Comédie de plage fort sympathique, Pizzaiolo et Mozzarel bénéficie d’une ambiance estivale charmante et de gags burlesques plutôt efficaces. Le script, par contre, est aux abonnés absents. Agréable pour les nostalgiques d’un cinéma populaire qui ne se prenait pas la tête.
Synopsis : Carlo Monte est un pizzaiolo qui partage son temps entre les jolies filles et la pizzeria qu’il tient avec son frère Mozzarel sur la plage. Un jour, Edwige descend de son yacht pour inviter Carlo à dîner. Aidé de son frère, le pizzaiolo organise une soirée très romantique pour faire tomber la milliardaire dans ses bras. Le rêve de Carlo prend fin quand, le lendemain matin au petit déjeuner, ils sont accueillis par deux tueurs. Carlo Monte se trouve être le sosie de Gonzales Ramirez, un truand sud-américain venu en France pour acheter des armes.
Quand Aldo Maccione retrouve Wolinski pour la troisième fois
Critique : En 1984, le réalisateur Christian Gion tourne un film pour enfants très ambitieux avec Karen Cheryl intitulé J’ai rencontré le père Noël. Sorti en grandes pompes pour Noël 1984, le film dépasse de peu les 200 000 entrées sur toute la France, ce qui en fait un accident industriel. Retour à la case comédie pour un Christian Gion qui doit donc se refaire une santé sur le plan économique. Et pourquoi pas avec Aldo Maccione, poids lourd tout terrain de cette époque, et ceci même si l’entente ne fut pas cordiale entre les deux hommes sur le tournage du Bourreau des cœurs (1983).
A partir d’une idée de Georges Wolinski qui signait ici sa troisième collaboration avec Maccione, après Aldo et Junior et Le Cowboy, Christian Gion et le gagman André Nader ont donc développé le script de Pizzaiolo et Mozzarel (1985) qui s’inscrit pleinement dans le sous-genre de la comédie de plage alors très en vogue. Dans ce genre, on pourrait bien évidemment citer les œuvres de Max Pécas, mais aussi Jean Girault, Richard Balducci, Robert Thomas et bien entendu Philippe Clair, dont on retrouve jusqu’au sujet du sosie, le script de Plus beau que mois tu meurs en filigrane. Il faut dire qu’avec plus de 3 millions d’entrées au box-office, ce fut le plus gros succès personnel d’Aldo Maccione. Il s’agissait souvent de comédies au script minimal qui servait de prétexte pour étaler de la chair fraîche à l’écran. Profitant notamment de la vogue du topless sur les plages françaises, ces comédies permettaient de susciter un léger voyeurisme de la part d’un public qui pouvait également se souvenir de ses propres vacances d’été, sans penser à mal.
Une certaine science du gag burlesque
D’ailleurs, la première demi-heure de Pizzaiolo et Mozzarel ne s’embarrasse même pas de scénario puisque nous suivons les mésaventures du pizzaiolo Carlo – incarné avec un indéniable sens comique par Aldo Maccione – et de son demi-frère Mozzarel sur les plages où ils officient en tant que restaurateurs. Durant cette première partie, tout repose intégralement sur des gags qui tiennent du burlesque pur, parfois mâtiné d’un aspect cartoon plutôt sympathique. On retrouve là un certain sens de l’humour issu de la bande dessinée (Wolinski oblige), le tout dans une ambiance polissonne qui ne prête aucunement à confusion.
Certes, Maccione interprète comme d’habitude un dragueur balourd, mais son personnage n’est jamais vraiment valorisé et il apparaît surtout dans toute sa dimension ridicule et pathétique. Ainsi, lorsqu’il pense emballer la milliardaire incarnée par Beth Todd, il s’agit en réalité d’un piège monté de toute pièce. Durant cette partie, on apprécie particulièrement les séquences se situant dans l’appartement déglingué de Maccione et Sidney (où tout communique de manière absurde), ainsi que l’intégralité de la séquence se déroulant dans le restaurant. Et puis, très honnêtement, tous les passages se déroulant sur la plage suscitent aussi le rire par l’accumulation de gags qui sont visuels (les baffes et autres chutes) ou en-dessous de la ceinture. Ceux qui, comme l’auteur de ces lignes, ont connu l’ambiance de plage du début des années 80, faite d’un esprit bon enfant, trouveront matière à nostalgie lors de ces séquences fort sympathiques.
Une deuxième partie fondée sur un quiproquo classique, mais mal agencé
Par la suite, l’intrigue classique du sosie qui doit prendre la place d’un dictateur est plutôt mal fagotée, et surtout ne débouche sur rien de bien crédible. Pour autant, certains gags et quiproquos demeurent amusants, d’autant qu’Aldo Maccione se donne beaucoup de mal pour amuser la galerie dans son double rôle. Les caprices du dictateur sont plutôt drôles et suffisamment absurdes pour amuser. Cette dernière partie mal construite et qui se termine en queue de poisson ne dure heureusement pas trop longtemps et Pizzaiolo et Mozzarel bénéficie d’une durée très courte qui lui évite de tomber dans la redite et l’ennui.
Une déception au box-office pour une comédie désormais oubliée
Au côté d’Aldo Maccione, on signalera la présence amusante de Marthe Villalonga, mais aussi du présentateur télé Sidney qui connaissait alors une certaine popularité auprès des jeunes en étant l’animateur de la première émission télévisée sur le hip-hop. Pizzaiolo et Mozzarel sera son unique incursion au cinéma, alors que sa prestation n’est pas déshonorante. On signalera enfin que la quasi-totalité de la bande-son est constituée d’une version instrumentale de la chanson Marcia Baïla des Rita Mitsouko. De quoi rendre la projection plutôt sympathique !
Sortie au mois de décembre 1985, la comédie de plage avait pour but d’amuser le public populaire à peu de frais pendant les fêtes de fin d’année. Toutefois, le score obtenu a largement déçu les attentes des producteurs. Avec 623 637 tickets vendus à son compteur, la comédie a réalisé deux fois moins d’entrées que Le bourreau des cœurs (1983). Ce mauvais score était le signe du déclin d’un certain type de divertissement qui allait être emporté par la crise du cinéma peu de temps après. La carrière d’Aldo Maccione n’allait pas s’en remettre, de même que celle de Christian Gion dont les films suivants seront tous des échecs commerciaux. Evidemment les critiques assassines démontent le film à la sortie, mais ils ne sont pas les seuls. Les fans hardcore d’Aldo Maccione trouvent le métrage nanardesque et conspuent le produit. Le journaliste Gilles Botineau, grand admirateur du comique, dans son ouvrage Aldo Maccione, la classe ! (édition Christian Navarro) évoque une “équipe artistique dans son intégralité qui frôle l’amateurisme” et un Aldo Maccione qui “joue pour la première fois de façon approximative et se désintéresse totalement de ses partenaire. Quel gâchis !” lâche-t-il consterné. Il a sûrement raison, mais l’amateurisme vintage et rétro lui confère malgré tout un charme discret.
Si Pizzaiolo et Mozzarel a fait l’objet d’une sortie en VHS par René Chateau Vidéo, aucun DVD ne semble avoir été pressé, le long-métrage rejoignant la longue liste des comédies d’Aldo Maccione non éditées.
Critique de Virgile Dumez