Dernière nuit à Milan s’inscrit dans la grande tradition du thriller à l’italienne avec une réelle efficacité, dopée par une bande originale référentielle qui emballe. Une belle réussite à découvrir.
Synopsis : À l’aube d’une retraite méritée, un policier milanais ignore qu’il s’apprête à vivre les instants les plus difficiles de son irréprochable carrière.
Andrea Di Stefano développe une intrigue classique
Critique : A la fois acteur et scénariste accompli, le cinéaste Andrea Di Stefano n’a que deux longs métrages à son actif en tant que réalisateur lorsqu’il envisage de tourner le thriller Dernière nuit à Milan (2023). On lui doit notamment la coproduction franco-espagnole Paradise Lost (2014) où Benicio Del Toro incarnait un glaçant Pablo Escobar. Quand il aborde la rédaction du script de Dernière nuit à Milan, Andrea Di Stefano entend avant tout rendre hommage à la probité de bon nombre d’agents de police qui sacrifient une partie de leur existence pour protéger leurs concitoyens.
C’est pourquoi le long métrage s’attache à suivre les pas de Franco Amore (interprété avec autorité par Pierfrancesco Favino), un flic intègre qui va prendre sa retraite dans quelques heures. Malheureusement pour lui, certains de ses collègues et amis vont l’entrainer malgré lui dans une histoire trouble lorsqu’il accepte de devenir le temps d’un voyage le transporteur d’une cargaison de diamants pour le compte d’un riche homme d’affaires chinois. Bien entendu, le convoi ne se déroule pas du tout comme prévu et l’affaire tourne au vinaigre lorsque son coéquipier décède.
Un tournage à l’ancienne et en pellicule 35mm
Le scénario peut sembler de prime abord un peu cliché puisqu’il rassemble plusieurs éléments qui font partie des archétypes du genre. Toutefois, le cinéaste injecte une petite nouveauté en faisant de la mafia chinoise les victimes d’une machination policière, renversant ainsi les attentes du grand public. De plus, le réalisateur offre à la compagne du flic intègre un rôle qui ne se résume aucunement à celui d’une potiche, comme trop souvent dans le genre. Interprétée par Linda Caridi, la jeune femme qui partage la vie du policier intervient de manière active afin d’aider le héros à effectuer les bons choix.
© 2023 Universal Pictures International. Tous droits réservés / All rights reserved
La tension qui innerve l’ensemble du long métrage vient de l’unité de temps et quasiment de lieu puisque tout se déroule durant une nuit sur une autoroute milanaise qui devient le théâtre d’un braquage original, puis d’une traque trépidante afin de récupérer les diamants égarés. En ce sens, le réalisateur a parfaitement su gérer les contraintes d’un tournage s’étant vraiment déroulé sur une portion d’autoroute, sans renfort d’effets spéciaux, mais avec des vrais cascadeurs. Une qualité à l’ancienne qui se retrouve aussi dans le choix de tourner en pellicule 35mm donnant à l’image un grain spécifique qui nous enchante bien davantage que le numérique, plus froid dans son rendu.
Dernière nuit à Milan se réfère aux grandes heures du poliziottesco
Enfin, autre point de satisfaction, Dernière nuit à Milan s’insère volontairement dans toute une histoire du cinéma de genre italien en jouant la carte de la référence aux modèles que furent les films de Fernando Di Leo autour de la ville de Milan comme le séminal Milan calibre 9 (1972). Même si la mafia chinoise remplace la traditionnelle Ndrangheta, le cinéaste inscrit son film dans une géographie urbaine bien spécifique et qui revêt une importance majeure dans le déroulement de l’intrigue.
A cela, il faut encore ajouter la magnifique musique signée Santi Pulvirenti qui développe un thème immédiatement identifiable comme aux temps mémorables des Ennio Morricone, Bruno Nicolai ou autres Luis Bacalov. Dès les premières notes de musique, le cinéphile se retrouve plongé au temps béni où le cinéma italien dominait de plusieurs encablures toute la production européenne, non seulement en quantité, mais aussi en qualité. Cet emballage sonore fait son petit effet et contribue largement au plaisir ressenti durant la projection de cette œuvre nerveuse et diablement efficace qui a même le bon goût de se terminer sur un plan ambigu laissant au spectateur le choix de l’interpréter selon son bon plaisir.
Une déception commerciale en France
Présenté pour la première fois au Festival de Berlin 2023, Dernière nuit à Milan a également fait partie de la sélection hors compétition souvent pertinente du festival Reims Polar 2023. Après une carrière italienne correcte, le long métrage est également sorti dans les salles françaises à partir du 7 juin 2023 où il devait affronter Transformers : Rise of the Beast et surtout Wahou! de Bruno Polalydès. Présenté à Paris dans 15 salles, le thriller transalpin décroche 547 entrées à 14h, ce qui paraît bien timoré.
Sur la France entière, Dernière nuit à Milan disposait de 169 écrans pour accueillir 4 945 spectateurs lors du premier jour d’exploitation, ce qui en fait une déception à l’allumage. En une semaine, le thriller fédère 40 869 cinéphiles, avant de connaître une chute régulière de fréquentation durant ses huit semaines passées dans les salles obscures. Si le métrage double ses entrées initiales et termine un peu au-delà des 100 000 tickets, il s’agit assurément d’une déception pour Universal qui distribuait le métrage. Depuis, le film est disponible en VOD, DVD et blu-ray et mérite vraiment une séance de rattrapage.
Critique de Virgile Dumez
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Andrea Di Stefano, Pierfrancesco Favino, Linda Caridi, Francesco Di Leva, Antonio Gerardi
Mots clés
Cinéma italien, Polar urbain des années 2020, Poliziottesco, Milan au cinéma