Péplum à la lisière de la parodie, Ursus l’invincible n’en demeure pas moins un divertissement très sympathique grâce à un rythme enlevé, des gags réussis et une esthétique kitsch du plus bel effet.
Synopsis : Usurpant l’identité d’Ursus, le tyran Théomaque a pris le trône d’Attra et impose son pouvoir. Le prince Dario, soucieux de rétablir le véritable souverain, fait alors appel à Ursus. Ce dernier, avec deux compagnons, se mettent en route pour Attra. Il faudra toute la musculature et l’ingéniosité du héros pour renverser le despote.
Ursus l’invincible est un péplum luxueux
Critique : Durant l’année 1964, le nombre de péplums produits en Italie explose, tout en entraînant un déclin irrémédiable d’un genre voué à s’autoparodier. Lorsque Gianfranco Parolini tourne Ursus l’invincible (1964), il n’en est pas à son coup d’essai, mais profite ici d’une coproduction avec la Tunisie pour bénéficier d’excellentes conditions de tournage. Contrairement à bon nombre de productions de l’époque qui faisaient peine à voir, Ursus l’invincible étonne par la profusion de ses décors, de ses costumes et du nombre de ses figurants. Entièrement tourné dans les studios de Kairouan – y compris pour tous les intérieurs, souvent magnifiques – le péplum fait donc plutôt bonne figure pour ce qui ne devait être à l’origine qu’une série B divertissante.
D’ailleurs, Gianfranco Parolini ne cherche pas à être pris au sérieux avec cette comédie d’aventures qui tient autant du péplum que du conte des mille et une nuits. On notera par exemple que le héros Ursus qui est initialement une création de l’écrivain nationaliste polonais Henryk Sienkiewicz pour son roman Quo Vadis ? (1896) n’a plus aucun rapport avec ses origines. Ici, il s’agit simplement d’un gros bras qui évolue dans un royaume arabe indéterminé à une époque lointaine tout aussi mystérieuse.
Du kitsch assumé et des baffes!
C’est d’ailleurs cette indétermination qui permet à Gianfranco Parolini de faire passer la pilule de cette antiquité de pacotille où les tenues sont toutes dépareillées, voire franchement fantaisistes. Malgré le bric-à-brac d’influences historiques et culturelles diverses, l’ensemble est plutôt agencé avec goût et certains plans s’avèrent particulièrement soignés sur le plan esthétique (pour peu que l’on goûte un certain kitsch clinquant). Dès lors, le spectateur sait immédiatement qu’il va évoluer dans un univers parallèle totalement fantaisiste, uniquement créé pour divertir.
Dès les premières séquences, l’aspect parodique l’emporte avec des bagarres homériques dignes de celles qui populariseront plus tard Terence Hill et Bud Spencer. On se bat à coups de baffes, à l’aide de cabrioles improbables dignes d’un numéro de cirque. Ces moments sont d’ailleurs typiques du cinéma de Parolini qui continuera dans ce style avec sa trilogie westernienne Sabata (3 films de 1969 à 1971). Certes, les gags ne sont guère recherchés, mais réalisés avec un vrai sens de l’efficacité. Même le culturiste Alan Steel (en réalité Sergio Ciani) parvient à amuser avec son air de grand benêt dont le cinéaste se sert judicieusement.
Un casting bien dirigé
Par la suite, le film déploie une classique intrigue d’usurpation d’identité et de lutte d’une population contre un tyran. Parolini réussit l’exploit de retrouver un semblant de sérieux et de signer des séquences d’action correctes et finalement assez trépidantes. Avec Ursus l’invincible, le cinéaste parvient à se maintenir sur le fil de la parodie, sans jamais sombrer dans la bouffonnerie. Pour cela, il a pu s’appuyer sur des comédiens de premier choix. Du côté des méchants, on apprécie le charisme de Mimmo Palmara et la rouerie légendaire de Gianni Rizzo. Au rayon charme, la séduisante Rosalba Neri fait preuve d’un beau naturel, tandis que Lisa Gastoni incarne l’élégance aristocratique avec aplomb.
Dynamisé par une réalisation enlevée – marque de fabrique du cinéaste – et la magnificence de son esthétique kitsch, Ursus l’invincible n’est certes pas un incontournable du genre, mais au cœur de la litanie de nanars insipides qui parsèment le genre, on peut lui reconnaître la qualité de ne jamais ennuyer et d’avoir été confectionné avec amour par une équipe cherchant à se surpasser.
Accompagnant le déclin progressif du genre, Ursus l’invincible n’a pas connu un grand succès, ni dans son pays, ni en France où il est sorti discrètement dans quelques salles de quartier parisiennes au mois d’octobre 1965. Après une longue période d’oubli, le long-métrage bénéficie aujourd’hui d’une sortie dans un beau combo DVD / blu-ray dans la collection Péplum d’Artus Films.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 13 octobre 1965
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Biographies +
Gianfranco Parolini, Orchidea de Santis, Rosalba Neri, Sergio Ciani (Alan Steel), Mimmo Palmara, Vassili Karis, Lisa Gastoni, Carlo Tamberlani, Gianni Rizzo