Selle d’argent : la critique du film et le test blu-ray (1978)

Western | 1h38min
Note de la rédaction :
6/10
6
Selle d'argent, la jaquette du blu-ray Artus

Note des spectateurs :

Selle d’argent est un western inédit de Lucio Fulci qui sort pour la première fois en France dans une édition soignée, bien qu’il s’agisse d’une œuvre assez impersonnelle, surtout centrée sur la figure de Giuliano Gemma. Le divertissement, très familial, est toutefois garanti.

Synopsis : Voulant contester la vente d’un terrain auprès du propriétaire Richard Barrett, un fermier et son fils vont trouver son homme de main. Pour toute réponse, ce dernier tue le père. Le garçon ramasse l’arme et abat froidement le meurtrier, puis emporte avec lui sa belle selle d’argent. Quelques années plus tard, sous le nom de Roy Blood, l’enfant est devenu un chasseur de primes redouté. Un jour, on lui propose de régler une affaire mettant en cause le frère de Barrett.

Un Fulci impersonnel destiné à valoriser Giuliano Gemma

Critique : Lorsque Lucio Fulci accepte de tourner Selle d’argent à la fin de l’année 1977, le réalisateur est au bout du rouleau après plusieurs échecs commerciaux successifs, auxquels il faut ajouter de nombreux problèmes personnels. Il a donc grand besoin d’un succès commercial qui le remettrait ainsi en selle. Le projet est donc surtout porté par la star du genre Giuliano Gemma et Lucio Fulci n’en est que le simple exécutant, ce qui se traduit par un résultat très professionnel, mais qui entretient peu de rapport avec l’œuvre du réalisateur.

Ainsi, le script d’Adriano Bolzoni recycle pour la énième fois des clichés du genre et des situations archétypales, sans que l’on parvienne à trouver une quelconque plus-value par rapport à tous ses prédécesseurs. Arrivant en queue de comète alors que le western spaghetti est déjà essoré, Selle d’argent semble faire table rase des quinze dernières années écoulées et se présente comme un digne héritier des premiers Ringo de Duccio Tessari, avec justement Giuliano Gemma. L’acteur incarne une fois de plus un héros dépourvu d’ambiguïté, mais foncièrement sympathique.

Celui-ci va peu à peu s’attacher à un gamin de 10 ans qu’il doit protéger contre la rapacité de brigands en tous genres. La référence immédiate est bien entendu le chef d’œuvre de George Stevens L’homme des vallées perdues (1953) que le script de Bolzoni tente d’imiter, souvent de manière grossière. Toutefois, il est important de noter que ce sont les relations entre le pistolero et l’enfant qui font tout le sel de ce long-métrage divertissant et occasionnellement poignant.

Un script bâclé pour un résultat classique

On reste davantage circonspect devant les facilités scénaristiques et les failles d’un script parfois en roue libre. Ainsi, les auteurs nous présentent à plusieurs reprises des méchants potentiels qui, finalement, quittent un peu rapidement l’histoire pour faire place à un nouvel antagoniste. Cette structure libre – pour ne pas dire chaotique – est assurément la plus grande faiblesse de Selle d’argent.

En ce qui concerne la réalisation, relativement classique, elle présente peu de défauts majeurs, mais manque trop souvent d’audace. Considéré par beaucoup comme le western le plus familial de Fulci, Selle d’argent est effectivement dépourvu de violence graphique et s’inscrit donc davantage dans la filmographie plus sautillante et insouciante de Gemma que dans celle torturée de Fulci.

Cela ne doit pourtant pas éconduire les spectateurs férus de western européen puisque les acteurs assurent tous dans des rôles bien typés – on aime particulièrement l’emploi de charognard sympathique tenu par Geoffrey Lewis. Le petit Sven Valsecchi, qui a interrompu sa carrière d’enfant-acteur l’année suivante, est également l’un des points forts du film grâce à son jeu naturel et sa bouille d’ange. Enfin, les amateurs des méfaits horrifiques de Fulci retrouveront avec plaisir Cinzia Monreale.

L’excellente partition musicale sauve les meubles

Mais ce qui vient raviver la flamme des amoureux de western spaghetti est bien la musique du trio Bixio-Frizzi-Tempera qui dégaine une BO à la croisée des chemins entre une folk apaisée et des délires faisant beaucoup penser aux expérimentations d’un certain Ennio Morricone. Ils habillent en tout cas avec beaucoup de talent un long-métrage dynamique et enlevé, mais souffrant d’un script décevant.

Véritable bide en Italie, le métrage n’a jamais réussi à franchir les Alpes, ni au cinéma, ni en VHS et c’est désormais en DVD et blu-ray que l’on peut visionner cette curiosité, sans doute le western le plus faible de Fulci, sans être déshonorant pour autant. Quelques mois plus tard, le réalisateur s’embarquait dans l’aventure de Zombi 2, l’enfer des zombies qui allait changer à jamais son statut, faisant de lui un cinéaste adulé par les amateurs d’horreur et de gore.

Le test du blu-ray :

Selle d'argent, jaquette du blu-ray

© 2018 Artus Films / Conception graphique : Benjamin Mazure. Tous droits réservés.

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Compléments & packaging : 4/5

Pour un film au potentiel commercial limité, Artus Films a mis les petits plats dans les grands. Certes, le packaging est moins beau que celui de la collection Fulci dédiée à l’horreur, mais les bonus, eux, sont tout aussi conséquents. On démarre par une introduction très informative de Lionel Grenier (10mn) qui replace le film dans la carrière de Fulci et insiste sur le caractère familial du métrage. L’habitué Alain Petit se fend d’une riche intervention de 44mn où il revient lui aussi sur le contexte de création du film, le replaçant notamment dans l’histoire du genre. Il décrit ensuite par le menu les carrières de Fulci, mais aussi de ses collaborateurs techniques, avant de s’intéresser aux acteurs.

Des suppléments toujours passionnants

Puis, un entretien entrecroisé avec Fabio Frizzi et Giuliano Gemma (25mn) fait la part belle aux anecdotes où l’on nous confirme l’aspect caractériel de Fulci, mais aussi sa capacité à motiver ses collaborateurs. Frizzi (le plus bavard) se souvient également des séances d’enregistrement avec ses complices de l’époque Bixio et Tempera, ainsi qu’avec le chanteur canadien Ken Tobias. Enfin, l’assistant monteur Bruno Micheli y va de ses souvenirs liés à Fulci durant 17 minutes un peu languissantes à cause d’un débit de parole quelque peu atone. Histoire d’être complet, l’éditeur nous fournit également une version alternative de la première séquence du film, cette fois teintée en jaune. Reste à consulter quelques affiches et photos d’exploitation, ainsi que la bande annonce. On est aux anges !

L’image : 4/5 

Si la copie n’est pas exempte de quelques défauts (quelques impuretés par-ci par-là), elle n’en demeure pas moins d’une très bonne tenue pour découvrir ce long-métrage rarissime. La définition n’est pas toujours tranchante, mais la colorimétrie riche et l’impeccable stabilité compensent largement. De quoi être vraiment satisfait sur ce plan.

Le son : 4/5

Le film étant totalement inédit sur notre territoire, il n’existe aucune version française et l’éditeur nous propose donc une unique piste en version originale sous-titrée en 2.0 DTS HD Master Audio. Rien à signaler de particulier puisque la piste a été nettoyée de toute scorie, les voix sont claires et la musique ne sature pas. Du bon travail dans la limite de ce format sonore.

Critique du film et test blu-ray : Virgile Dumez

Les westerns spaghettis sur CinéDweller

Selle d'argent, l'affiche italienne

© 1978 Rizzoli Film. Tous droits réservés.

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