Enième suite inutile d’une saga qui ne veut pas mourir, Creed III, la relève de Rocky Balboa est un épisode insipide qui ne laissera guère de trace dans les mémoires.
Synopsis : Idole de la boxe et entouré de sa famille, Adonis Creed n’a plus rien à prouver. Jusqu’au jour où son ami d’enfance, Damian, prodige de la boxe lui aussi, refait surface. A peine sorti de prison, Damian est prêt à tout pour monter sur le ring et reprendre ses droits. Adonis joue alors sa survie, face à un adversaire déterminé à l’anéantir.
Le premier Creed sans Sylvester Stallone
Critique : Après le succès rencontré par Creed II (Steven Caple Jr, 2018) qui, malgré sa médiocrité, a amassé plus de 214 millions de dollars dans le monde pour une mise de départ estimée à 50 millions de billets verts, la saga ne pouvait rester sans suite. Initialement développé par Sylvester Stallone, le troisième volet des aventures sportives d’Adonis Johnson, fils d’Apollo Creed, devait l’opposer au fils de Clubber Lang (Alias Mr T.), antagoniste de Rocky III (Sylvester Stallone, 1982). Mais finalement, cette idée est progressivement abandonnée et Sylvester Stallone est petit à petit débarqué du projet, à tel point qu’il refuse de reprendre les gants de Rocky Balboa.
Pour l’acteur Michael B. Jordan, Creed III, la relève de Rocky Balboa (2023) s’annonçait donc comme le long-métrage qui confirmait sa prise de pouvoir au sein d’une franchise longue de neuf films. Le comédien s’engage tellement dans la conception de cette suite que le producteur Irwin Winkler lui propose de passer également à la réalisation de ce troisième opus. Le comédien peut également compter sur le soutien de son ami, le réalisateur et producteur Ryan Coogler qui l’encourage à franchir le pas.
Des références multiples à Rocky III
Du projet initial de Stallone, Creed III garde l’empreinte lorsqu’il multiplie les références au script de Rocky III. Effectivement, si le personnage joué par Jonathan Majors n’est aucunement le fils de Clubber Lang, il en porte à la fois la rage et le style de boxe au bazooka. De plus, les péripéties du scénario font clairement penser à certains passages des films des années 80, notamment lorsque le héros doit faire face au décès de sa mère.
Malheureusement, le long-métrage souffre aussi des mêmes défauts que les suites maladroites et mécaniques des années 80. Ainsi, Creed III brandit la revanche sociale comme un argument de vente, mais dissimule mal l’embourgeoisement du personnage principal incarné sans plus-value par un Michael B. Jordan en mode automatique. Toutes les séquences qui se déroulent au sein de sa famille font pitié tant elles multiplient les clichés et l’absence d’enjeux réels. Le personnage de chanteuse jouée par Tessa Thompson est vidé de toute substance et ne sert plus que de faire-valoir pour la star masculine du film. L’actrice n’est pas en cause, mais son rôle est ici d’une fadeur extrême. Toutes ces séquences sont marquées du sceau de la mièvrerie, tandis que les liens entre le héros et sa mère ne bouleversent guère.
Jonathan Majors, un impressionnant antagoniste
Finalement, le seul véritable personnage intéressant est incarné par l’impressionnant Jonathan Majors que l’on avait déjà repéré positivement en Kang dans Ant-Man et la Guêpe : Quantumania (Peyton Reed, 2023). Son jeu à la fois très physique et intériorisé fait de lui un parfait antagoniste, avec du caractère et une vraie personnalité. Malheureusement, le happy end vient contredire les scènes précédentes et s’avère bien trop artificiel pour convaincre. Notons d’ailleurs que la carrière de Jonathan Majors vient de subir un sacré revers depuis que l’acteur a été condamné par la justice pour des violences conjugales.
Outre un certain manque d’originalité dans son scénario, Creed III manque également de personnalité par l’absence de prise de risque au niveau de sa réalisation. Ainsi, les scènes de combat sont tournées de manière trop ostensiblement rentre-dedans pour satisfaire les amateurs de boxe. On a parfois le sentiment d’assister à un match de catch tant les coups portés semblent excessifs. Dépourvues d’une réelle tension dramatique, ces séquences n’emportent donc pas totalement le spectateur, ce qui est un comble pour une œuvre sur un sport aussi cinématographique.
La France, troisième marché mondial de Creed III
Cette relative médiocrité du produit fini n’a pourtant pas empêché le long-métrage de s’imposer au box-office mondial avec 276 148 615 $ amassés. Rien qu’aux Etats-Unis, le métrage a glané 156 248 615 $, lui permettant de se hisser à la 16ème place du box-office annuel nord-américain.
En ce qui concerne l’international, la France a été le troisième marché le plus lucratif, derrière le Royaume-Uni et le Mexique. Ainsi, l’Hexagone a apporté 7,8 millions de dollars dans l’escarcelle des producteurs. Il faut dire que cette suite a débarqué en trombe en France dès son premier jour avec 241 000 entrées dans 587 salles, dont 55 906 lors d’avant-premières qui ont fait le plein. La banlieue lui a d’ailleurs fourni l’essentiel de son public, ce qui a parfois occasionné des problèmes dans les salles.
Des débordements dans les salles qui n’ont pas empêché le succès du film
Ainsi, durant l’exploitation du long-métrage, les forces de l’ordre ont parfois été sollicitées pour faire le ménage dans certains cinémas. Le cas le plus marquant est survenu au Megarama de Saint-Étienne où des débordements ont entrainé l’arrestation d’une vingtaine de spectateurs sur les 300 présents. On a assisté à d’autres échauffourées à l’étranger, et notamment à Zurich en Suisse. Cela a contraint certains exploitants à refuser de programmer ce gros succès.
Effectivement, au bout d’une semaine, Creed III a attiré 1 105 921 spectateurs français, ce qui en fait un vrai triomphe. Si la chute dépasse 50% en deuxième semaine, il n’a fallu au film qu’un seul mois pour dépasser les 2 millions de spectateurs. On notera toutefois que le métrage a beaucoup perdu de semaine en semaine, preuve d’un écho mitigé de la part des fans de la saga. A l’arrivée, Creed III, la relève de Rocky Balboa n’en demeure pas moins un très gros succès. Pour la France, il s’agit du plus gros score de la saga Creed et du troisième plus beau résultat de toute la franchise Rocky, derrière les indétrônables Rocky IV (1985) et Rocky III : l’œil du Tigre (1982). Pourtant, le film ne mérite vraiment pas un tel engouement.
Critique de Virgile Dumez
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Tessa Thompson, Michael B. Jordan, Florian Munteanu, Phylicia Rashad, Jonathan Majors
Mots clés
Franchise Creed, Franchise Rocky, La boxe au cinéma, Films sur le sport