Carambolages : la critique du film (1963)

Comédie policière | 1h28min
Note de la rédaction :
6/10
6
Carambolages, l'affiche

  • Réalisateur : Marcel Bluwal
  • Acteurs : Louis de Funès, Alain Delon, Michel Serrault, Jean-Claude Brialy, Jacques Dynam, Michel Modo, Sophie Daumier, Henri Virlojeux
  • Date de sortie: 17 Mai 1963
  • Nationalité : Français
  • Titre original : Carambolages
  • Titres alternatifs : Carom Shots (titre international) / Karambolage (Allemagne) / Med risk för livet (Suède) / La muerte juega a carambolas (Espagne) / O Senhor que se Segue (Portugal) / Karambole (Pologne) / Tre morti per Giulio (Italie) / Hogyan lettem vezérigazgató? (Hongrie) / Masser af lig (Danemark)
  • Année de production : 1963
  • Autres acteurs : Anne Tonietti, Alfred Adam, René Clermont, Jean Ozenne, Marcelle Arnold, Gilberte Géniat, Gisèle Grandpré
  • Scénaristes : Marcel Bluwal, Pierre Tchernia d'après Fred Kassak / Dialogue : Michel Audiard
  • Directeur de la photographie : André Bac
  • Compositeur : Gérard Calvi
  • Monteur : Geneviève Vaury
  • Producteurs : Alain Poiré, Jean Le Duc
  • Sociétés de production : Société Nouvelle des Établissements Gaumont, Trianon Production
  • Distributeur : Gaumont
  • Éditeurs vidéo : René Château Vidéo (VHS, 1991) / Gaumont (DVD, 2005 et 2008) / Gaumont (blu-ray, 2014)
  • Dates de sortie vidéo : 1991 (VHS) / 8 novembre 2005 (DVD) / 1er mars 2008 (DVD) / 3 septembre 2014 (blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 1 180 396 entrées / 264 094 entrées
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Budget : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.66 : 1 / Noir et Blanc / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : Festival de Cannes 1963 : en compétition
  • Illustrateur / Création graphique Charles Rau © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : Gaumont © Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Comédie satirique portée par les dialogues d’Audiard, Carambolages vaut aussi le détour pour la prestation de Louis de Funès et son portrait au vitriol d’une certaine France. Amusant.

Synopsis : Modeste employé d’une grosse entreprise, Paul Martin rêve d’une prodigieuse ascension sociale. L’âge de mise à la retraite des cadres étant repoussé, il accélère le processus de promotion et fomente les assassinats de tous ses supérieurs.

Carambolages, une comédie grinçante grâce aux dialogues de Michel Audiard

Critique : Homme de télévision, le réalisateur Marcel Bluwal signe un contrat avec la firme Gaumont pour la réalisation de plusieurs films au début des années 60. Il tourne ainsi le polar Le monte-charge (1962) avec Robert Hossein qui déplace tout de même 875 264 spectateurs. Certes, il ne s’agit pas d’un succès foudroyant, mais le cinéaste est tout de même conforté dans sa position auprès de la maison de production. Dès lors, on lui propose de réaliser une comédie centrée sur Jean-Claude Brialy qui venait de connaître le succès grâce aux œuvres de la Nouvelle Vague.

Bluwal tombe sous le charme du roman policier de Fred Kassak intitulé Carambolages. Il propose alors à son ami Pierre Tchernia d’en signer l’adaptation, tout en confiant à Michel Audiard la rédaction des dialogues. Dès lors, le roman s’en trouve fortement modifié pour correspondre à la vision très anarchiste du célèbre dialoguiste. Il invente notamment les célèbres répliques de l’inspecteur de police joué par Michel Serrault, en en faisant un ancien collabo durant la Seconde Guerre mondiale.

Un tournage tendu entre Marcel Bluwal et Louis de Funès

Comme le rappelle justement Michel Serrault dans son autobiographie (… Vous avez dit Serrault ? en 2001) :

Ce qu’il y avait de formidable et d’original, c’était d’avoir fait de ce flic un personnage au lourd passé de collabo. […] Il est bien évident que lorsqu’un acteur tombe sur ce genre de partition, ses yeux s’allument et sa langue claque. […] Michel Audiard ressemblait à un jockey en vacances venu renifler l’air du champ de courses. Casquette à carreaux, petit col roulé, cigarette sur cigarette, il me plut d’emblée. Et je sais que la réciproque fut vraie.

Au moment du tournage, Jean-Claude Brialy a proposé d’offrir le rôle du grand patron à un comique qui commençait à s’imposer au théâtre du nom de Louis de Funès. Ce dernier venait de connaître également quelques beaux succès au cinéma avec Pouic-Pouic (Girault, 1963). Si l’idée fut bonne pour le succès du film, le tournage en a été fortement affecté puisque Marcel Bluwal ne s’est pas entendu avec le comique. Comme évoqué dans Louis de Funès, le berger des roses (Loubier, 1991) :

Les heurts avec Bluwal ne manquent pas. Celui-ci lui demande souvent au cours des prises de ne pas s’agiter, de ne presque rien faire face à son partenaire. A cela, Louis rétorque : « Il est fou… Lui il s’agite… Il me prend mon rôle ! »

Une première partie enlevée

Le tournage est donc sous haute tension à cause de nombreuses personnalités aux caractères bien trempés. Le cauchemar fut tel pour Marcel Bluwal qu’il a toujours détesté le produit fini et qu’il n’est revenu au cinéma que plusieurs décennies plus tard, préférant de loin l’ambiance des plateaux de télévision.

Carambolages, jaquette blu-ray

© 2014 Gaumont Vidéo. Tous droits réservés.

Pourtant, à revoir Carambolages de nos jours, la comédie est loin d’être catastrophique. Certes, le long-métrage souffre de sa construction en deux parties distinctes. Le spectateur assiste ainsi avant tout à une comédie satirique qui s’en prend au patronat et au monde de l’entreprise moderne. Toute la première partie fonctionne parfaitement grâce à la fraîcheur du duo formé par Jean-Claude Brialy et Sophie Daumier, mais aussi sur l’abattage de Louis de Funès en patron odieux. Bien entendu, tout ceci est encore dynamité par le dialogue particulièrement vachard de Michel Audiard, ici en grande forme.

Un film inégal étrangement sélectionné à Cannes

Malheureusement, la deuxième partie voit disparaître le personnage de de Funès et remplacé par celui de l’inspecteur collabo interprété par Michel Serrault. Si le comédien en fait des tonnes, il ne parvient pas à concurrencer de Funès sur ce terrain et la comédie se remet mal de la disparition du futur « gendarme ». Dès que l’aspect policier prend le dessus, le métrage patine quelque peu, sans pour autant devenir désagréable. En tout cas, le réalisateur Marcel Bluwal fait ce qu’il peut pour dynamiser sa réalisation en jouant notamment sur l’exploitation des décors par une caméra assez mobile. Le résultat est donc inégal, mais toujours sympathique.

De manière assez surréaliste, Carambolages a été sélectionné pour représenter la France au Festival de Cannes 1963. L’équipe en fut fort étonnée, mais a accepté de monter les marches pour une projection qui s’est avérée glaciale. Bien entendu, Carambolages n’a reçu aucun prix, tout en se faisant démolir par la presse. Cela n’a pas empêché le film de paraître sur les écrans au mois de mai 1963 et de connaître un joli succès provincial. Alors que Paris fut très en retrait avec une première semaine à 24 873 Parisiens et une dixième place hebdomadaire, la province a attendu jusqu’à la fin du mois de mai pour pouvoir découvrir la comédie.

Carambolages, un succès provincial sur la durée

D’ailleurs, celle-ci se hisse à la première place du box-office national la semaine du 4 juin 1963 avec 95 897 spectateurs supplémentaires. Après avoir connu une carrière en chute libre, Carambolages a été relancé par la Gaumont au cœur de l’été, reprenant ainsi des couleurs. Mi-septembre, Carambolages est toujours exploité en province et atteint la barrière des 500 000 spectateurs. Finalement, le métrage termine sa carrière de plusieurs mois autour du million d’entrées. Une bonne affaire finalement, essentiellement liée à la présence au générique de Louis de Funès, alors en pleine ascension.

Enfin, pour être complet, notons que la satire politique n’a pas nécessairement plu au pouvoir en place. Comme le précise Jean-Marc Loubier (Louis de Funès, le berger des roses, 1991) :

Malheureusement, Carambolages connut des ennuis avec la censure. Le ministère de l’Intérieur demandait que l’on coupe une scène où Michel Serrault disait : « Du temps de la rue Lauriston, les baignoires facilitaient les interrogatoires ! ».

Finalement, la phrase est restée dans le métrage final, mais cet épisode démontre à quel point la censure du temps du général De Gaulle était très active et peu conciliante vis-à-vis de la contestation des autorités. Comédie caustique et parfois rageuse, Carambolages demeure aujourd’hui un film éminemment sympathique qui peut donc être revisité sans déplaisir grâce à ses éditions successives en VHS, DVD et blu-ray.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 17 mai 1963

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Carambolages, l'affiche

© 1963 Gaumont / Affiche : Charles Rau. Tous droits réservés.

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Marcel Bluwal, Louis de Funès, Alain Delon, Michel Serrault, Jean-Claude Brialy, Jacques Dynam, Michel Modo, Sophie Daumier, Henri Virlojeux

Mots clés

Comédie policière, Le festival de Cannes 1963, L’entreprise au cinéma

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Carambolages, l'affiche

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