Michael Pitt est un acteur, chanteur et musicien américain, connu pour ses frasques rock’n’roll, dont la carrière prometteuse n’a jamais réussi à être à la hauteur des espérances, malgré des choix souvent pertinents. Finalement, c’est dans la série Boardwalk Empire, au début des années 2000, qu’il tirera son plus gros succès, pendant la saison 2.
Blondinet présent en toile de fond du branché Studio 54 en 1998 et dans la troisième saison de la série Dawson’s Creek (1999-2000), Michael Pitt n’a alors que 17 ans et la promesse d’une carrière au moins aussi étincelante que les soirées du club mythique du New York de la fin des années 70. Ce n’est pas pour rien s’il tiendra en 2001 quelques beaux moments dans le flamboyant Hedwig and the Angry Inch, premier film de John Cameron Mitchell, en 2001. Il figure aussi, cette même année, dans le choquant et débridé Bully de Larry Clark, au cœur d’un collectif de jeunes acteurs sexy filmé dans une optique malsaine qui fera scandale à sa sortie.
Michael Pitt impose sa bonne mine dans A la rencontre de Forrester, production ronflante du hype Gus Van Sant (2001) et Calculs meurtriers (2002).
Sa beauté diabolique d’ange décadent attire des cinéastes subversifs : Bernardo Bertollucci le met en trouple dans Innocents : The Dreamers, un classique qui révèle parallèlement Eva Green et Louis Garrel (2003). Pitt est lancé pour de bon, même si le succès commercial est nul. Le film est trop érotique pour son temps, mais devient culte et générationnel, bien qu’incompatible avec le conservatisme ambiant des années 2020.
Attirée par sa décadence cinégénique qui transpire à l’écran, Asia Argento l’embarque dans son chef d’oeuvre, Le livre de Jérémie, qu’elle réalise en 2005. Un autre monument du glauque, avec Peter Fonda, Marilyn Manson et Ornella Muti. Le film est un choc. Michael Pitt y est formidable. Issu d’un milieu modeste du New Jersey et aventurier d’un parcours scolaire chaotique, il prend visiblement beaucoup de plaisir à incarner un personnage borderline.
De très grands rôles attendent encore le jeune homme, bien avant d’atteindre sa trentaine : il se distingue dans Last Days, biopic transcendant sur les derniers jours de Kurt Cobain, par Gus Van Sant touché par la grâce (l’acteur-musicien écrit un certain nombre de morceaux à l’occasion), Delirious du délicieusement indépendant Tom DiCillo, l’effroyable remake de Funny Games par Michael Haneke lui-même, Funny Games US, avec Naomi Watts et Tim Roth. Il y torture et tue froidement. Le public ne répond pas à l’appel, mais personne n’a vraiment envie de revivre ce jeu de massacre.
Les années 2010 seront moins concluantes pour l’artiste. Les espoirs des premiers longs n’ont jamais donné des chiffres concluants dans les salles, y compris le contemplatif Last Days. En fait, son vrai succès de la décennie passé est Le village de M. Night Shyamalan, c’est-à-dire un thriller malin où son rôle est tertiaire.
Michael Pitt poursuit donc une belle accumulation d’échecs : Soie de François Girard, mélo romantique avec Keira Knightley, I Origins, un indie movie ésotérique de Mike Cahill, le thriller Criminal, un espion dans la tête, avec Sean Connery et Gary Oldman, et surtout Ghost in the Shell, adaptation en film d’un manga, avec Scarlett Johansson et Juliette Binoche. L’échec mondial du film empêche l’enfant terrible d’Hollywood de se remettre sur les rails.
Le cinéma ne lui a jamais totalement tourné le dos. Pendant 20 ans, Michael Pitt ne cessera de tourner et séduit de nombreux cinéastes comme Roger Michell (Dérapages incontrôlés, pour une petite apparition, en 2002), James Cox pour le biopic hard Wonderland, avec Val Kilmer (2004), Julian Golderber pour Dressé pour vivre, avec Paul Giamatti (2008), Kevin Smith pour Top Cops avec Bruce Willis (2010), Martin McDonagh (un petit rôle dans 7 Psychopathes, 2013)…
Michael Pitt à Cannes 2023 ?
Au moins, en France, chez Samuel Benchetrit, il trouve l’un de ses meilleurs rôles au cœur de la choral d’acteurs d’Asphalte, où l’on croise quelques déesses (Isabelle Huppert, Valeria Bruni-Tedeschi).
Désormais acteur un peu paumé, moins sollicité en raison de son tempérament fort durant les tournages, Michael Pitt tourne dans le film chinois Detective Chinatown 2 (2018), comédie pour le public adolescent asiatique, le film indie pas très coté de John Swab, Run With the Hunted (2019) et un Direct-to-Netflix calamiteux en 2020, The Last Days of America Crime d’Olivier Megaton…
Finalement, c’est au festival de Cannes, en 2023, que Michael Pitt semble avoir l’opportunité d’un vrai retour avec le thriller Black Flies dans lequel il côtoie Sean Penn.
© Frédéric Mignard. Tous droits réservés