Quadrophenia: La historia de una generación (Argentine)
  • Année de production : 1979
  • Autres acteurs : Toyah Willcox, Trevor Laird, Andy Sayce, Kate Williams, Michael Elphick, Kim Neve, Daniel Peacock
  • Scénaristes : Dave Humphries, Franc Roddam, Martin Stellman, Pete Townshend
  • Directeur de la photographie : Brian Tufano
  • Compositeur : The Who
  • Monteurs : Sean Barton, Mike Taylor
  • Producteurs : Bill Curbishley, Roy Baird
  • Sociétés de production : The Who Films, Polytel
  • Distributeur : Parafrance
  • Distributeur (reprise) : Solaris Distribution
  • Date de reprise : 26 juin 2013
  • Éditeur vidéo : Polygram Vidéo (VHS, 1997) / Universal Pictures France (DVD, 2006) / MEP Vidéo (DVD, 2009) / Universal Pictures France (blu-ray, 2012)
  • Date de sortie vidéo : 1997 (VHS) / 5 septembre 2006 (DVD) / Mai 2009 (DVD) / 21 février 2012 (blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 259 593 entrées / 63 749 entrées
  • Box-office France (reprise 2013) : 7 336 entrées
  • Budget : -
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans en 1980 / Tous publics lors de la reprise 2013
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs (Eastmancolor) / Son : Dolby Stéréo
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique Kalki Création (affiche de 1980), Spark Films (affiche de 2013) © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : Who Films Inc. © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse : Claude Davy, Jean-Pierre Mouette
  • Taglines Le film qui a marqué une "génération" (reprise, 2013)
Note des spectateurs :

Quadrophenia offre une plongée en musique dans l’Angleterre des années 60, tout en étant un superbe cri de révolte qui touche encore de nos jours.

Synopsis : Jimmy, un Mod londonien bouillonnant de colère contre le monde qui l’entoure, se révolte bientôt contre tous ses proches et aussi contre les ennemis héréditaires des mods, les rockers, jusqu’au jour où il tombe amoureux d’une fille qui finira entre les mains de son meilleur ami.

Quadrophenia, une œuvre très différente de Tommy

Critique : À la suite du succès rencontré par Tommy (Russell, 1975) adapté de leur opéra-rock (1,3 million d’entrées rien qu’en France), le groupe The Who a choisi de continuer sur sa lancée en adaptant cette fois-ci leur double album Quadrophenia, sorti en 1973. Pour le combo, il s’agit aussi de compenser leur baisse inquiétante de popularité, d’autant qu’un drame qui les frappe de plein fouet avec le décès du batteur Keith Moon en 1978 par ingestion massive de médicaments. Le membre éminent n’avait que 32 ans.

Malgré ce terrible drame, le groupe a choisi de poursuivre la préproduction du film qu’ils confient au cinéaste inexpérimenté Franc Roddam, après avoir apprécié plusieurs de ses travaux documentaires pour la télévision britannique. Dès qu’il est engagé, l’artiste prévient Pete Townshend qu’il va rester fidèle à l’esprit du disque, mais que son but est de faire un film réaliste pour lequel il n’utilisera pas toute la musique du groupe. L’auteur-compositeur se plie à cette exigence en s’effaçant devant l’interprétation d’un autre artiste.

Quadrophenia, naturaliste dans l’âme

Considéré à tort comme un opéra-rock, Quadrophenia n’est donc que très librement inspiré de l’album concept sorti par les Who, à tel point que la plupart des morceaux ne sont pas intégrés dans le film et que de nouveaux titres ont été au contraire ajoutés au montage final ou très largement remaniés. D’ailleurs, le contraste est saisissant lorsque l’on compare le long-métrage de Franc Roddam avec celui de Ken Russell qui adaptait Tommy (1975) pour le grand écran.

Autant le film à succès de Russell était délirant, à la lisière du clip vidéo, autant celui de Roddam reste marqué par une volonté de réalisme qui s’accorde avec le background de documentariste du réalisateur dont ce fut la première expérience dans le domaine de la fiction. Mais, il ne faut pas se méprendre non plus sur le naturalisme apparent du film puisque les auteurs décrivent l’Angleterre du milieu des années 60 en multipliant les allusions à celle de la fin des années 70. En ce sens, les nombreux anachronismes qui parsèment le long-métrage doivent être compris comme une volonté d’universaliser cette révolte de la jeunesse. Après tout, la révolte du jeune Jimmy n’anticipe-t-elle pas toutes les rébellions futures, que ce soit celle plus pacifique des hippies ou plus violentes des punks ?

Franc Roddam évoque avec justesse le cri de révolte de la jeunesse

Suivant pas à pas ces rebelles sans cause, tous interprétés par une bande de jeunes gens formidables (dont l’excellent Phil Daniels, mais aussi Ray Winstone, Timothy Spall et même le chanteur Sting), le cinéaste décrit durant une grande partie du film cet affrontement incessant entre des bandes rivales : d’un côté, les Mods qui sévissaient sur leurs scooters customisés et qui constituait une grande partie du public des Who dans les années 60, et de l’autre, les Rockers qui se voulaient encore plus rebelles dans leurs tenues de cuir. Il s’agissait pour le groupe de rendre hommage à ses propres fans, d’autant que le double-album a été inspiré par le suicide d’un groupie du groupe qui s’est jeté du haut d’une falaise au début des années 70.

Quadrophenia, l'affiche de la reprise de 2013

© 1979 Who Films Inc. / Affiche : Spark Films. Tous droits réservés.

Sans porter de jugement quelconque sur tel ou tel groupe, Quadrophenia se fait surtout l’écho d’une jeunesse qui ne supporte plus les cadres rigides imposés par une société britannique normative. Le personnage de Jimmy, en apparence assez superficiel dans la première partie du film, devient d’ailleurs un véritable emblème de cette révolte dans sa volonté de ne pas plier face à la pression de ses aînés pour le faire entrer dans le rang. Alors qu’il est assailli de toute part, il finira par se retrouver seul au bord d’une falaise, totalement libre de choisir son destin. La toute dernière image du film renvoie finalement à la toute première, suggérant une fin moins ouverte qu’il y paraît de prime abord.

Un gros succès au Royaume-Uni

Toutefois, le film ne parvient pas toujours à trouver une cohérence stylistique, coincé entre la volonté naturaliste du metteur en scène et les aspirations plus métaphoriques des Who. Peu présente durant la première heure et demie, la musique du groupe se fait plus intrusive dans les dernières scènes qui se rapprochent davantage de Tommy. Mais peu importe ce défaut puisque le résultat final demeure enthousiasmant à plus d’un titre. Quadrophenia s’impose donc comme une exaltation de cette fibre révolutionnaire qui étreint le cœur de la jeunesse, pour le meilleur et pour le pire.

Le film est sorti en grande pompe en Angleterre, parvenant à se hisser à la neuvième place annuelle du box-office et démontrant ainsi le pouvoir d’attraction d’un groupe pourtant débordé par la vague punk. Cette belle performance n’est malheureusement pas relayée à l’international, sans doute moins sensible à se sujet purement britannique – qui se souvient à l’étranger de l’affrontement entre les Mods et les Rockers ? Contrairement à Tommy, Quadrophenia n’a pas fonctionné aux Etats-Unis où il n’a eu le droit qu’à une sortie discrète.

Une lourde interdiction aux moins de 18 ans en France

En France, il est arrivé sur les écrans au mois d’avril 1980, lourdement handicapé par une interdiction aux moins de 18 ans. Effectivement, à cette époque, on pouvait difficilement toucher la jeunesse avec des œuvres qui traitaient directement de la drogue, du sexe et de la violence, tout en exaltant la révolte contre toute forme d’autorité. On notera que la commission de classification des films fut bien plus clémente lors de la reprise du film en 2013, avec une mention pour tous publics qui, pour le coup, est peut-être un peu trop permissive. Par la suite, le long-métrage a tardé à être exploité en VHS et revient régulièrement en édition DVD et blu-ray depuis que The Who est devenu un groupe culte pour les générations des années 2000.

Critique de Virgile Dumez

Box-office :

Sorti à Paris le 2 avril 1980 dans le circuit Paramount (puisque Parafrance était son distributeur), Quadrophenia bénéficie de 23 écrans en semaine 1, ce qui est beaucoup. Il faut souligner qu’il ne dispose que de quatre séances par site en raison d’une durée supérieure à 2h.

Malheureusement la curiosité n’attire pas et le projet dingue ne reste programmé que 5 semaines sur la capitale.

Son entrée, en 10e place, avec 26 290 spectateurs, démontre une curiosité limitée. La production musicale n’a pas de concurrent direct. Les distributeurs n’osent pas affronter Le Guignolo avec Jean-Paul Belmondo, phénomène de marketing, qui bénéficie de 41 écrans pour sa deuxième semaine et évidemment de la première place (171 753 entrées). En 3e position, Fog, de John Carpenter, jouit de 26 écrans (semaine 3, 47 338 entrées). Et Star Trek, carton en Amérique mais pas en France, gravite dans 24  cinémas (semaine 3, 30 320 entrées).

Deux nouveautés ce mercredi le doublent avec pourtant des circuits moins importants : Les Muppets : ça c’est du cinéma ! (26 752  entrées, 20 salles) et Psychose Phase III (26 531, 19 salles).

Derrière le premier film de Franc Roddam, on mentionnera les sorties suivantes :

  • Secrets érotiques avec Laura Gemser et Gabriele Tinti : 13 423 spectateurs dans 6 salles
  • Tendre combat d’Howard Zieff, avec Ryan O’Neal et Barbra Streisand, comédie floppesque qui n’avait aucun potentiel en France : 12 665 entrées dans 6 salles
  • Dynamite Johnson, production hong-kongaise dans 3 cinémas de quartier à 11 067 spectateurs
  • Vive les fantômes, ersatz tchécoslovaque présent dans 1 cinéma, pour 472 spectateurs.

Programmé dans 13 cinémas Paramount, mais aussi au Passy, au Publicis Matignon, le Studio Médicis et le Convention St-Charles, Quadrophenia trouve au mieux 3 727 spectateurs au Paramount Opéra, cette semaine-là.

Il perd 10 écrans et se retrouve à 15 033 spectateurs lors du deuxième round. Son parc est restreint à 5 écrans en intra-muros en 3e semaine, pour  10 078 spectateurs. Quadrophenia parvient enfin à franchir les 50 000 mélomanes. Dans cette contre-performance, au moins réussit-il à doubler Psychose Phase III qui s’est écroulé (43 162 entrées en 3 semaines) faute d’un distributeur suffisamment fort pour lui assurer une stabilité en salle.

Le futur classique produit par The Who conserve ces 5 salles pour sa 4e semaine et rameute encore un public de 7 003 spectateurs aux Paramount Elysées, Bastille, Odéon, Montparnasse et Opéra. Honorable. En 5e semaine, l’étau se resserre, avec 3 cinémas Paramount et 4 205 aficionados du groupe britannique. Le cri générationnel est atone : les Français lui ont préféré un autre film social, Scum d’Alan Clarke, distribué par Gaumont ; celui-ci dépassera les 80 000 entrées à Paris. Outre leur sujet (la jeunesse anglaise rebelle contre l’autorité), les deux films ont un autre point commun de poids : la présence de Ray Winstone qui prendra avec l’âge de l’envergure, notamment chez Ken Loach (Ladybird), Jonathan Glazer (Sexy Beast) et Gary Oldman (Ne pas avaler).

Box-office de Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 2 avril 1980

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Quadrophenia, l'affiche de 1980

© 1979 Who Films Inc. / Affiche : Kalki Création. Tous droits réservés.

Biographies +

Franc Roddam, Sting, Ray Winstone, Timothy Spall, Phil Daniels, Leslie Ash, Phil Davis, Mark Wingett

Mots clés

Film culte, La jeunesse paumée au cinéma, Les jeunes au cinéma, Le rock au cinéma, La drogue au cinéma

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Quadrophenia, l'affiche de 1980

Bande-annonce de la reprise de Quadrophenia (VF)

Drame social, Musical

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