La fleur du mal : la critique du film (2003)

Drame, Thriller | 1h44min
Note de la rédaction :
7/10
7
La fleur du mal, l'affiche

  • Réalisateur : Claude Chabrol
  • Acteurs : Benoît Magimel, Nathalie Baye, Mélanie Doutey, Suzanne Flon, Bernard Le Coq, François Maistre, Thomas Chabrol
  • Date de sortie: 19 Fév 2003
  • Nationalité : Français
  • Titre original : La fleur du mal
  • Titres alternatifs : The Flower of Evil (titre international) / La flor del mal (Espagne) / Kwiaty zła (Pologne) / Il fiore del male (Italie) / A romlás virága (Hongrie) / Die Blume des Bösen (Allemagne)
  • Année de production : 2002
  • Scénaristes : Caroline Eliacheff et Louise L. Lambrichs. Adaptation et dialogues de Claude Chabrol
  • Directeur de la photographie : Eduardo Serra
  • Compositeur : Matthieu Chabrol
  • Société(s) de production : MK2 Productions, France 3 Cinéma
  • Distributeur : MK2 Diffusion
  • Distributeur (reprise) : Carlotta Films
  • Date de reprise : 29 septembre 2021
  • Éditeur(s) vidéo : MK2 (DVD, 2008) / Carlotta (DVD et blu-ray, 2021)
  • Date de sortie vidéo : 1er mars 2008 (DVD) / 7 avril 2021 (DVD et blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 1 080 105 entrées / 256 344 entrées
  • Box-office nord-américain : 182 163 $
  • Budget : 7,4 M d’euros
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.66: 1 / Couleurs / Son : Dolby Digital
  • Festivals et récompenses : Festival de Berlin 2003 : sélection officielle en compétition / Goya 2004 : 1 nomination en tant que Meilleur film européen.
  • Illustrateur / Création graphique : Serge Lavayssière (photographe), Jérémie Nassif (photographe), Véronique Amiot (affichiste) (Affiche 2003) / Akiko Stehrenberger (Affiche reprise et DVD 2021)
  • Crédits : MK2 Productions, France 3 Cinéma
Note des spectateurs :

La fleur du mal est un bon cru pour Claude Chabrol qui s’en prend une fois de plus à la bourgeoisie provinciale, avec un humour caustique ravageur. Le film vaut également pour l’interprétation remarquable de la grande Suzanne Flon.

Synopsis : A la fin de la Deuxième Guerre mondiale, dans l’atmosphère délétère des règlements de compte liés à la collaboration, une femme est acquittée d’un crime qu’elle aurait peut-être commis. De nos jours, pendant les dernières élections municipales, un tract anonyme adressé à ses descendants vient faire ressurgir ce trouble passé…

Chabrol s’en prend à nouveau à la bourgeoisie provinciale

Critique : Au début des années 2000, Claude Chabrol retrouve une fois de plus sa coscénariste Caroline Eliacheff, avec qui il a déjà collaboré pour deux films majeurs au sein de sa filmographie, les excellents La cérémonie (1995) et Merci pour le chocolat (2000). Les deux complices, ici aidés par Louise L. Lambrichs continuent à décortiquer la mentalité de la grande bourgeoisie provinciale avec cette Fleur du mal (2003) qui fait moins appel au genre du thriller et se concentre davantage sur l’analyse sociologique.

Dès le plan d’ouverture qui est purement programmatique, la caméra subjective part de derrière un buisson du jardin, puis pénètre dans la grande demeure bourgeoise, se rend jusqu’aux chambres et vient révéler le cadavre d’un homme. Non contente d’offrir un plan-séquence virtuose, cette ouverture résume à elle seule le propos du film. Il s’agira ici de violer l’espace intime d’une famille bordelaise pour venir déterrer les cadavres enfouis dans les placards. Ce préliminaire permet également de préparer le spectateur à un drame à venir, et ainsi de le faire patienter pendant plus d’une heure avant que celui-ci n’intervienne vraiment.

La fleur du mal débusque avec délectation les secrets familiaux enfouis

Dans l’intervalle, le réalisateur se fait une nouvelle fois plaisir dans la description très ironique d’une famille marquée par la consanguinité (on se marie entre gens de la même caste, sans tenir compte de l’éloignement généalogique). En témoigne le jeune couple formé par Benoît Magimel – alors en pleine ascension – et la toute jeune Mélanie Doutey – au début de sa filmographie entamée en 1999 – dont l’amour s’embarrasse peu du fait qu’ils sont cousins, et même potentiellement frères et sœurs. Même le drame initial qui se joue durant l’Occupation est lié à un amour entre une sœur et son frère, dont on soupçonne le caractère incestueux.

Dans sa volonté de flinguer la bourgeoisie provinciale qu’il exècre, Claude Chabrol dégaine les vieilles rancœurs envers d’anciens collaborateurs du régime nazi, cible les comportements hypocrites avec une délectation toujours renouvelée, tout en assassinant la gente masculine qui se comporte de manière odieuse avec les femmes. Il prend également plaisir à confronter cet univers en vase clos avec le petit peuple, lors d’une visite jubilatoire de la bourgeoise en campagne pour les municipales dans une HLM. Les habitants y font preuve d’une médiocrité qui heurte la dame en tailleur et au menton haut. On retrouve là le côté caustique d’un cinéaste qui n’a jamais épargné la populace, toujours prête à se jeter dans les bras des populistes et des extrêmes.

Une œuvre feutrée qui préfère le poison lent

Loin de n’être qu’un simple thriller, La fleur du mal est donc avant tout une description au vitriol d’une France de plus en plus coupée de ses élites et de mondes trop différents qui ne se côtoient plus. L’analyse est fort pertinente et s’appuie sur un scénario particulièrement bien huilé, abandonnant tout effet de sensationnalisme au service d’une idée brillamment illustrée. Cela débouche sur une œuvre moins immédiatement séduisante que La cérémonie ou Merci pour le chocolat, car dépourvue du moindre effet. Cela ne lui retire pourtant pas de son intérêt, pour peu que l’on fasse l’effort de suivre une intrigue très lente, uniquement basée sur la psychologie des différents protagonistes.

La fleur du mal, la jaquette

© 2003 MK2 Productions – France 3 Cinéma / Visuel jaquette : Akiko Stehrenberger. Tous droits réservés.

On peut sans doute regretter l’absence au générique d’Isabelle Huppert qui donnait tout son sel aux œuvres précédemment citées. Pour autant, Nathalie Baye s’acquitte avec bonheur de sa tâche. Elle est bien secondée par un Benoît Magimel très juste, soutenu par la frêle Mélanie Doutey. Dans le rôle du mâle alpha dominateur et prédateur sexuel, Bernard Le Coq est tout bonnement parfait d’obséquiosité. Mais la grande gagnante de La fleur du mal est assurément la grande Suzanne Flon, dont ce fut l’un des derniers rôles, deux ans avant de nous quitter. Elle bénéficie du personnage le plus intéressant et qui se révèle dans toute sa dimension tragique dans les dernières séquences.

Sans doute moins séduisant que ses précédentes réalisations de la fin des années 90, La fleur du mal reste un bon cru pour le très prolifique Claude Chabrol qui allait encore nous livrer quatre autres films inégaux avant de décéder.

Un joli succès, de retour sur les écrans en 2021

Sorti le 19 février 2003, soit une semaine sans grande concurrence, La fleur du mal s’est imposé à Paris avec 119 301 Franciliens dans les salles. Le film vénéneux a encore séduit 66 653 Parisiens en deuxième semaine, puis chute rapidement à 35 749 baudelairiens en troisième septaine. Le métrage aligne encore 23 420 retardataires, puis s’effondre à 6 137 en semaine 5. La fleur du mal a réuni au final 256 344 Franciliens.

La province a mieux accueilli la proposition de Claude Chabrol. Ainsi, La fleur du mal fait une très bonne première semaine à 445 798 curieux. Après cet excellent démarrage, le distributeur augmente le nombre de salles et le film peut se maintenir à 303 915 clients. En deux semaines, La fleur du mal atteint quasiment les scores des films précédents du cinéaste sur toute leur carrière. Cependant, là aussi la chute est assez radicale avec 143 521 retardataires en troisième semaine. Au bout d’un mois, le film tutoie le million d’entrées et finira sa carrière 1 080 105 tickets vendus. Preuve que le grand public n’a pas totalement adhéré à un long-métrage qui peut effectivement paraître frustrant de prime abord.

Depuis, le métrage a été édité plusieurs fois en DVD et récemment en blu-ray et il est proposé sur la plateforme Netflix dans les pays étrangers. Parallèlement, il a fait l’objet d’une restauration en 4K et a été repris en salles dans ce format en septembre 2021. L’occasion de rendre enfin hommage à un cinéaste essentiel qui nous manque cruellement.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 19 février 2003

Acheter le film en blu-ray sur le site de l’éditeur

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La fleur du mal, l'affiche

© 2003 MK2 Productions – France 3 Cinéma / Affiche : Serge Lavayssière (photographe)
– Jérémie Nassif (photographe)
– Véronique Amiot (affichiste). Tous droits réservés.

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Claude Chabrol, Benoît Magimel, Nathalie Baye, Mélanie Doutey, Suzanne Flon, Bernard Le Coq, François Maistre, Thomas Chabrol

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La fleur du mal, l'affiche

Bande-annonce de La fleur du mal

Drame, Thriller

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