Beast est un film d’agression animale stressant, plutôt bien troussé, mais qui n’apporte pas grand-chose de nouveau au genre. Au moins, les animaux numériques apparaissent comme crédibles à l’écran. C’est déjà ça.
Synopsis : Le Dr. Nate Daniels, revient en Afrique du Sud, où il a autrefois rencontré sa femme aujourd’hui décédée, pour y passer des vacances prévues de longue date avec ses deux filles dans une réserve naturelle, tenue par Martin Battles, un vieil ami de la famille, biologiste spécialiste de la vie sauvage. Mais ce repos salvateur va se transformer en épreuve de survie quand un lion assoiffé de vengeance, unique rescapé de la traque sanguinaire d’ignobles braconniers, se met à dévorer tout humain sur sa route et prend en chasse le docteur et sa famille.
Idris Elba dans les griffes de Kormákur
Critique : Le réalisateur Baltasar Kormákur, espoir du cinéma islandais des années 2000 avec 101 Reykjavik (2000), semble décidément bégayer depuis quelques années. Ainsi, cela fait plusieurs long-métrages qu’il consacre à la survie de plusieurs protagonistes dans un environnement hostile. On se souvient tout d’abord de Survivre (2012) qui suivait la dérive d’un naufragé en plein cœur d’un océan glacé, puis Everest (2015) avec Jason Clarke sur une expédition en pleine montagne qui tourne mal. Enfin, il retrouvait l’océan avec À la dérive (2018) qui plongeait Shailene Woodley et Sam Claflin dans le grand bain. Visiblement en manque de sujet à traiter, le réalisateur nous revient en 2022 avec Beast qui nous raconte cette fois-ci la survie d’une famille face à un lion mangeur d’hommes.
Afin de donner corps à ce script assez banal, Baltasar Kormákur a fait appel à quatre acteurs solides et surtout à un décor naturel trouvé sur place, dans une province septentrionale de l’Afrique du Sud. Profitant donc de paysages magnifiques, le cinéaste a opté pour un tournage en immersion, même si aucun lion n’a été en contact avec les acteurs. Effectivement, tous les fauves utilisés dans le film sont soit extraits d’archives et intégrés aux images par la grâce des effets spéciaux, soit carrément des créations numériques. D’ailleurs, la plupart de ces effets sont franchement convaincants et on y croit, là où certains prédécesseurs avaient bien du mal à rendre leur fauve crédible – on songe notamment au déplorable Prédateur (Dick Maas, 2016) qui ne disposait toutefois pas du même budget en tant que petite série B néerlandaise.
Mon père, ce héros
Cependant, rien ne pourra jamais égaler dans son domaine le formidable Roar (Marshall, 1981) qui fut intégralement tourné avec de vrais fauves et des comédiens sans cesse confrontés aux caprices de leurs partenaires à quatre pattes. Désormais, l’époque est à la sécurité maximale – tant mieux pour les acteurs bien évidemment – et Beast n’offrira donc que des plans d’affrontement avec des lions numériques plutôt réussis.
Afin de donner un peu de fond à un survival qui s’annonçait très banal, les auteurs ont ajouté une histoire de famille qui voit un père contesté par ses jeunes filles, lui qui n’était pas présent lors du décès de leur mère. Il va donc falloir que la figure paternelle se rachète aux yeux de sa progéniture. L’occasion lui est donc donnée de sauver tout ce petit monde des griffes du fauve. Enfin, pour coller le plus possible à la réalité zoologique, les auteurs ont fait du lion un animal blessé à la suite d’une razzia menée par des braconniers. Il n’est donc aucunement coupable de son comportement, mais bien une victime de la malveillance de l’être humain.
Un lion nommé Cujo
Toutefois, le but de Baltasar Kormákur n’est aucunement de livrer un quelconque message, mais bien de trousser un divertissement stressant fondé sur le suspense. Par moments assez proche du Cujo (1983) de Lewis Teague, le métrage sait prendre le spectateur à la gorge le temps de séquences particulièrement tendues. Cela est renforcé par la réalisation très fluide du réalisateur, souvent à l’aide de plans-séquence virtuoses avec multiples changements d’axe. Cette très belle démonstration formelle impliquait une parfaite gestion de l’espace et des mouvements des acteurs. En cela, on peut être admiratif du travail physique effectué par Idris Elba, très à l’aise face aux fauves numériques avec lesquels il doit pourtant interagir.
Même constat pour les deux jeunes filles qui incarnent ses filles. Iyana Halley et Leah Jeffries font preuve d’un beau naturel et ne sont jamais énervantes. On est au contraire en réelle empathie avec leurs personnages. Alors que Beast est donc un film stressant plutôt bien troussé, on ne peut faire abstraction de cette désagréable impression d’avoir déjà vu mille fois ce type d’histoire. Baltasar Kormákur n’a semble-t-il rien à lui apporter de nouveau et le spectacle est donc surtout à recommander à un jeune public qui n’aurait que peu d’expérience dans le genre du survival et du film d’agression animale. Les autres peuvent aisément faire l’économie d’une place tant le long-métrage n’offre qu’un divertissement balisé et sans aucune surprise, malgré une conception de bonne tenue.
Critique de Virgile Dumez
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Baltasar Kormákur, Idris Elba, Iyana Halley, Leah Jeffries, Sharlto Copley