Le gendarme de Saint-Tropez est une comédie ensoleillée typique des années 60. Elle bénéficie de l’abattage comique d’un Louis de Funès au meilleur de sa forme. Efficace.
Synopsis : Ludovic Cruchot, gendarme modèle, est nommé à la brigade de Saint-Tropez avec le grade de maréchal des logis. Ses manières brusques et ses méthodes autoritaires bousculent l’adjudant Gerber, habitué à une douce routine. Nicole Cruchot, la fille de Ludovic, s’adapte bien plus vite que son père : à peine arrivée, elle adopte les us et coutumes de la jeunesse locale. Elle s’invente un père millionnaire pour impressionner son soupirant, Jean-Luc. Cruchot, de son côté, ne faiblit pas. Il traque les nudistes avec une rare détermination.
De Funès explose dans un rôle prévu pour Darry Cowl
Critique : Second rôle magistral dans un nombre incalculable de petites comédies, Louis de Funès commence à connaître un certain succès grâce à deux films réalisés par Jean Girault. Il s’agit de Pouic-Pouic (1963) et Faites sauter la banque (1964). Pourtant, les producteurs sont encore frileux à l’idée d’engager le comique et lorsqu’ils envisagent de confier la réalisation du Gendarme de Saint-Tropez en ce début 1964 à Jean Girault, ils lui demandent de donner le rôle principal à Darry Cowl, avec qui il a déjà tourné plusieurs comédies. Comme ce dernier refuse, Girault réussit à imposer son poulain qui donnera alors la réplique à Pierre Mondy.
Toutefois, au dernier moment, Mondy se retire de la course et Michel Galabru est appelé en catastrophe pour lui succéder. Dès lors, le tournage se déroule sans grand problème durant le mois de juin 1964, avec la fine fleur du nouveau comique français dont Jean Lefebvre ou encore Christian Marin.
Un triomphe immédiat pour une comédie charmante
La suite est entrée à jamais dans l’histoire du box-office français puisque le long-métrage s’est imposé immédiatement comme le numéro 1 de l’année 1964 avec un cumul de 7,8 millions d’entrées lors de sa première exploitation. Alors que le budget était fort modeste, les producteurs ont effectué un bénéfice remarquable qui établit désormais tous les acteurs en tant que champions du box-office national.
Typique d’un certain humour franchouillard, Le gendarme de Saint-Tropez n’est assurément pas la comédie du siècle, notamment à cause d’un scénario plutôt léger qui collectionne les saynètes au lieu de chercher un véritable fil conducteur. Toutefois, reconnaissons l’efficacité de certains quiproquos et la puissance comique de certains gags. Il est indéniable que pareil script n’aurait guère fait de vagues sans le concours de comédiens qui s’en donnent à cœur joie dans l’abattage outrancier.
Des acteurs savoureux dans un grand bain sixties
De Funès en fait des tonnes en gendarme procédurier, obligé de contourner la loi pour réparer les erreurs de son adolescente de fille. Michel Galabru, absolument génial, lui donne la réplique avantageusement, tandis que les autres gendarmes imposent un ton primesautier qui explique l’extraordinaire force de sympathie de ce tout premier volet.
Baignant dans une insouciance sixties, Le gendarme de Saint-Tropez est aussi un témoignage direct de l’époque des yéyé, avec la confrontation entre une jeune génération avide de nouvelles sensations et la vieille garde de la France réac’. Quatre ans avant mai 68, les auteurs du Gendarme parviennent à réconcilier tout le monde puisque cette jeunesse rebelle n’est jamais bien méchante et les tenants de l’ordre ne sont pas si coincés qu’ils veulent bien le montrer. L’amusante chasse aux nudistes est en cela symptomatique de la lutte du pouvoir gaulliste face à l’arrivée de nouvelles mœurs incontrôlables.
Réalisée avec soin, mais sans aucun génie, cette toute première aventure de Cruchot mérite encore le détour grâce au charisme incroyable de de Funès. Elle fut suivie de cinq suites de plus en plus médiocres au fur et à mesure des numéros. Mais n’est-ce pas là la dure loi des séries ?
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Critique du film : Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 9 septembre 1964
© 1964 SNC – Franca Films / Illustration : Clément Hurel © ADAGP Paris, 2019. Tous droits réservés.