Pinocchio : la critique du film Disney + (2022)

Conte, Fantaisie | 1h45min
Note de la rédaction :
4.5/10
4.5
Affiche américaine de Pinocchio de Disney+

  • Réalisateur : Robert Zemeckis
  • Acteurs : Tom Hanks, Cynthia Erivo, Luke Evans
  • Date de sortie: 08 Sep 2022
  • Année de production : 2022
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Pinocchio
  • Titres alternatifs : Pinóquio (Portugal), Pinokkió (Hongrie), Pinocho (Espagne, Mexique...)
  • Scénaristes : Robert Zemeckis, Chris Weitz, d'après l'œuvre de Carlo Collodi et le classique de Disney
  • Casting vocal & live : Benjamin Evan Ainsworth (voix de Pinocchio), Joseph Gordon-Levitt (voix de Jiminy Cricket), Aidan Towers, Angus Wright, Giuseppe Battiston, Hannah Flynn, Jamie Demetriou, Keegan-Michael Key, Lewin Lloyd, Lorraine Bracco, Sheila Atim...
  • Directeur de la photographie : Don Burgess
  • Monteurs : Mick Audsley, Jesse Goldsmith
  • Compositeur : Alan Silvestri
  • Effets spéciaux : Jacques Gastineau
  • Chef Maquilleur : Eric Pierre
  • Concepteur de costumes : Joanna Johnston
  • Producteurs : Andrew Miano, Chris Weitz, Robert Zemeckis, Derek Hogue
  • Producteurs exécutifs : Jack Rapke, Jacqueline Levine, Jeremy Johns, Paul Weitz
  • Sociétés de production : Walt Disney Pictures, Depth of Field, ImageMovers
  • Distributeur : Inédit au cinéma
  • Distributeur reprise : -
  • Editeur vidéo : -
  • Date de sortie vidéo : -
  • Box-office France / Paris-Périphérie : Inédit au cinéma
  • Box-office nord américain / monde : -
  • Budget : 150 000 000$
  • Classification : Inédit au cinéma
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleur (4K) / Dolby Atmos, Dolby Digital
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © 2022 Disney Enterprises, Inc. All Rights Reserved / Photo courtesy of Disney Enterprises, Inc. © 2022 Disney Enterprises, Inc. All Rights Reserved. / Copyright © 2022 Disney. All Rights Reserved.
  • Hashtags officiels : #DisneyPlus
Note des spectateurs :

Pinocchio dans sa version Disney + est une lecture paresseuse de la version animée de l’oncle Walt, sans aucun point de vue cinématographique.

Synopsis : Un vieil artisan solitaire fait le vœu d’être papa. Le lendemain, sa dernière création, un pantin en bois désarticulé prend vie sous l’effet de la magie d’une bonne fée. Démarre alors un récit initiatique qui conduira le jeune garçon loin de l’école…

Pinocchio réduit à la SVOD sur trois plateformes

Critique : Ironie du sort, le conte de Carlo Collodi, Pinocchio, le second long métrage d’animation à sortir au cinéma après Blanche Neige et les 7 nains, en 1941, est en France une exclusivité sur trois plateformes de streaming.

La fermeture des cinémas lors de la pandémie de COVID-19 avait précipité la relecture de  Matteo Garrone avec Roberto Benigni, directement sur la plateforme d’Amazon, Prime Vidéo ; en fin d’année 2022, Netflix diffusera de son côté un avatar de Pinocchio par Guillermo Del Toro, et, entre les deux, Disney favorise sa plateforme Disney+ pour une diffusion en direct-to-SVOD d’un Pinocchio réalisé par Robert Zemeckis, avec Tom Hanks dans le rôle de Geppetto.

L’incapacité des studios de se défaire des classiques du passé pour bâtir les mythes culturels de demain, fait peur. On avait pu croire qu’Harry Potter né de l’esprit fertile de la grande J.K. Rowling, allait faire des émules, mais 20 ans plus tard, c’est bel et bien le copier-coller qui prévaut. Pinocchio est, au-delà du classique de Collodi (1881), un chef d’œuvre de l’animation, le second du studio Disney, qui représente une révolution pour son époque et une merveilleuse invitation à suivre les péripéties initiatiques d’un pantin en bois doué de vie, d’envies et de désirs d’insolence. Ici, il perd à tous les coups et n’a même plus le design pour lui : les images de synthèse ne lui rendent pas hommage, jusque dans le rendu de sa texture.

Pinocchio de Disney+ : le risque 0

Au lieu de capitaliser sur la beauté intemporelle de cet objet, le studio Disney s’entête sur la voie du risque zéro, en reproduisant un à un, et ici quasiment scène après scène, ses classiques passés en décors réels, les fameux Disney Live Action Reimagining. Cette fâcheuse habitude de vouloir effacer son histoire et détacher la jeunesse du patrimoine culturel pour des succédanés fades, n’a aucune légitimité autre que l’argent. Le comble du capitalisme pour une société qui a essayé de se montrer verte (via Disney Nature) et plus sociale (les accusations de wokisme aux USA).

Artistiquement, Pinocchio de Disney+ ne surprend pas, malgré le nom de Robert Zemeckis et de Tom Hanks sur l’affiche. Le prestige, cela se mérite, et cette coûteuse production sans enjeux narratifs, est une arnaque que seuls les moins de 13 ans trouveront exaltante en raison d’une expérience de vie limitée. Pour Zemeckis, le technicien des années 2000, celui du Pôle express, de La légende de Beowulf et Le drôle de Noël de Scrooge, c’est visuellement très en-deçà de ses visions de cinéma, tant l’univers est figé dans le cliché, dans l’approximation des incrustations sur fond vert, loin du génie technique de ses incursions dans l’animation. Sur un plan narratif, nous serons moins surpris, Bob Zemeckis n’a plus rien à raconter à travers ses œuvres depuis des décennies. Des films récents comme The Walk et Alliés (le couple Brad Pitt et Marion Cotillard), nous l’ont tristement prouvé.

En version live-action, Pinocchio ne tient plus debout

La quête initiatique du pantin italien est jonchée de maladresses. La présence de Chris Weitz au script explique cela. L’ancien réalisateur d’American Pie et scénariste de Cendrillon de Kenneth Branagh, n’est pas le nom que l’on aurait aimé voir figurer à ce poste. Au gré de l’histoire, on s’étrangle. On nous vend une tentative d’explication assez adulte sur le pourquoi Geppetto n’a pas d’enfant. Au vu du ton global du film, cela en devient déplacé. Geppetto parcourt une partie du film à la recherche de son bambin,  avec son bocal à poisson et son chat dans la poche. Ce qui passait dans l’animation en devient bêta dans la version live. La Fée Bleue n’apparaît qu’une seule fois et semble avoir été coupée au montage sur la fin, tellement elle ne sert à rien sur 1h50 de film. Cela ampute la féminité du récit qui était confinée dans ce beau personnage. L’Île enchantée ressemble à un ersatz de Disneyland, factice et sans invention alors qu’il était possible de s’adonner alors à un imaginaire débridé. Pinocchio, fade et sans créativité technique autour de son design, n’a plus aucune insolence. Il y a perdu son caractère buté. Il ne sèche pas l’école, mais en est renvoyé ; il se retrouve par accident sur l’Île enchantée où il ne boit plus, ne fume plus… Le bout de bois ambulant subit gentiment des situations qu’il n’a pas provoquées, ce qui contredit la morale bien trouvée du film initial.

Un remake de cachetonneur et hymne à la finance

Tout le monde cachetonne dans cette resucée, Tom Hanks le premier. La star de 66 ans s’est contentée d’un chèque pour être grimé. Point. Bob Zemeckis en cinéaste officie comme un tâcheron et abandonne tout effort de mise en scène à quelques rares plans près. Sa vision de cinéma n’est plus, filmant de façon cadrée des scènes éculées. La découverte de Pinocchio par Geppetto au petit matin, aurait pu être un beau moment s’il avait été travaillé. L’intérieur de Monstro, qu’un Tim Burton aurait pu fantasmer, devient anecdotique, laissant le monstre des mers (il est décrit comme tel dans le film), très loin derrière celui du Sea Monster de Netflix Animation, paru sur la plateforme concurrente deux mois plus tôt, le 8 juillet 2022.

Bref, Pinocchio de Disney + relève d’une engeance illégitime. Rejeton naturel d’un plan de croissance pour concurrencer Netflix, ce produit est la négation même du cinéma où tout le monde perd : les enfants à qui l’on n’offre plus que du réchauffé seront déroutés plus tard par tout ce qui sort des normes culturelles ; les spectateurs adultes qui y perdent un temps précieux (cela dure 1h51!), et surtout les exploitants qui ne comprennent pas pourquoi Disney bafoue les règles de bonne conduite dans le domaine de l’exploitation. Et évidemment, à vouloir sortir directement sur plateforme des produits lisses, c’est bien l’art cinématographique qui en prend pour son grade. La qualité des divertissements est revue par le bas, car contrairement au cinéma où l’on se doit d’être exigeant, dans le cas de la SVOD, tout le monde, y compris ceux qui n’auraient pas franchi la salle, y jette un coup d’œil par curiosité et répondre aux tendances de l’instant sur les réseaux sociaux. En 2022, les entités filmiques les plus médiocres battent des records sur les plateformes. Cela devrait faire réagir.

Pauvre époque.

Frédéric Mignard

Disney live action reimagining

Pinocchio au cinéma

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Teaser du Pinocchio de Disney+

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