Vacances à Venise est un film carte postale qui se perd dans le pittoresque au lieu de sonder les blessures d’un personnage féminin rongé par les névroses de la solitude, magnifiquement interprété par Katharine Hepburn.
Synopsis : Jane Hudson, modeste secrétaire américaine, a choisi de passer ses premières vacances européennes à Venise. Célibataire d’âge mûr, cette vieille fille un peu guindée espère dans son for intérieur rencontrer l’amour au sein de cette ville de rêve. Elle s’installe dans une pension tenue par la signora Fiorini, et rencontre l’espiègle gamin Mauro qui lui fait découvrir la cité des Doges sous un jour un peu moins touristique. Mélancolique, la vision de multiples couples d’amoureux à tous les coins de rue la rend encore plus esseulée. A la terrasse d’un des cafés de la place Saint-Marc où elle s’est attablée, un bel Italien aux tempes argentées la remarque et commence à lui faire une cour assidue. Il s’agit d’un antiquaire du nom de Renato. D’abord réticente, Jane va finir par succomber à ses charmes et à s’éprendre de lui avec exaltation…
Un David Lean méconnu à juste titre
Critique : Summertime n’est pas un incontournable dans la filmographie de David Lean. Si le cinéaste avoua un faible pour cette romance vénitienne et qu’elle ressort aujourd’hui en salle avec les allures de classique, on peut se montrer dubitatif quant à sa fascination fleur bleue pour la Cité des Doges, qu’il filme inlassablement, voire amoureusement, pour ne garder à l’écran qu’un aspect figé, embourbé dans une couleur trop appuyée de carte postale.
Deux Hepburn sur la même gondole
Après les délicieuses Vacances romaines en 1954, voici donc Les vacances à Venise (titre français d’origine). Le premier, signé par William Wyler, culminait à plus de 4 millions d’entrées quand le second plafonnait légèrement au-dessus du million. Un score décevant, donc. Pourtant, dans les deux films, on retrouvait en haut de l’affiche deux Hepburn, Audrey pour Rome, Katharine pour Venise… La comparaison s’arrête-là. La délicieuse romance de Wyler resplendissait de fraîcheur et de facétie, Summertime peine à trouver son rythme, traînant systématiquement derrière lui le poids des plans vénitiens souvent monumentaux. Comme si l’intérêt devait être touristique et non cinématographique.
Certes, David Lean était britannique, mais toute la cinégénie de Venise se retrouve atrophiée par une vision très américaine de la découverte de l’Europe, avec tous les poncifs qui accompagnent ce type de pérégrination (comme l’illustre l’insupportable couple d’Américains qu’Hepburn rencontre sur le chemin de son hôtel).
Une psychologie peu approfondie
Pourtant, tout n’est pas condamnable dans cette romance datée. David Lean qui redécouvre les joies du filmage en couleurs fait montre d’un sens du cadrage remarquable et l’on est convaincu par le couple que forment Katharine Hepburn et Rossano Brazzi. L’actrice américaine, nommée à l’Oscar pour son rôle, incarne un personnage de femme vieillissante résignée à la solitude, mais dont la souffrance et les frustrations sont palpables. Face à un latin lover qui s’avoue marié, elle doit remettre en cause ses préjugés et son éducation puritaine pour laisser le bonheur s’éprendre d’elle. Il est toutefois dommage que cette orientation arrive tardivement dans le métrage, puisqu’il est à ce moment-là déjà temps de les quitter.
David Lean déjà trop académique
Après cette escale romantique qui lui vaut une nomination comme Meilleur réalisateur aux Oscars, en 1956, David Lean, actif depuis déjà treize ans derrière sa caméra, passa à la vitesse supérieure. Suivra le romanesque épique qui fit de lui l’une des figures commerciales les plus importantes des années 50-70, avec les triomphes de Lawrence d’Arabie, Le docteur Jivago et La fille de Ryan. Il n’en deviendra pas pour autant le plus aimé des auteurs du 20e siècle, du moins par la critique qui a toujours su remettre en cause son académisme ronflant. Avis ici partagé.
Sorties de la semaine du 2 Septembre 2020
LE DVD
Le DVD Carlotta de 2011 était de bonne facture, malgré un vide au niveau des suppléments.
Compléments : 0.5 / 5
Une préface de Pierre Berthomieu vient replacer Summertime dans la carrière du cinéaste. Même si cela dure 8mn, on n’apprend pas grand-chose.
L’image : 4 / 5
La copie est luxuriante, elle regorge de couleurs pour coller à la volonté très carte postale du réalisateur. Ce nouveau master restauré en HD est splendide !
Le son : 3/ 5
Très bon travail de restauration sonore. La VF (mono DD) jouit d’un doublage correct, mais subit à deux reprises des trous qui ont été comblés par de brefs instants en VO.
La piste en version originale est pour sa part nettement supérieure. Toujours proposé en Mono Dolby Digital, elle s’avère plus naturelle et ainsi plus proche des troubles vécus par Katharine Hepburn, dont l’élégante voix est un atout précieux.