Alliés de Robert Zemeckis n’est ni plus ni moins qu’une romance molle et désincarnée qui ne saisit jamais le potentiel de son casting et de son sujet.
Synopsis : Casablanca 1942. Au service du contre-espionnage allié, l’agent Max Vatan rencontre la résistante française Marianne Beauséjour lors d’une mission à haut risque. C’est le début d’une relation passionnée. Ils se marient et entament une nouvelle vie à Londres. Quelques mois plus tard, Max est informé par les services secrets britanniques que Marianne pourrait être une espionne allemande. Il a 72 heures pour découvrir la vérité sur celle qu’il aime.
Critique : 2016. Après une décennie 2000 essentiellement consacrée aux films d’animation, Robert Zemeckis poursuit sa tentative de résurrection commerciale dans le cinéma adulte déçu des contreperformances artistiques et commerciales de Flight (2012) et The Walk (2015).
Une romance enracinée dans le milieu de l’espionnage anti Nazi
Pour son retour à une production d’envergure, il opère dans le cinéma de guerre classique où les combats distants sont des prétextes pour mieux investir une romance enracinée dans le milieu de l’espionnage anti Nazi, avec un couple de stars en tête d’affiche.
Entre le Maroc d’un conte des Mille et Une Nuits, Londres au ciel étoilé d’explosions qui rendrait le conflit armé sublime, et une France des villages occupés par les Bosch, la reconstitution est surtout glamour, comme pour épouser la cinégénie du couple Brad Pitt-Marion Cotillard, les deux étant à peu près les seuls à exister à l’écran, au détriment des personnages secondaires inexistants. Un choix artistique facile tant il s’imposait comme une évidence pour un auteur paresseux.
Les acteurs interprètent ici deux espions de charme qui jonglent assez curieusement avec les langues (le français de Brad Pitt, qui prétend être du terroir, est très approximatif). Alliés suit essentiellement leur histoire d’amour. Elle démarre dans l’élégance d’une rencontre dans le Casablanca désuet des films d’aventure colonialistes et se poursuit dans les troubles de leur mariage chez nos voisins d’Outre-Manche.
Les deux stars déambulent quelque peu figées par la glace de la pellicule, voire même par des effets de retouche numérique dans le cas de Brad Pitt qui frappé une nouvelle fois par la malédiction Benjamin Button. Cela tempère l’expressivité de l’acteur au sein d’une œuvre qui manque amèrement d’incarnation et de chair.
Un film de guerre épuré et sans vacarme
Avec un désir ardent de magnifier chaque plan et le désir avide de délivrer un tribut aux grandes productions romanesques de l’après-guerre, Zemeckis, qui s’emploie de temps en temps à quelques trouvailles de réalisation, filme surtout mou. La passion physique est moins charnelle qu’artificielle et la fugue passionnelle se concrétise dans l’émotion facile de la toute fin, au détriment du thriller, sans suspense, et du film de guerre, épuré et sans vacarme.
Au final, Alliés grille tous ses atouts, évoquant les désastres passés du couple Angelina Jolie Brad Pitt, à savoir The Tourist (où Jolie était « agrémentée » de la présence de Johnny Depp) et Vue sur la mer qui réunissait devant la caméra de la comédienne devenue réalisatrice, le mari et la femme aujourd’hui divorcés. Deux accidents industriels qui ont redéfini les années 2010.
Alliés, c’est un peu le film de la désunion Pour Brad Pitt et Angelina Jolie. Cette dernière, absente à l’écran, voit son ombre glamour planer irrémédiablement sur le projet, le vouant à n’être qu’une belle coquille vide et désincarnée.
Box-office d’Alliés : un bide de plus pour Zemeckis
Enième bide d’un Robert Zemeckis en fin de course, Alliés a été un désappointement mondial qui n’a généré que 40M$ au box-office états-uniens durant l’automne 2016. Les Américains ont vite abandonné les Européens face à leur patrimoine historique. La France a fait illusion avec 990 000 entrées, grâce à la présence d’une Marion Cotillard décidément à l’aise avec l’anglais.
Si l’Australie a quelque peu sauvé les meubles en parant la production Paramount de ses deuxièmes meilleures recettes mondiales derrière les USA (8 935 000$) contre 7 390 000$ pour la France, Alliés a eu beau connaître une sortie jusqu’en Chine, les réserves du public à son égard en ont fait un flop patenté.
Le roman glacé, contrit d’imperfections, a depuis été vite oublié. A peine le ressort-on pour un prime à la télévision. Une décennie plus tard, Robert Zemeckis n’a toujours pas pu raviver la flamme du public à son égard, malgré quatre longs métrages entre 2018 et 2024. Lui aussi fait désormais partie de l’histoire.
Les sorties de la semaine du 23 novembre 2016
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Robert Zemeckis, Brad Pitt, Marion Cotillard, August Diehl, Simon McBurney, Camille Cottin, Thierry Frémont, Matthew Goode, Jared Harris, Lizzy Caplan, Raffey Cassidy