Tron Ares ne propose rien de bien neuf dans la franchise, si ce n’est le manque de vision de la part d’un cinéaste qui demeure un tâcheron et la présence d’un casting peu motivant.
Synopsis : L’étonnante aventure d’un Programme hautement sophistiqué du nom de Ares, envoyé du monde numérique au monde réel pour une mission dangereuse qui marquera la première rencontre de l’humanité avec des êtres dotés d’une intelligence artificielle…
Comment faire suite au brillant deuxième opus ?
Critique : Troisième opus de la saga Tron initiée par la firme Disney en 1982, Tron Ares a connu une conception pour le moins longue puisque le projet était déjà validé en 2011, juste après la sortie de Tron : l’héritage (Joseph Kosinski, 2010). Il faut dire que le cinéaste a frappé fort avec cette suite en tout point supérieure à l’original car elle a su en sublimer l’esthétique pour la faire entrer dans l’ère moderne. Grâce à un réalisateur visionnaire – qui a confirmé depuis son goût pour les plans virtuoses – Tron : l’héritage a su jouer à fond la carte de l’esthétisation, jusque dans l’emploi d’une splendide partition synthétique composée par les regrettés Daft Punk.
Lire notre dossier complet sur Tron : L’héritage

Jared Leto est Ares dans TRON: ARES. Photo by Leah Gallo. © 2025 Disney Enterprises, Inc. All Rights Reserved.
Dès lors, le projet d’une troisième itération a couru durant l’intégralité de la décennie 2010, avec Joseph Kosinski comme maître d’œuvre. Toutefois, à cause de multiples réécritures du script, mais aussi à la suite des dépenses faramineuses de Disney afin de racheter ses concurrents Lucasfilm et Marvel, la suite coûteuse finit dans un tiroir. Elle n’est réactivée qu’au début des années 2020 avec la présence d’un nouveau héros nommé Ares, interprété par Jared Leto. Pour réaliser ce nouvel opus, Joseph Kosinski est écarté et remplacé in fine par le tâcheron Joachim Rønning. Pas forcément une bonne nouvelle puisque le cinéaste norvégien ne peut mettre en avant dans sa filmographie que des œuvres mineures et impersonnelles comme Bandidas (2006), Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar (2017) et le catastrophique Maléfique : Le Pouvoir du Mal (2019).
Un univers visuel toujours aussi séduisant
Pourtant, à l’annonce de la contribution du groupe industriel Nine Inch Nails à la bande sonore et au vu des premières images de la bande-annonce, on a fini par croire un peu plus en ce Tron Ares. Le premier constat est que les concepteurs des décors, des effets spéciaux et des costumes sont toujours aussi talentueux et qu’ils nous proposent ici une plongée cohérente au cœur d’un univers froid, mais surtout doté de couleurs superbes (avec une majorité de rouge cette fois-ci). L’univers de Tron, tout droit hérité du deuxième film – mais aussi du premier lors d’une jolie séquence nostalgique – est donc toujours aussi séduisant et parfaitement respecté dans ce troisième opus.

Jodie Turner-Smith. Photo by Leah Gallo. © 2025 Disney Enterprises, Inc. All Rights Reserved.
Pour autant, la réussite est loin d’être patente à cause de très nombreux défauts. Le plus évident vient d’un scénario qui propose une fausse bonne idée de départ. En faisant entrer le monde numérique de Tron dans notre univers, les auteurs se tirent une balle dans le pied. Certes, il s’agit d’évoquer en filigrane l’intrusion de l’IA dans notre quotidien de manière métaphorique, mais un grain de sable fait dérailler cette belle mécanique. Tout d’abord, il est difficile de trembler pour un héros qui, par essence, ne peut pas mourir. Ainsi, toutes les scènes d’action avec Ares et ses sbires n’éveillent pas vraiment l’intérêt puisque lorsqu’il se désagrège, il peut aussitôt être reconstitué ailleurs. Si la plongée d’un être humain mortel dans un monde digital peut être risqué, l’inverse n’est absolument pas vrai.
Trop de personnages humains sans intérêt
Ensuite, les personnages humains n’ont jamais été le point fort de la saga et le fait que cet opus se déroule souvent sur Terre contraint le réalisateur à davantage mettre en avant des protagonistes auxquels on peine à s’attacher. Dès lors, le second défaut de ce troisième volet vient du casting peu affriolant. Pour une Gillian Anderson et une Jodie Turner-Smith plutôt convaincantes (cette dernière campe une Amazone proche de Grace Jones), les autres comédiens pâtissent de rôles écrits avec des moufles. Jared Leto n’a tout bonnement rien à jouer puisqu’il doit rester impassible en tant qu’être artificiel, Evan Peters en fait des caisses en méchant de service, Jeff Bridges est venu toucher son chèque le temps d’une scène, mais le pire vient de l’accumulation de plusieurs sidekicks qui introduisent de l’humour lors des moments d’intensité dramatiques. Autant dire qu’on se serait bien passé de ces trublions issus tout droit des blockbusters des années 90.

A scene from Disney’s Live Action TRON: ARES. Photo Courtesy of Disney. © 2025 Disney Enterprises, Inc. All Rights Reserved.
Si Tron Ares se regarde sans déplaisir, il pâtit également du choix de son réalisateur. Effectivement, Joachim Rønning ne se hisse jamais au niveau de son prédécesseur et n’invente rien du tout. Il se contente de copier le style de Joseph Kosinski sans en avoir un dixième du talent. Ainsi, avec les mêmes outils, Rønning ne parvient jamais à nous époustoufler car sa réalisation est tout juste correcte et parfois maladroite.
Il manque un réalisateur visionnaire à la barre
Lorsque les scènes d’action interviennent, il ne trouve pas toujours le bon rythme et seuls quelques passages parviennent à nous scotcher à notre fauteuil. Là où Kosinski était capable de faire voler en éclats les perspectives sans jamais perdre le spectateur, Rønning rate le coche et peut nous paumer dans le déluge d’effets fluo. Bref, il manque à Tron Ares un réalisateur doté d’une vision claire de l’espace, et non un simple technicien qui copie ce qui a été fait précédemment.
Autre objet de déception, la musique composée par Atticus Ross et Trent Reznor (Nine Inch Nails, donc) est certes très efficace dans son aspect brut, industriel et martial. Toutefois, les compères échouent à créer des thèmes accrocheurs et, pire, de vraies mélodies. On ressort de la projection assourdis par le déluge de musique (deux heures non-stop, toujours sur le même ton), mais parfaitement incapables de se souvenir du moindre thème central. Certes, la bande originale de Daft Punk était aussi très puissante, mais elle comportait des passages plus doux et mélodieux, ainsi que des harmonies variées.
Et pour quelques pixels de plus…
Enfin, on peut aussi regretter la Marvellisation du produit lorsque les auteurs nous gratifient d’une scène supplémentaire en plein générique final, nous montrant la volonté de continuer à exploiter la franchise rapidement en donnant une suite aux aventures d’Ares. Tous ces reproches ne font pas nécessairement de Tron Ares une œuvre désagréable à suivre, mais il s’agit clairement d’une cruelle déception par rapport à la maestria du deuxième opus.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 8 octobre 2025

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Joachim Rønning, Gillian Anderson, Jeff Bridges, Jared Leto, Jodie Turner-Smith, Katharine Isabelle, Greta Lee, Evan Peters
Mots clés
Cinéma américain, Franchise Tron, Les films de science-fiction des années 2020, L’IA au cinéma