Joyeux Noël est une œuvre ambitieuse mais ratée en raison de son trop-plein de bons sentiments. Guillaume Canet au plus bas.
Synopsis : Lorsque la guerre surgit au creux de l’été 1914, elle surprend et emporte dans son tourbillon des millions d’hommes qui se retrouvent sans comprendre dans l’enfer des combats. Quelques mois plus tard, à la vieille de Noël, dans des tranchées du nord de la France, Écossais, Français et Allemands décident d’une trêve pour célébrer les fêtes ensemble.
Une nomination aux Oscars qui passent mal
Critique : Le choix de Joyeux Noël pour représenter la France dans la catégorie du meilleur film étranger aux Oscars 2006 a provoqué une micro polémique. Tout film concourant dans cette catégorie doit effectivement être distribué dans son pays d’origine avant le 30 septembre de l’année précédant la cérémonie, or Joyeux Noël n’est sorti que le 9 novembre 2005.
Persuadé du potentiel américain du film, le distributeur UGC, qui lui a octroyé l’estampille Coup de cœur du public UGC, a donc sorti ce film en exclusivité dans une salle de province à partir du 21 septembre dernier. Un manque de transparence qui en dit long sur les ambitions énormes nourries autour du second métrage de Christian Carion qui, après Une hirondelle a fait le printemps, réalise là un film à formules où humanisme rime avec opportunisme.
Effectivement, on a bien du mal à croire à la sincérité du projet tant ici chaque angle du scénario semble refléter les succès nationaux et internationaux de son premier long-métrage et des Choristes. Joyeux Noël se veut une œuvre fédératrice et consensuelle dont l’ambition numéro un est d’émouvoir le public le plus large possible, aux quatre coins du monde, sur un thème universel douloureux, celui de l’absurdité de la guerre. Pour cela, le film renâcle à donner dans l’action, préférant la voie royale de l’émotion par le dialogue, voire le chant, y compris religieux.
Guerre et paix et bons sentiments
Bref, Joyeux Noël donne au public l’impression gratifiante de découvrir un film d’auteur sans trop s’ennuyer. Une formule judicieuse que l’on qualifiera d’académique, pour conquérir les habitants du village global. Par ailleurs, le caractère polyglotte de cette production dans laquelle le français n’est qu’une langue parmi les autres est une idée formidable. Il efface presque la nationalité de l’œuvre qui en devient un objet européen non identifié plus accessible pour le marché étranger.
Au final, tous ces procédés servent une production écœurante de bons sentiments, avec son lot de sacrifices, sa quête naïve pour la paix et sa générosité chrétienne. En ce début de siècle paranoïaque post 11 septembre, beaucoup ont été émus par son message (voir les notes élévées sur IMDB et les nominations aux Oscars ou BAFTA), d’autres au contraire se sentiront floués par ce racolage éhonté.
Box-office de Joyeux Noël
Pour ses producteurs, dont le puissant Christophe Rossignon (L’odeur de la Papaye verten La haine, Une hirondelle a fait le printemps, Irréversible…), Joyeux Noël s’annonçait comme un hit lacrymal pour la fin d’année 2005. Le film se devait de rester en haut de l’affiche au moins jusqu’aux fêtes, pour apaiser les esprits et les portefeuilles. Cela sera le cas, mais les entrées françaises (plus de 2 millions d’entrées pour un budget de 18M d’euros) ont démontré les limites de l’engouement hexagonal quand Pathé et Les Choristes recueillaient 8 500 000 entrées un an auparavant.
Avec 1 133 000 euros, les recettes allemandes furent aussi mitigées malgré la présence de la star teutonne Benno Fürmann. Les Américains, poussés par une superbe campagne de la part de Sony Pictures Classics, déboursèrent tout de même 1 million de dollars et se positionnèrent en 3e place du marché mondial. Ailleurs, Joyeux Noël fait au mieux de la figuration, avec 500 000 dollars en Espagne ou 100 000 au Royaume-Uni.