Sixième plus gros succès en France en 1999, Le monde ne suffit pas est une déception dont on ne gardera que l’interprétation ambigüe de Sophie Marceau et le thème élégant de Garbage. Le reste est paresseux et mis en scène par un cinéaste peu engagé dans la force de l’action.
Synopsis : Le magnat du pétrole Sir Robert King est assassiné par une tueuse que Bond élimine. Le M16 découvre que le commanditaire du meurtre est le redoutable terroriste appelé Renard. Chargé par M de la protection de la fille de King, Elektra, 007, armé des derniers gadgets de Q, part pour le Caucase afin de démasquer Renard…
Jaquette 2020 © 1999 United Artists Corporation and Danjaq LLC. Tous droits réservés / All rights reserved
Critique : Plus gros budget de l’histoire pour un film de James Bond, avec 135M$, Le monde ne suffit pas a généré pas moins de 361M$ dans le monde, dont 126M$ aux USA où il a fini l’année en 12e place annuelle. Au niveau de l’action, il s’agissait carrément, après La menace fantôme, Matrix et La momie, du 3e score de l’année.
Le monde ne suffit pas : l’un des pires James Bond
Cette bienveillance du public à l’égard du film laisse pensive, tant cette surenchère d’action moche (l’enfer des CGI) voulue par les producteurs laisse dubitative. Réalisé par le malléable Michael Apted, cinéaste qui n’a pas le rythme dans la pellicule, Le monde ne suffit pas se positionne comme l’un des plus faibles films de la saga.
Après l’univers du magnat des médias dans Demain ne meurt jamais, James Bond plonge dans le bourbier du pétrole, en protégeant Elektra fille d’un nabab des énergies fossiles assassiné par un redoutable terroriste. La métaphore de l’essence donne lieu à un générique poisseux qui confond la séduction avec la combustion. Et s’il n’y avait pas la belle chanson de Garbage, on fermerait non seulement les yeux, mais les oreilles également.
Denise Richards, pire James Bond girl en 19 films ?
La suite est affligeante car le contexte géopolitique imprègne peu et l’arrière-plan narratif (la construction d’un pipe-line) nous ennuie. Pis, dans un mode narratif plan-plan, l’apparition d’une experte en nucléaire provoque la gêne. La jolie Denise Richards est introduite de façon humoristique, jusque dans sa tenue, ce qui rend son personnage invraisemblable. Dépeinte comme une Lara Croft de la science, l’ancienne Mme Sheen n’est jamais crédible dans un rôle trop sérieux pour son minois. Visiblement choisie pour son physique avenant (elle sortait des succès de Starship Troopers de Verhoeven et du générationnel SexCrimes), la jeune actrice joue faux à chacune de ses apparitions et obtiendra un Razzie Award bien mérité pour cette consternante prestation. Elle prétend donc au titre de la pire James Bond girl de l’histoire.
Première édition France du blu-ray de Le monde ne suffit pas © 1999 United Artists Corporation and Danjaq LLC. Tous droits réservés / All rights reserved
Sophie Marceau, seul intérêt d’un blockbuster fossilisé
Face à elle, et surtout à Bond, le personnage d’Elektra est interprété par Sophie Marceau. L’actrice a demandé un cachet de vedette plus élevé que la moyenne pour une Bond Girl. Il est vrai qu’elle déploie des talents dramatiques que l’on voit peut dans les Bond mettant en scène Pierce Brosnan. Jadis kidnappé par un terroriste surnommé Renard et dont elle est tombée amoureuse (Robert Carlyle, dans un rôle qui n’exprime pas toute sa fibre nerveuse), le personnage de Marceau a basculé du côté des grands vilains du bestiaire bondien. Sans rédemption possible, contrairement à Grace Jones dans Dangereusement vôtre, par exemple.
Au sommet de sa beauté glamour d’actrice, Marceau joue en anglais avec une justesse qui est non seulement à souligner, mais à féliciter. Elle apporte épaisseur, psychologie, et noirceur crue à un personnage qu’elle tire vers le haut, au-delà des figures stéréotypées de ce type de cinéma.
Sophie Marceau est l’unique raison de découvrir ce film. Mais en le revoyant, son empreinte manifeste ne suffit peut-être plus, tant le monde global dans lequel elle évolue nous paraît bien fade.