Du haut de la terrasse : la critique du film (1960)

Drame | 2h29min
Note de la rédaction :
6,5/10
6,5
Du haut de la terrasse, l'affiche

  • Réalisateur : Mark Robson
  • Acteurs : Paul Newman, Myrna Loy, Joanne Woodward, Ina Balin, Leon Ames, Felix Aylmer
  • Date de sortie: 21 Oct 1960
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : From the Terrace
  • Titres alternatifs : Von der Terrasse (Allemagne) / Desde la terraza (Espagne) / Do Alto do Terraço (Portugal) / Dalla terrazza (Italie) / Paixões Desenfreadas (Brésil)
  • Année de production : 1960
  • Scénariste(s) : Ernest Lehman d'après un roman de John O'Hara
  • Directeur de la photographie : Leo Tover
  • Compositeur : Elmer Bernstein
  • Société(s) de production : Linebrook
  • Distributeur (1ère sortie) : 20th Century Fox
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : ESC Editions (DVD, 2017 / Blu-ray, 2018)
  • Date de sortie vidéo : 18 septembre 2018 (blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 298 970 entrées (France) / 84 523 entrées (Paris)
  • Box-office nord-américain : 11,3 M$ / 193 142 865$ (résultats ajustés au cours du dollars en 2019)
  • Budget : 3 M$
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : 4-Track Stereo
  • Festivals et récompenses : Golden Globes 1961 : Meilleur espoir féminin pour Ina Balin
  • Illustrateur / Création graphique : Georges Kerfyser
  • Crédits : © 1960 Renewed © 1988 Twentieth Century Fox Film Corporation and Linebrook Productions Inc.
Note des spectateurs :

A la lisière du soap et du mélodrame, Du haut de la terrasse est désormais un témoignage formidable sur la société américaine des années 50, ainsi que les dérives du capitalisme et du puritanisme. Newman et Woodward y sont formidables.

Synopsis : Après la guerre, Alfred Eaton rentre chez lui en Pennsylvanie. Agacé par son père, ne supportant pas l’alcoolisme de sa mère, il part pour New York où il espère prendre une revanche sur la vie. Il se lance dans les affaires et fait la connaissance de la très riche Mary St-John. Ils se marient, et cette union propulse Alfred en haut de l’échelle sociale. Mais le jeune homme est-il prêt à tout sacrifier à sa réussite ?

Un soap pour Paul Newman

Critique : Star montante de la fin des années 50, l’acteur Paul Newman vient de rompre le contrat qui le liait à la Warner afin de retrouver son indépendance. Toutefois, cette rupture lui a coûté cher et il doit donc travailler double au début des années 60. Le soir, il interprète sur scène la pièce Doux oiseau de jeunesse de Tennessee Williams et la journée, il accepte de jouer dans Du haut de la terrasse (Robson, 1960) qui est donc de l’ordre du film alimentaire. Il en profite également pour imposer son épouse Joanne Woodward dans le rôle féminin principal.

Du haut de la terrasse, jaquette blu-ray

© 1960 Renewed © 1988 Twentieth Century Fox Film Corporation and Linebrook Productions Inc. / © 2018 ESC Editions. Tous droits réservés.

Tiré d’un best-seller de John O’Hara, auteur populaire aux États-Unis mais non traduit chez nous, Du haut de la terrasse peut s’apparenter à une saga familiale qui verserait dans le soap mélodramatique. Ainsi, dans la description de ses personnages, on songe parfois aux futures séries Dallas ou Dynastie. Toutefois, cet aspect quelque peu mécanique d’une histoire tissée avec des câbles a été en grande partie nuancée par le traitement plus intéressant effectué par le scénariste Ernest Lehman et le réalisateur Mark Robson.

Derrière le mélodrame, une vraie critique sociale

Effectivement, là où la plupart des personnages secondaires peuvent paraître unidimensionnels (le père autoritaire, la mère alcoolique, la femme vénale, l’amant profiteur etc…), le film gagne en profondeur lorsqu’il aborde celui plus ambigu incarné par Paul Newman. Mais surtout, Lehman et Robson ont ajouté à cette intrigue de mélodrame très classique une bonne dose de critique sociale. Rappelons d’ailleurs que ces préoccupations sociales étaient déjà au cœur de tous les premiers films de Mark Robson, y compris ses séries B des années 40.

Si les premières vingt minutes du film semblent se conformer à une thématique très en vogue à l’époque, à savoir l’affrontement entre un fils incompris et son père trop autoritaire (La fureur de vivre est passée par-là), la suite viendra contredire cette première impression. Alors que les premières passes d’armes verbales peuvent faire songer à du Tennessee Williams, le reste de l’œuvre n’atteindra jamais le degré de complexité de la prose du génial dramaturge.

L’emprise de l’entreprise paternaliste aux Etats-Unis

Au contraire même, le personnage incarné avec force par Paul Newman va, en cherchant à obtenir son indépendance, s’enfermer dans un modèle de société patriarcal qui le ramène toujours à sa condition première. Peu à peu, le personnage finit par reproduire le comportement et la vie de son propre père, pourtant rejeté en apparence. Il lui faudra le film entier pour enfin se trouver lui-même et s’affranchir de son géniteur.

Du haut de la terrasse, et les films Fox de 1961

© 1960 Renewed © 1988 Twentieth Century Fox Film Corporation and Linebrook Productions Inc.

Toutefois, ce n’est pas tant cet aspect du film qui est intéressant. Au passage, les auteurs en profitent pour analyser le poids de l’entreprise capitaliste sur l’Amérique des années 50. Ils critiquent notamment l’influence de ces grands capitaines d’industrie qui dirigent leurs affaires, mais aussi la vie privée de leurs salariés. Ainsi, le divorce n’est pas accepté par l’employeur car cela risque de nuire à la réputation de l’entreprise. Le long-métrage décrit également par le menu une société compartimentée sur le plan social. Les plus fortunés regardent de haut les nouveaux riches, et ceux-ci méprisent les classes moyennes, et ainsi de suite.

L’analyse d’une société compartimentée et normée à l’excès

Du haut de la terrasse – titre à la symbolique sociale évidente – analyse donc ce mépris de classe avec beaucoup d’acuité et confirme l’essor d’une société américaine conforme au modèle de l’American way of life. Dès lors, la population se divise en deux parties, les winners et les losers. En suivant la voie de la réussite, le personnage de Paul Newman peut ainsi découvrir ce que dissimule cette société entièrement fondée sur les apparences et la bienséance.

Le meilleur exemple vient de sa relation avec sa femme, excellente Joanne Woodward, qui aime vraiment son époux mais qui, délaissée sexuellement, va se jeter dans les bras de son ancien amant. Il est d’ailleurs important de noter une petite nouveauté puisque le film évoque à plusieurs reprises – de manière indirecte, époque oblige – la sexualité féminine et le droit pour les épouses d’être satisfaites par leur conjoint. Habituellement, la situation était inverse, l’épouse devant satisfaire tous les besoins de son mari. Il s’agit donc là d’un petit élément de modernité non négligeable.

Un film trop long, mais qui bénéficie d’une interprétation de haute volée

Réalisé de manière assez classique par Mark Robson – qui s’offre quelques fulgurances, notamment en matière d’ellipses narratives – et un peu noyé dans la musique guimauve d’Elmer Bernstein, Du haut de la terrasse (1960) est sans aucun doute trop long (2h30 quand même !) pour ce qu’il a à raconter, mais il s’appuie sur des acteurs formidables. On adore notamment la mère alcoolique interprétée par Myrna Loy (elle disparaît trop vite, malheureusement), mais aussi Leon Ames en père odieux (ce qui est un contre-emploi pour cet acteur qui incarnait toujours les bons patriarches). Mais c’est assurément le duo formé par Newman et Woodward qui emporte l’adhésion. Il fallait d’ailleurs oser jouer un couple dysfonctionnel à l’écran quand on est également lié à la ville.

Passé plutôt inaperçu en France, Du haut de la terrasse fait partie de la catégorie des films à Oscars qui n’ont même pas reçu de nominations. Seule l’actrice Ina Balin a eu le droit à un Golden Globes du meilleur espoir féminin pour sa prestation, et ceci malgré un rôle assez fade de jeune fille bien sous tous rapports qui apparaît seulement au bout d’1h30 de métrage.

Aujourd’hui largement oublié, Du haut de la terrasse n’est certes pas un grand film, mais il constitue un témoignage sociologique et historique de premier ordre sur la société américaine des années 50.

Critique de Virgile Dumez

Sortie salle française :

Le saviez-vous? La Fox a pu trouver en première exclusivité pas moins de 4 écrans pour le lancement Du haut de la terrasse, la semaine du 19 octobre. C’est ainsi que les Parisiens ont pu découvrir Paul Newman au Biarritz, à la Rotonde, à La Royale et au Moulin Rouge. Le film affrontait Le gigolo de Jacques Deray, avec Jean-Claude Brialy, Alida Valli et Valérie Lagrange. Le film d’épouvante bis La fille de Frankenstein s’assurait une présence sur deux écrans. Du côté du cinéma de guerre américain, Les marines attaquent était la sortie Columbia du moment. Le très honnête film de Hall Bartlett (La cage aux femmes, Jonathan Livingstone le Goéland) mettait en scène Alan Ladd et Sidney Poitier.

Si Du haut de la terrasse n’a pas percuté le box-office hexagonal avec un peu moins de 300 000 entrées France, il demeure l’un des plus gros succès de Paul Newman aux Etats-Unis d’Amérique et au Canada, avec 193 000 000 $ (recettes ajustées au cours de la devise en 2019), soit le 7e plus gros hit de l’acteur en termes de recettes, si l’on écarte la participation vocale de Paul Newman au casting de Cars de Pixar en 2006.

Aux USA, en 1960, Du haut de la terrasse finira en 12e position annuelle, loin derrière Exodus, avec le même Paul Newman qui avait engrangé 309 000 000$ (recettes ajustées) pour un budget légèrement supérieur (4M$).

Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 19 octobre 1960

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Du haut de la terrasse, l'affiche

© 1960 Renewed © 1988 Twentieth Century Fox Film Corporation and Linebrook Productions Inc. / Affiche : © Georges Kerfyser. Tous droits réservés.

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