Le dernier testament est un magnifique téléfilm sur l’apocalypse nucléaire, finalement distribué en salles un peu partout dans le monde. Il le mérite amplement.

Synopsis : La famille Wetherly, Tom, Carol et leurs trois enfants, Mary Liz, Brad et Scottie, vivent paisiblement à Harlim, un petite village de Californie. Alors que Tom a dû s’absenter quelques jours pour son travail, le ciel s’embrase à la suite d’une explosion nucléaire et le petit village se retrouve isolé du reste du pays. Que s’est-il passé ? Le monde ne répond plus! La Troisième Guerre Mondiale a-t-elle éclaté ? Tout le village s’unit alors pour survivre, mais la radioactivité décime la population, un à un les gens tombent.

Le dernier testament, un téléfilm distribué en salles

Critique : En 1980, la romancière Carol Amen fait un cauchemar traitant de l’apocalypse nucléaire et décide de coucher sur le papier cette histoire. Elle en tire une nouvelle très sombre intitulée Testament qu’elle parvient à faire publier malgré de nombreux refus à cause de sa radicalité. Quelques années plus tard, alors que les tensions sont à nouveau très fortes entre les États-Unis et l’URSS, la thématique du danger atomique n’a jamais été aussi prégnante. Outre des films fantaisistes comme les post-apos inspirés de la saga Mad Max, plusieurs productions abordent le sujet de manière beaucoup plus réaliste. On citera entre autres Le syndrome chinois (Bridges, 1979), Le mystère Silkwood (Nichols, 1983), Wargames (Badham, 1983) et surtout Le jour d’après (Meyer, 1983) qui est également un téléfilm sorti au cinéma.

Effectivement, lorsque la documentariste Lynne Littman est engagée pour tourner ce qui deviendra Le dernier testament (1983), elle est chargée de livrer en 28 jours un simple téléfilm dans le cadre de la série American Playhouse. Toutefois, face à l’extrême qualité du produit fini, le studio Paramount a décidé de distribuer le long-métrage en salles un peu partout dans le monde, tout comme Le jour d’après. Il faut dire que Le dernier testament est effectivement une œuvre puissante qui méritait bien une exposition en salles, ainsi que dans des festivals.

Le choix du réalisme documentaire

Le long-métrage commence par nous présenter une petite famille américaine typique, avec son couple uni et leurs trois enfants – deux garçons et une fille – qui appartiennent à la middle class. La petite ville fictive dans laquelle ils habitent correspond également au cliché de ces banlieues pavillonnaires d’une affligeante banalité. Sur le plan formel, Lynne Littman ne cherche aucunement les effets et livre une réalisation classique, mais attentive à ses acteurs. Après nous avoir présenté les différents personnages, elle nous précipite au cœur de son intrigue par une apocalypse nucléaire tout ce qu’il y a de plus réaliste et anti spectaculaire. Le seul effet qui indique le déclenchement des bombes vient d’un éclairage vif et quasiment surnaturel.

© 1983 Paramount Pictures

Dès lors, comme autrefois George A. Romero dans ses films d’horreur et d’anticipation comme La nuit des morts vivants (1968) ou encore La nuit des fous vivants (1973), Lynne Littman utilise un style documentaire apparemment détaché pour nous conter la lutte d’une mère de famille courageuse pour maintenir sa petite famille intacte. Au lieu de filmer des scènes de panique – qui ne correspondaient pas au faible budget alloué – la réalisatrice préfère se concentrer sur la lente dégradation de la situation, à mesure que la contamination touche les survivants. Elle insiste sur les pénuries de carburants, d’électricité et de nourriture, ainsi que la volonté de communiquer avec l’extérieur, mais opte pour une vision moins négative de l’humanité en insistant sur la solidarité qui peut se tisser au cœur de la petite communauté où tout le monde se connaît.

Un film à l’atmosphère pesante et à la tonalité sombre

Toutefois, Lynne Littman marque des points en n’évacuant pas la noirceur du propos de la nouvelle. Ainsi, les principales victimes des radiations sont les enfants et les nourrissons, ce qui donne au film une atmosphère lourde et pesante. Échappant au piège du mélodrame et du pathos, Lynne Littman parvient à émouvoir profondément par l’humanité de son regard sur cette famille que l’on apprécie et qui disparaît petit à petit sous nos yeux impuissants.

L’ensemble est d’autant plus fort qu’il est porté par d’excellents acteurs. On adore notamment la prestation de Jane Alexander qui a d’ailleurs reçu une nomination à l’Oscar de la meilleure actrice pour ce rôle majeur. Elle compose une figure de mère courage toujours digne et forte malgré les doutes. Face à elle, le jeune casting est formidable.

Un casting trois étoiles

Rossie Harris fait un préadolescent terriblement attachant, la jeune Roxana Zal est également très à son aise, tandis que le petit Lukas Haas est une véritable révélation – il sera ensuite le témoin du meurtre dans le fameux Witness de Peter Weir avec Harrison Ford en 1985. Les trois enfants sont exceptionnels de justesse, mais on apprécie aussi les personnages plus secondaires campés avec autorité par des pointures comme Leon Ames ou encore Mako. On notera enfin que Lynn Littman a eu une belle intuition en confiant le rôle du couple dont le bébé meurt à des futures stars comme Kevin Costner et Rebecca De Mornay.

Si le long-métrage n’a pas été un énorme succès en salles, il a toutefois rapporté davantage d’argent que s’il avait été diffusé uniquement à la télévision. En France, Le dernier testament a été sélectionné en compétition au Festival d’Avoriaz en 1984 où il n’a glané aucun prix puisque Dead Zone (Cronenberg) a raflé la plupart des récompenses. Cela a permis au film d’être distribué au mois de juin dans un circuit réduit. Au total, Le dernier testament a intéressé 9 414 spectateurs français, dont 3 989 Franciliens.

Par la suite, Le dernier testament est sorti en VHS chez CIC Vidéo, avant de disparaître totalement de la circulation, malgré son excellente réputation. Si un DVD a été édité à l’étranger, il n’en existe pas en France où le long-métrage a toutefois fait son apparition sur Paramount Channel au cœur du bouquet Canal + pendant plusieurs mois.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 13 juin 1984

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© 1983 Paramount Pictures / Affiche : Guy Bourduge – Guy Jouineau. Tous droits réservés.