Le monde après nous, par le créateur de Mr. Robot, est un thriller plus longuet que malin qui distille néanmoins une atmosphère paranoïaque du meilleur effet.
Synopsis : Des vacances familiales sont interrompues par l’arrivée en pleine nuit de deux inconnus cherchant à se protéger d’une cyberattaque. Tandis que la menace se rapproche, chacun tente de défendre sa place dans un monde qui s’écroule.
Barack Obama présente…
Critique : Produit notamment par Julia Roberts et le couple présidentiel Michelle et Barack Obama, ces deux derniers en qualité de producteurs exécutifs via leur société Higher Ground créée en 2018, Le monde après nous est l’adaptation du roman de Rumaan Alam, publié en 2020. L’ancien président démocrate lui en avait fait une belle publicité, le classant parmi ses ouvrages préférés durant cette période covidée où le complotisme prospérait.
Une nouvelle plongée dans l’univers paranoïaque du créateur de Mr. Robot
A peine un an plus tard, Hollywood s’empare du best-seller. Le créateur de Mr. Robot, Sam Esmail, y retrouve tous les thèmes qui ont fait le triomphe de sa série en 4 saisons, notamment la paranoïa, la cybersécurité et un monde anxiogène qui échappe à ses habitants.Esmail s’engage immédiatement à réaliser le long ; Netflix le diffusera sur sa plateforme deux ans plus tard, avec une petite fenêtre en salle de 2-3 semaines aux USA.
Netflix s’offre un casting magnifique
Le casting est magnétique. Julia Roberts qui connaît bien le réalisateur pour avoir joué dans plusieurs séries qu’il a produites ou réalisées, notamment Homecoming (2018), mais aussi Gaslit (2022), est rejointe par Ethan Hawke, pour une rencontre cinématographique inédite dans leur longue carrière réciproque (ils ont plus ou moins démarré à la même époque), mais aussi par le doublement oscarisé Mahershala Ali et la caution jeune pour le public de Netflix qu’apporte Myha’la Herrold. La jeune femme de 27 ans interprète à l’écran la fille d’Ali quand, dans le roman, on évoque l’épouse de l’homme, financier afro-américain, à la vie aussi riche qu’austère, dans sa maison de glace, isolée du monde des petites gens.
Dans cette Amérique des classes sociales qui cohabitent, deux familles aux backgrounds sociaux différents, vont coexister au sein d’une demeure de splendeur, pendant cet effondrement en bonne et due forme de la civilisation, symbolisée aussi par l’abandon sur une route d’une latina en détresse, rare personnage à croiser le chemin des protagonistes, et qui sera honteusement éconduite malgré son désespoir accablant.
Une exclusivité Netflix réussie
Plutôt bien reçu par la presse et le public nord-américain pour une exclusivité Netflix, Le monde après nous compte parmi les vrais films de cinéma que propose la plateforme, avec une ambiance domestique glaciale et carrée qui n’a rien à envier à l’architecture élaborée du premier long d’Ari Aster, Hérédité, dont on retrouve les fondations visuelles, chics et fascinantes, même si le scénario, lui, ressemble davantage aux aspects surnaturels et parano du cinéma de Shyamalan.
Le monde après nous met en scène la menace fantôme
Beau, mais lent, le pensum de science-fiction sur fond de cyberattaque et d’hacking d’une Amérique grillée via ses propres avancées technologiques par une menace invisible mais omniprésente, venue a priori de l’étranger, est aussi une œuvre de 2h20. Avec beaucoup de dialogues et peu de scènes rythmées (un pétrolier qui fonce sur la plage, un carambolage percutant de Tesla, des cerfs qui assaillissent la demeure high-tech du financier…), Le monde après nous est surtout une œuvre d’ambiance et de dialogues. L’acteur se pare d’un statut d’échantillon d’un monde qui s’écroule en laissant à chacun le temps de ramasser ses morceaux, à l’écart d’une civilisation que l’on annonce annihilée (New York) ou en proie au complotisme (le rôle de l’internet au tout début, mais aussi le personnage joué par un Kevin Bacon à contre-emploi).
Comme un air de sitcom sans Amis
Dans ce monde où l’isolement devient létal et où la solitude de l’homme à la veille de sa disparition programmée est celle d’une humanité sans amis, l’ironie récurrente autour de la série Friends est glaçante, jusqu’à clore le film de façon radicale et métaphorique, au risque de déstabiliser un public qui a besoin d’un minimum d’explications. Mais comme Sam Esmail qui a collaboré sur le scénario avec le romancier, en est conscient, dans le monde du savoir numérique omnipotent, l’ignorance est devenue la vraie menace. Autant faire exploser cette menace au nez des spectateurs qui sera aussi frustré qu’amer par cette expérience d’un cinéma paré de grandes intentions, mais qui laisse parfois le sentiment d’être inaboutie.
Biographie +
Sam Esmail, Julia Roberts, Mahershala Ali, Kevin Bacon, Ethan Hawke, Myha’la Herrold