Erotica, longtemps exploité par René Chateau, est initialement une publicité coquine pour l’empire sexuel du Britannique Paul Raymond.
Synopsis : Brigitte Lahaie se rend à Londres, pour réaliser un reportage sur les spectacles érotiques et les magazines de charme créés par Paul Raymond, le magnat du divertissement pour adulte au Royaume-Uni. Brigitte fait la connaissance de ses modèles attitrés et des stars de ses shows. Son exploration de l’univers de Paul Raymond lui offre autant de nouvelles expériences sexuelles renversantes.
Un film érotique immortalisé par le visuel de Francis Giacobetti
Critique : Erotica est bien connu des amateurs de K7 Vidéo des années 80. Et pour cause, le film forcément érotique a été immortalisé par une série de photos commandées par René Chateau auprès du photographe de nu Francis Giacobetti dont il était proche. Il en est né une jaquette magnifique que les éditions René Chateau réexploiteront à l’identique en DVD jusqu’à la mort du célèbre homme d’affaires et ancien compagnon de Brigitte Lahaie.
En 2024, lorsque l’éditeur Pulse Vidéo édite à son tour le film britannique en blu-ray, il utilise le même visuel iconique qui vaut sûrement mieux que le produit fini.
Paul Raymond’s Erotica arrive pourtant tardivement en France, puisque le film est présenté au marché du film à Cannes en 1981. Aucun distributeur français ne se l’approprie. René Chateau le fera en 1984 après son rapprochement avec l’ancienne star du X qui avait tourné cette fantaisie érotique très chic peu de temps après avoir abandonné le porno.
En France, une nouvelle collaboration René Chateau et Brigitte Lahaie
René Chateau et Brigitte Lahaie au milieu des années 80, ce sont des collaborations culte comme Joy et Joan (dont l’actrice fait la publicité dans la VF), L’Exécutrice, et Les prédateurs de la nuit. A chaque fois les visuels publicitaires témoignaient du sens du commerce indéniable de l’ancien attaché de presse de Jean-Paul Belmondo, avec des affiches parfaitement cadrées pour satisfaire le format 120×160 dans les salles et surtout pour faire rêver les clients des vidéo-clubs qui ont eu le droit à une vrai promo de blockbuster dans les vidéo-clubs avec de nombreuses affiches pour en faire la promotion.
Erotica en tant que projet se justifiait entièrement comme oeuvre de marketing. Au début des années 80, époque sans internet où le fantasme masculin commençait à imprimer en vidéocassette mais existait essentiellement en salle, dans les sex-shops et les revues coquines, papier ou en live, il s’agissait de faire la promotion à l’échelle mondiale de l’empire de charme de Paul Raymond méconnu des Européens.
Brochure touristique pour le Londres libertin de Paul Raymond
Le millionnaire britannique, cousin européen de Larry Flint, régnait sur un empire démesuré dans l’univers de la nuit londonienne, ainsi que dans la publication de titres pour adultes comme Men Only, Mayfair, ou Razzle, bien connus des Britanniques, moins des Français, mais dont on se souvient des références hilarantes dans la série Absolutely Fabulous. Connu comme le King of Soho, le magnat du sexe comptait promouvoir ses clubs coquins via ce faux documentaire sensuel, à l’esthétique léchée. Brigitte Lahaie, alors star du X, est conviée dans le film à Londres comme hôtesse international pour découvrir les revues de charme de Raymond qui apparaît à ses côtés lors de séquences iconiques pour les archivistes d’un temps révolu.
Et voilà donc notre Brigitte national débarquant en Concorde de Paris pour se faire la voix et le corps d’une brochure touristique qui ne manque ni de piquant ni de scènes érotiques, puisqu’au-delà des scènes de spectacles filmés, le scénariste (un mot usurpé tant tout semble improvisé) insère quelques rencontres libertines entre la vedette française juvénile et des conquêtes féminines et masculines, pour des scènes chorégraphiées qui ne sont jamais hardcore.
Erotica se veut beau et luxueux, jamais vulgaire, et ses fans lui accorderont la place qu’il voudra. Là n’est pas la question.
Le film travaille le montage plus que sa pseudo intrigue inexistante. C’est pour cela qu’à la réalisation, on retrouve Brian Smedley-Aston, célèbre monteur britannique qui avait travaillé auparavant sur Performance de Nicolas Roeg, La nuit des vers géants, Blue Sunshine, la série Holocaust, avec Meryl Streep.
Un complément conseillé avant le biopic réalisé par Michael Winterbottom (2013)
Cinématographiquement limité, le projet se veut toujours léger et enthousiasmant, prônant la liberté sexuelle et l’insouciance absolue, dans un Londres érigé en haut lieu de tourisme libertin. Il est clairement question de donner une image conviviale à d’éventuels touristes qui souhaiteraient visiter les établissements de Paul Raymond.
Ce dernier fera d’ailleurs l’objet d’un célèbre biopic signé Michael Winterbottom, avec dans le rôle titre l’ancien comique Steve Coogan. A Very Englishman (dont la bande-annonce figure sur le blu-ray 2024), est sorti 5 ans après la mort du nabab du soft-porn. A voir en complément d’Erotica.
Le blu-ray de Erotica
Avec la mort de René Chateau, l’exploitation de son répertoire s’ouvre et Pulse Vidéo en profite pour proposer ce nouveau titre dans une collection maison comprenant les deux films de Jesus Franco avec Brigitte Lahaie Je brûle de partout – Dark Mission. Pulse a également consacré deux ouvrages de poids à la star de cinéma pornographique des années 70.
Suppléments & Packaging : 3.5 /5
L’édition limitée en digipack est remarquable dans sa volonté de rendre hommage à la jaquette VHS originale. Un vrai collector qui se doit d’être le choix premier de ceux qui veulent s’approprier le film. C’est un bel objet comme on en a peu.
Au niveau des bonus, on notera la présence de la gauloiserie Touchez pas au zizi de Patrice Rhomm (1978) déjà exploitée par LCJ mais en DVD. Un titre difficilement regardable, mais les collectionneurs apprécieront l’effort de restauration.
Une interview très courte de Brigitte Lahaie complète la galette. Elle revient notamment sur les efforts qui ont été faits pour la sublimer à l’écran.
L’ex-compagne de Paul Raymond, Fiona Richmond évoque lors d’un entretien très bref de 4mn, sa rencontre avec l’homme qui allait changer sa vie.
Plus long, l’entretien avec Serges Jacques, collaborateur de Paul Raymond, pourrait être intéressant, mais le son n’est pas forcément des plus audibles.
Image & son : 3 / 5
Le blu-ray propose un nouveau master restauré d’après un scan 4K d’une copie propre, selon le site de Pulse Vidéo. Le résultat n’est pas forcément concluant. Le contraste est largement perfectible et beaucoup d’anicroches demeurent. Cela reste néanmoins une authentique copie HD qui rendra justice au travail du chef opérateur de l’époque.
Le film est proposé en Mono, en version originale ou en VF, avec un doublage qui sonne parfois anachronique. Forcément intéressant.
La musique est kitsch mais jolie, et trouve un parfait récipient dans cette copie qui trouve la bonne hauteur.
Blu-ray de Erotica, avec Brigitte Lahaie, édité par Pulse Vidéo en 2024 – D’après une photo de © Francis Giacobetti. Collection René Chateau. Tous droits réservés / All rights reserved – © 2024 Pulse Vidéo. Tous droits réservés / All rights reserved