Polar de série assez basique, Profil bas se laisse regarder, mais ne parvient jamais à vraiment atteindre sa cible. La faute à une histoire tout juste passable et à une réalisation trop télévisuelle.
Synopsis : Julien Segal, inspecteur de police, est la cible favorite de son supérieur. Ce dernier a pactisé avec Roche, un trafiquant de drogue. Celui-ci assure le contrôle des voyous d’une banlieue sud de Paris, en échange de quoi le policier ferme les yeux. Chargé de débusquer “la taupe” qui œuvre à l’intérieur de leurs services, Carré désigne Segal pour une mission d’infiltration dans le milieu des dealers.
Critique : Alors qu’il vient de connaître un joli succès avec sa comédie d’espionnage La totale (1991), le réalisateur Claude Zidi ressent l’envie de changer radicalement de genre, lui qui a passé sa carrière à faire rire le grand public. Il a le désir de tourner un film policier sombre et radical, histoire d’effectuer un virage encore plus marquant que celui opéré avec Deux (1989), son drame sur le couple.
© 1993 Film Par Film – Films 7 – TF1 Films Production / Jaquette : Pathé / Photographie : Philippe Robert. Tous droits réservés.
Pour cela, il s’associe à des complices bien connus puisqu’il s’agit de Simon Michaël et Didier Kaminka avec qui il avait déjà écrit Les ripoux (1984), l’un de ses plus gros succès. Les trois hommes inventent donc cette histoire originale de piège tendu par un flic ripou à l’un de ses agents. Parfait dans la peau du flic corrompu, Didier Bezace révèle une belle présence à l’écran. Face à lui, Patrick Bruel incarne le policier pris au piège. Ce dernier est alors plongé en pleine hystérie depuis le triomphe de son album Alors regarde.
Alors que l’acteur chanteur était souvent associé à la bonne humeur et l’insouciance au cours des années 80, il entame la décennie suivante avec des chansons plus sombres. Il opère alors une mue artistique qui le place en idole des jeunes adolescentes torturées. Il incarne ainsi une certaine forme de rébellion adolescente et sa prestation dans Profil bas s’en ressent forcément.
Devenu une star, Patrick Bruel roule des mécaniques comme Tom Cruise a pu le faire à cette même époque aux Etats-Unis. Sa prestation n’est bien évidemment pas mauvaise, mais l’acteur se regarde un peu trop souffrir pour que l’on sente une réelle authenticité dans son interprétation. Cela a tendance à parasiter l’empathie que le spectateur pourrait ressentir pour son personnage de marginal mal dans sa peau.
Il faut ajouter à cela un certain manque de caractérisation des différents personnages qui, trop souvent, deviennent archétypaux. Ainsi, Didier Bezace n’est défini que par sa duplicité, Patrick Bruel n’est qu’un loser qui découvre finalement l’amour et la jolie Sandra Speichert n’est qu’une jolie jeune femme fraîche et pleine de vie.
En ce qui concerne l’intrigue elle-même, elle ne tient pas nécessairement la route sur l’ensemble du long-métrage. Certes, on apprécie sa fin légèrement amorale, mais l’histoire lambine quand même pas mal, ce qui est accentué par une musique assez inepte de Gabriel Yared (en mode saxophone plaintif, comme on en subira beaucoup dans les séries policières françaises des années 90).
Esthétiquement assez proche des polars urbains des années 80, le film souffre toutefois d’une réalisation qui rappelle malheureusement aussi les téléfilms des années 90. Dépourvu de scène d’action mémorable, Profil bas est donc un polar de série regardable, mais qui s’oublie aussi vite qu’il a été vu. Cela explique sans aucun doute le succès tout relatif qu’il a obtenu lors de sa sortie, avec seulement 624 472 spectateurs dans les salles. On est alors très loin des résultats des meilleurs Delon et Belmondo, références évidentes de Zidi ici. On pourra tout de même noter la présence dans un petit rôle d’Olivier Marchal, acteur qui, en passant derrière la caméra, parviendra à ressusciter de ses cendres le polar français durant les années 2000.
Critique de Virgile Dumez
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