L’éventreur de New York : la critique du film (1983)

Thriller, Giallo, Epouvante-horreur, Gore | 1h32min
Note de la rédaction :
6/10
6
L'éventreur de New York, l'affiche française

  • Réalisateur : Lucio Fulci
  • Acteurs : Jack Hedley, Almanta Suska, Howard Ross, Andrea Occhipinti, Paolo Malco, Zora Kerova, Daniela Doria, Michele Soavi, Alexandra Delli Colli
  • Date de sortie: 04 Mai 1983
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : Lo squartatore di New York
  • Titres alternatifs : Ripper, l'éventreur de New York
  • Année de production : 1982
  • Scénariste(s) : Gianfranco Clerici, Lucio Fulci, Vincenzo Mannino, Dardano Sacchetti
  • Directeur de la photographie : Luigi Kuveiller
  • Compositeur : Francesco De Masi
  • Société(s) de production : Fulvia Film, Silent Warrior Productions
  • Distributeur (1ère sortie) : S.N. Prodis
  • Éditeur(s) vidéo : MPM Production (VHS, 1983, 1991) / René Château Vidéo (VHS, 1989,1992) / Néo Publishing (DVD, 2005) / The Ecstasy of Films (Mediabook)
  • Date de sortie vidéo : 28 août 2020 (Mediabook)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 188 971 entrées / 42 381 entrées
  • Budget : 640 millions de lires
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans à sa sortie / Interdit aux moins de 16 ans de nos jours.
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : Présenté au 12e Festival international de Paris du Film fantastique et de Science-Fiction
  • Illustrateur / Création graphique : Enzo Sciotti (visuel italien) / Promo 505 (visuel français)
  • Crédits : Surf Film
Note des spectateurs :

Thriller de tous les excès, L’éventreur de New York déploie sa misanthropie tout au long d’un film peu aimable, zébré d’incroyables éclats de violence. A ne pas mettre devant tous les yeux.

Synopsis : A New York, plusieurs femmes sont assassinées de manière atroce par un tueur en série, connu pour être doté d’une voix de canard. L’inspecteur Williams se charge de l’enquête alors que les meurtres sadiques s’enchaînent…

Un des derniers rejetons du giallo

Critique : Alors qu’il vient de terminer La maison près du cimetière (1981) qui clôt un cycle de films d’horreur gore marquants, Lucio Fulci est à nouveau approché par le producteur Fabrizio De Angelis pour mettre en boîte un giallo qui se situerait aux Etats-Unis. Il lui propose ainsi le script de Gianfranco Clerici et Vincenzo Mannino, avec qui Fulci avait déjà travaillé sur La longue nuit de l’exorcisme (1972). Toutefois, le producteur impose d’importantes réécritures qui sont effectuées notamment par Dardano Sacchetti. Ce dernier change notamment le mobile du tueur et délocalise l’action de Boston à New York.

LEventreur de New York, cover B de lédition collector chez The Ecstasy of Films

Copyrights : Enzo Sciotti

Tourné en extérieur dans les rues de New York – sans aucune autorisation afin d’alléger les coûts de production – puis en studio à Rome, L’éventreur de New York peut être considéré comme l’un des derniers rejetons du genre giallo, alors passé de mode. Le réalisateur en reprend certains codes comme l’assassin qui tue des femmes avec des outils contondants, certains éclairages bariolés lors des scènes de meurtres, ainsi que la forme du whodunit.

L’éventreur de New York, un vilain petit canard

Toutefois, Lucio Fulci, peut-être inspiré par la violence qui se dégage alors des rues new-yorkaises, semble davantage s’inscrire dans un cinéma américain underground extrême qui s’impose progressivement sur les écrans. Ainsi, durant la projection, on pense davantage à des films comme Maniac (Lustig, 1980) ou Driller Killer (Ferrara, 1979). Pas sûr que Fulci en ait conscience à l’époque, lui qui a toujours cité Hitchcock parmi ses références, mais il semblerait que la ville américaine inspire ces mêmes sentiments extrêmes aux artistes de l’époque.

Décrite comme une ville du vice et de la violence, New York est bien plus qu’un décor, mais bien une antichambre de l’enfer où semblent se déverser toutes les perversions humaines. Souvent accusé de misogynie, L’éventreur de New York est en réalité bien plus que cela. Certes, le sort réservé aux femmes est particulièrement salé puisque le cinéaste se plaît à décrire leurs souffrances avec une forme de sadisme complaisant, mais il n’est guère plus sympathique avec les hommes. Outre un enquêteur incapable d’empathie, il nous propose une galerie de machos libidineux, de maris impuissants ou d’homosexuels plus ou moins refoulés. En réalité, le film nous montre surtout une gente masculine impuissante et dont les pulsions refoulées les poussent aux pires atrocités.

Lucio Fulci Bandeau Wallpaper

Copyrights : The Ecstasy of Films / Les Films du Camélia

Un couin-couin d’enfer

Finalement, ce qui rend L’éventreur de New York aussi peu sympathique à suivre, c’est cette volonté avouée du cinéaste à décrire un monde en totale déliquescence, le tout baignant dans une misanthropie pleinement assumée. La grande force du long-métrage est de bousculer sans cesse le spectateur dans ses attentes et de lui proposer un spectacle finalement peu aimable. Certes, il y a du sexe, mais si peu excitant – la scène du pied sous la table, assez dégoutante. Oui, il y a de la violence, mais tellement outrancière que même les spectateurs les plus chevronnés risquent d’avoir des hauts le cœur – on pense au sort atroce réservé à la prostituée, découpée consciencieusement à coups de rasoir. Lucio Fulci donne donc au spectateur ce qu’il est venu voir, mais sans rien édulcorer.

Malheureusement, tout n’est pas réussi dans L’éventreur de New York, loin de là. Tout d’abord, l’intrigue policière comporte de nombreux trous qui ne sont jamais comblés et la résolution n’est guère convaincante. Ensuite, le réalisateur a pris le parti d’affubler son tueur d’une voix de canard ridicule. Certes, elle est là avant tout pour créer un décalage, mais elle ruine aussi plusieurs scènes par un comique involontaire. Enfin, la musique pop jazzy de Francesco De Masi n’est pas la plus belle partition de son auteur. Si l’on apprécie quelques passages où des distorsions créent une ambiance torve, elle paraît parfois en décalage avec les images.

Un spectacle qui a subi la censure et de lourdes interdictions

Enfin, alors que le réalisateur est capable de tourner de vraies scènes de suspense, toutes fortement teintées de sadisme, il se laisse trop souvent aller à la facilité, au nom d’une efficacité immédiate. On peut trouver au final ce film assez grossier, parfois franchement vulgaire. Il s’agit en tout état de cause d’un vrai bras d’honneur au bon goût. Bizarrement, c’est aussi ce caractère outrancier qui en fait la saveur, car le spectacle n’est jamais fade ou lisse, mais bien porté par une vision terriblement pessimiste de l’être humain.

Censuré un peu partout dans le monde, L’éventreur de New York est sorti en France avec une lourde interdiction aux moins de 18 ans. Il a ainsi attiré en salles 188 971 curieux, avant de connaître une belle carrière en VHS. Le film est récemment ressorti dans un Mediabook de toute beauté chez The Ecstasy of Films. Non seulement la copie est belle, non coupée et non recadrée, mais le Mediabook propose un livret très éclairant de Lionel Grenier et Alain Petit.

Attention, Mediabook à saisir d’urgence !

Ce fut l’occasion pour l’auteur de ces lignes de redécouvrir un film qu’il avait toujours considéré comme médiocre à cause d’une VHS à l’image pisseuse, proprement indigne. En tout état de cause, L’éventreur de New York reste un film inégal, mais porté par des fulgurances qui allaient peu à peu disparaître du cinéma de Fulci. Il s’agit assurément d’un spectacle à réserver à un public très averti.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 4 mai 1983

Acheter le Mediabook sur le site du distributeur

Le giallo sur CinéDweller

L'éventreur de New York, l'affiche française

© 1982 Surf Film / Affiche : Promo 505 (agence). Tous droits réservés.

Box-office :

L’éventreur de New-York sort en France le 4 mai 1983 et entre en 14e position avec 20 295 fans du cinéma glauque de Lucio Fulci. Le polar urbain ultra gore, succède parmi les nouveautés à Ténèbres, giallo par un autre maître (Argento), qui avait pu compter sur 26 084 clients la semaine passée.

En 2e semaine, L’éventreur terrorisait 12 855 spectateurs pour une petite 17e place. Une série Z italienne de très mauvais goût, signée Bruno Mattei, Pénitencier de femmes, lui faisait de la concurrence, avec 25 375 adeptes du WIP flick (Woman In Prison).

Désormais réduit à 5 écrans, le film tordu de maître Fulci commence une inéluctable chute vers l’anonymat, avec 5 338 entrées en 3e semaine.

Lucio Fulci perd évidemment davantage de fauteuils en semaine 4 et voit son massacre new-yorkais réduit à 2 écrans et 1 436 clients. Pour son 5e tour en salle, la Maxéville sur les Grands Boulevards en tire encore 828 curieux (40 753), puis 883 spectateurs en 6e semaine. Pour parachever son exploitation parisienne, le distributeur SN Prodis traverse le boulevard pour placer le film en face de la Maxéville, aux Arcades. Le film observe 545 amateurs de polars glauques pour un total de 42 381 spectateurs.

La province répondra plus favorablement au film, avec une belle tournée des plages durant l’été 1983.

Frédéric Mignard

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L'éventreur de New York, l'affiche française

Bande-annonce de L'éventreur de New York (VA)

Thriller, Giallo, Epouvante-horreur, Gore

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