Série B pêchue et d’une violence crue, Nobody s’inscrit pleinement dans la lignée de la franchise John Wick, avec une grosse dose de second degré bienvenue. Divertissant.
Synopsis : Hutch Mansell, un père de famille sans histoire, accumule un tas de frustrations. Une nuit, alors que deux cambrioleurs pénètrent chez lui, il fait le choix de ne pas intervenir, plutôt que de risquer une escalade sanglante. Une décision qui le discrédite définitivement aux yeux de son fils Blake. Mais cet incident réveille chez cet homme blessé des instincts larvés qui vont le propulser sur une voie violente, révélant des zones d’ombres et des compétences létales insoupçonnées.
Le scénariste de John Wick à la manœuvre
Critique : Le scénariste Derek Kolstad est surtout connu des cinéphiles pour avoir créé le personnage de la franchise John Wick qui comprend à ce jour trois films (auquel on peut déjà ajouter un quatrième épisode actuellement en production). Celui-ci a donc écrit Nobody (2021) dans un style très proche de celui de la saga qui a fait son succès. Ce scénario a beaucoup circulé à Hollywood lorsque l’agent du réalisateur russe Ilya Naishuller lui fait parvenir. Celui qui a tourné le film d’action Hardcore Henry (2015) se dit immédiatement qu’il est la personne idéale pour dynamiter ce script dingue.
La production est finalement lancée en 2019 au Canada – et notamment dans la ville de Winnepeg qui sert de décor à l’action – pour éviter une inflation des coûts de production. Avec seulement 16 millions de billets verts pour une œuvre entièrement vouée à l’action, les contraintes budgétaires sont effectivement de taille. Là où l’on attendait des acteurs de la stature de Liam Neeson ou encore Keanu Reeves, le métrage est mené par Bob Odenkirk, surtout connu pour son rôle principal dans la série télé Better Call Saul, spin-off de Breaking Bad. Afin d’être crédible en véritable machine à tuer, l’acteur s’est tout de même entraîné deux ans, puisque le tournage a été sans cesse repoussé.
La violence ne peut mener qu’à la violence
Si le film démarre doucement en présentant le morne quotidien d’un nobody que l’on pourrait traduire par anonyme, l’action va vite prendre le pas. Effectivement, le père de famille terne et qui semble s’ennuyer profondément – justement interprété par Odenkirk – va (re)prendre goût à la violence à la suite d’un cambriolage raté à son domicile. Alors que sa famille est directement menacée, l’homme se révèle incapable de bien la protéger. Cela nourrit une forme d’aigreur chez lui. Afin de passer ses nerfs, il intervient donc lors d’une agression dans un bus et se révèle alors être une redoutable machine à tuer.
Cette séquence du bus est non seulement d’une redoutable efficacité en termes de gestion de l’espace et de chorégraphie, mais elle déclenche également le rire tant la puissance meurtrière du bonhomme prend par surprise. On apprendra par la suite que cet simple quidam était autrefois un redoutable combattant.
Nobody, nouveau champion de la violence gratuite, mais fun
Malheureusement pour le protagoniste principal, l’un des agresseurs du bus était lié à un parrain de la mafia russe, très bon Alexeï Serebriakov, qui va chercher à se venger. Comme dans la saga John Wick, un événement d’une portée apparemment insignifiante va déclencher une tempête de violence inimaginable avec plusieurs dizaines de morts à la clé. Dans Nobody toutefois, la dimension humoristique prend souvent le pas sur la crédibilité. Ainsi, le réalisateur pousse le bouchon très loin avec l’intervention carrément parodique du vétéran Christopher Lloyd, en mode mercenaire à la retraite.
Souvent drôle, volontairement bis, Nobody brise des vertèbres comme d’autres alignent des perles et remporte la palme de la violence gratuite la plus crasse. Mais il faut reconnaître que le spectacle est plutôt fun, bien interprété et surtout rondement mené par un réalisateur qui a appris depuis Hardcore Henry à rendre lisible une scène. Malgré un déchaînement ininterrompu de violence, de fusillades et d’explosions, le spectateur n’est jamais perdu et peut donc profiter à plein de belles poussées d’adrénaline.
Bien évidemment, même si les auteurs annoncent qu’il s’agit de démontrer qu’un homme habitué à la violence ne peut plus s’en défaire, Nobody est moins une œuvre à la thématique forte qu’un pur moment de déconnade qui s’inscrit pleinement dans la lignée d’œuvres testostéronées comme John Wick ou encore Atomic Blonde. La réussite, même mineure, est bien là et l’ensemble se regarde donc sans problème.
En France, Nobody n’avait aucune notoriété pour s’imposer
Si le film a connu une exploitation plutôt positive aux Etats-Unis, notamment grâce à la minceur de son budget, la crise sanitaire n’a tout de même pas permis au long-métrage de réaliser son plein potentiel commercial. En France, le film devait initialement sortir en août 2020, avant d’être repoussé à plusieurs reprises à cause de la fermeture des salles de cinéma. Nobody a finalement été proposé en salles au début du mois de juin 2021, alors que la reprise de l’exploitation était plutôt décevante. Pourtant présent dans 360 cinémas lors de sa semaine d’investiture, le film d’action n’a attiré que 80 440 gueules cassées. La septaine suivante, le film dégringole de 50 % de ses entrées car les jeunes se ruent vers le médiocre Conjuring 3. Nobody atteint donc les 122 034 clients en quinze jours.
Malgré un parc maintenu au-dessus des 150 salles, le métrage coup de poing attend de pied ferme ses spectateurs et finit sa carrière à 148 418 entrées. Finalement, le distributeur Universal a certainement regretté d’être passé par la case cinéma, le film ayant plutôt des allures de produit de série B désormais consommable sur les plateformes.
Critique de Virgile Dumez
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