Doté d’un suspense haletant, Le chant du loup s’avère être une excellente surprise, redorant le blason trop souvent écorné d’un certain cinéma de genre français. A découvrir en salles pour être totalement immergé dans une ambiance hautement anxiogène.
Synopsis : Un jeune homme a le don rare de reconnaître chaque son qu’il entend. A bord d’un sous-marin nucléaire français, tout repose sur lui, l’Oreille d’Or. Réputé infaillible, il commet pourtant une erreur qui met l’équipage en danger de mort. Il veut retrouver la confiance de ses camarades mais sa quête les entraîne dans une situation encore plus dramatique. Dans le monde de la dissuasion nucléaire et de la désinformation, ils se retrouvent tous pris au piège d’un engrenage incontrôlable.
Le chant du loup a repoussé les frontières du thriller français
Critique : Sacré pari que celui des nombreux coproducteurs ayant fait confiance à un réalisateur novice pour être à la tête d’un budget conséquent consacré à une thématique et un genre – le film de sous-marin – qui est généralement réservé au cinéma américain ou aux grosses coproductions européennes. Antonin Baudry investit donc un cinéma de genre qui se revendique comme tel et qui, pour une fois, respecte parfaitement sa note d’intention initiale. Certes, le cinéaste ancre son long-métrage dans un certain réalisme lors d’une première séquence formidable qui nous permet de comprendre le rôle de chacun à bord d’un sous-marin, mais il n’hésite pas ensuite à aborder la politique-fiction par une intrigue bien ficelée et ménageant de nombreuses surprises. Contrairement à bon nombre de films traitant de sous-marin, il n’est ici aucunement question de sauvetage d’un équipage, mais bien d’une escalade politique menant les Etats au bord de la guerre nucléaire.
Alors que le film commence donc de manière assez classique, mais d’une grande pertinence documentaire, il s’empare des problèmes internationaux actuels – développement d’un terrorisme islamiste de plus en plus organisé et offensif, rôle déstabilisateur de la Russie – pour tresser une intrigue tortueuse sur fond d’angoisse nucléaire. Le métrage réactive ainsi les vieux réflexes anxiogènes qui furent si prégnants lors de la guerre froide, pour signer une œuvre stressante à souhait. Pris au piège des différents protocoles militaires, les différents personnages sont sans cesse partagés entre leur appréciation personnelle de la situation et leur devoir en tant que militaires assujettis à une autorité supérieure. La force du long-métrage est de parvenir à placer le spectateur dans la même position de doute que les différents protagonistes, sans jamais juger aucun d’entre eux.
Réalisation à l’américaine, univers oppressant : efficacité maximum
Afin d’immerger le spectateur au cœur de ce suspense souvent insoutenable, le cinéaste a particulièrement soigné la bande sonore qui nous implique totalement dans cet univers étouffant. Le son est d’ailleurs un thème essentiel du film, celui-ci s’achevant d’une manière plutôt ironique en ce qui concerne le personnage principal incarné avec talent par François Civil. L’ensemble du casting est parfaitement choisi : Omar Sy rachète ici ses dernières prestations médiocres par une belle présence, Reda Kateb semble bien porter le sort du monde sur ses épaules et Mathieu Kassovitz compose un amiral digne, respectueux à la fois des procédures, mais également juste avec ses hommes. Tous très crédibles, ils forment assurément une bien belle équipe, chacun étant au diapason des autres.
Doté d’une réalisation à l’américaine, d’un montage resserré qui ne s’embarrasse pas de psychologie inutile ou de dialogues explicatifs, Le chant du loup porte haut l’étendard d’un certain cinéma de genre français qui n’a ici aucunement à rougir d’une quelconque comparaison avec ses confrères d’outre-Atlantique. Nerveux, tendu comme un garrot, le métrage nous fait passer par toutes les émotions possibles durant une projection décidément enthousiasmante. On ne boudera donc pas notre plaisir !
Critique du film : Virgile Dumez
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Antonin Baudry, François Civil, Omar Sy, Reda Kateb, Mathieu Kassovitz, Damien Bonnard, Paula Beer, Jean-Yves Berteloot, Bastien Ughetto