Péplum de série B, La révolte des prétoriens est un divertissement sympathique grâce à un script assez enlevé et la présence de deux acteurs de qualité. La réalisation, elle, demeure assez faible.
Synopsis : Rome s’irrite sous le règne de l’empereur Domitien et de sa maîtresse égyptienne, Artamne. Un mystérieux champion surgit pour lutter contre l’Empereur – un homme masqué connu sous le nom du Loup rouge. En fait, le loup rouge est Valerius Rufus, l’un des centurions de confiance de l’empereur qui n’est aidé par nul autre que le bouffon de la cour de l’empereur, le petit Elpidion.
Un premier film qui scrute une période de l’Antiquité rarement abordée
Critique : Assistant-réalisateur très apprécié, notamment de Mario Amendola et Mario Caiano, Alfonso Brescia a notamment œuvré sur bon nombre de péplums au début des années 60. Avec La révolte des prétoriens (1964), il peut enfin passer à la vitesse supérieure en réalisant son tout premier film, dans le genre qu’il maîtrise le mieux, à savoir le film d’aventures antiquisant. Il se fonde ici sur le script de Gian Paolo Callegari, spécialiste du genre depuis la fin des années 50 avec des titres comme La révolte des gladiateurs (Cottafavi, 1958), Maciste à la cour du Cheik (Paolella, 1962) ou encore Hercule contre les mercenaires (Lenzi, 1964).
Pour sa première incursion derrière la caméra, Alfonso Brescia s’intéresse à une période de l’histoire romaine généralement ignorée, à savoir le règne de l’empereur Domitien qui a duré de 81 à 96 après Jésus-Christ. Comme sur son péplum suivant, Le gladiateur magnifique (1964), Brescia préfère aborder le péplum sous un angle plus historique que mythologique. Il cherche donc avant tout à insérer une intrigue digne des serials des années 40 dans un contexte qui serait assez respectueux de l’histoire antique.
L’empereur Domitien, clone de Caligula ?
Toutefois, il est important de signaler que les auteurs de ce film se sont surtout basés sur les sources historiques de l’Antiquité. Ils proposent donc une vision orientée et faussée du règne de Domitien. Certes, l’empereur a montré au cours de son règne de nombreux signes de despotisme, mais les auteurs de l’Antiquité, souvent favorables au Sénat, ont parfois noirci le portrait de l’homme à des fins politiques et propagandistes. Les recherches historiques plus récentes ont tendance à revenir sur cette vision très noire d’un empereur peu populaire au sein de l’aristocratie qui voyait ses pouvoirs amoindris.
Dès lors, Domitien est ici décrit comme un tyran sanguinaire qui n’a d’autre but que de régner en maître absolu sur l’empire romain. L’acteur Piero Lulli l’interprète en conséquence comme un empereur à la limite de la démence et l’on a parfois l’impression que son modèle fut Caligula et non le véritable Domitien. Finalement, même si les auteurs ont voulu davantage coller à la réalité historique, ils ont surtout souscrit à la légende d’un empire romain décadent mené par des empereurs fous. Il faut dire que cela correspondait à la version généralement admise dans les années 60 et que cela offre davantage d’opportunités sur le plan cinématographique.
Une œuvre dominée par la prestation de Piero Lulli en méchant
Finalement, La révolte des prétoriens doit être surtout vu comme un pur film d’aventures, typique de l’époque. Ainsi, le héros interprété avec un certain charisme par Richard Harrison joue un double jeu en étant à la fois un chef de la garde prétorienne (il s’agit de la garde rapprochée de l’empereur) et un opposant très actif déguisé en Loup rouge. Si le costume du loup en question peut faire sourire de nos jours, il ne dépareille pas dans la panoplie très large de héros masqués qui ont sévi sur les écrans dans les années 60. On songe ainsi à Zorro, mais aussi à des personnages comme celui de La tulipe noire (Christian-Jaque, 1964).
Après un démarrage plutôt stimulant, La révolte des prétoriens souffre de plusieurs défauts typiques du genre. Tout d’abord, le scénario a tendance à être un peu trop répétitif et les différentes péripéties sont globalement peu variées – on enlève tour à tour des donzelles de chaque camp pour faire chanter l’autre. Ensuite, tous les acteurs ne sont pas nécessairement excellents. Si Richard Harrison y croit encore et livre une prestation physique intéressante, c’est bien Piero Lulli qui emporte le morceau en méchant absolument détestable et donc jubilatoire. Par contre, on regrettera le sous-emploi de Giuliano Gemma qui n’a ici qu’un rôle de sidekick. Enfin, les actrices sont essentiellement jolies à regarder, mais leur jeu n’est guère enthousiasmant.
Une réalisation bien plate pour un péplum qui demeure sympathique
Le pire vient de la réalisation d’Alfonso Brescia qui est souvent très plate. Il a notamment tendance à filmer les combats en plan large et fixe. Il est difficile de faire moins impressionnant, d’autant que cela dénonce souvent le caractère factice des affrontements, pas toujours bien chorégraphiés au demeurant. C’est d’autant plus dommage que les décors sont plutôt convaincants et que l’ensemble se tient sur le plan visuel. Finalement, La révolte des prétoriens est un péplum qui reste sympathique pour peu que l’on apprécie les films d’aventures old school.
Sorti en France deux ans après sa réalisation, en juillet 1966, La révolte des prétoriens a attiré tout de même 386 109 amateurs de péplum. On notera que le métrage a également connu une reprise en France à la suite de sa ressortie italienne de 1971, sous le titre Les Invincibles guerriers, histoire de profiter de la nouvelle popularité de Giuliano Gemma qui est propulsé en tête d’affiche par des distributeurs plutôt malhonnêtes puisque l’acteur n’a qu’un rôle secondaire dans le film. Au cours des années 80, le long-métrage a été édité en VHS par Atlantic Vidéo, puis a également été publié à plusieurs reprises au cours des vingt dernières années en DVD.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 6 juillet 1966
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