Swordsman : la critique du film (1990)

Action, Arts martiaux, Cape et épée | 1h58min
Note de la rédaction :
4/10
4
Swordsman, l'affiche de Hong Kong

  • Réalisateur : Raymond Lee Ching Siu-tung Tsui Hark King Hu
  • Acteurs : Samuel Hui, Cecilia Yip
  • Date de sortie: 05 Avr 1990
  • Nationalité : Hongkongais, Taïwanais
  • Titre original : Siu ngo gong woo
  • Scénario : Kwan Man-Leung, d'après le roman de Louis Cha
  • Musique : Romeo Díaz et James Wong
  • Distributeur : Film inédit en France. La date de sortie ci-dessus est celle à Hong Kong.
  • Editeur vidéo (DVD) : HK Vidéo / Metropolitan Filmexport
  • Sortie vidéo (DVD) : 1er juillet 2008 (uniquement disponible en coffret)
  • Récompenses : Prix des meilleures chorégraphies (Tony Ching) et prix de la meilleure chanson aux Hong Kong Film Awards 1991.
  • Crédits visuels : © 1990 Film Worshop Co. Ltd / Propriété graphique : © 2008 Metropolitan FilmExport. Tous droits réservés.
Note des spectateurs :

Pur accident industriel qui a nécessité le concours de six réalisateurs différents, Swordsman est un patchwork inepte et souvent illisible qui symbolise à lui seul les difficultés de l’industrie hongkongaise au début des années 90.

Synopsis : Le “Canon du Tournesol”, un parchemin contenant le secret du pouvoir martial absolu, est dérobé. Le jeune maître d’armes et musicien Lingwu Chung est seul à connaître sa cachette. Mais le document est l’objet d’une lutte sans merci entre la terrible police secrète, diverses sectes rivales et un samouraï venu du Japon…

L’association de King Hu et de son plus grand admirateur Tsui Hark

Critique : En 1984, le réalisateur et producteur Tsui Hark décide de monter sa propre compagnie de production nommée Film Workshop. Grâce à plusieurs gros succès commerciaux, dont Le syndicat du crime de John Woo, Tsui Hark se prend à rêver d’une société qui serait une vaste pépinière de talents, invitant des auteurs exigeants à venir créer en toute liberté. Il parvient ainsi à fédérer de nombreuses personnalités fortes, du moins dans un premier temps.

Swordsman, la jaquette

© 1990 Film Worshop Co. Ltd / Propriété graphique : © 2008 Metropolitan FilmExport. Tous droits réservés.

Tsui Hark, dans sa volonté de dynamiser le cinéma de Hong Kong, envisage de ressusciter le genre désuet du wu xia pian. Il s’y est déjà frotté seul avec Zu, les guerriers de la montagne magique (1983) qui a connu un échec public sans appel à sa sortie. En cette fin des années 80, il ne souhaite pas réitérer les erreurs commises précédemment et engage son maître en la matière, à savoir King Hu. Pour mémoire, le réalisateur de L’hirondelle d’or (1966), Dragon Gate Inn (1967), A Touch of Zen (1970) ou encore La légende de la montagne (1979), est considéré à juste titre comme le maître absolu d’un genre qu’il a porté à son sommet.

Un tournage catastrophique qui voit se succéder six réalisateurs

Lui redonner l’occasion de revenir sur le devant de la scène avec un wu xia pian paraît donc une excellente idée et Tsui Hark lui propose d’adapter une œuvre célèbre de Louis Cha intitulée Le vagabond au sourire fier (traduction littérale du titre chinois) et qui donnera Swordsman à l’international.

Rien ne laissait présager le désastre qui allait affecter le tournage. Effectivement, King Hu est réputé pour être un esthète capable de faire un nombre considérable de prises pour obtenir ce qu’il souhaite. De plus, sa vision du cinéma d’action est aux antipodes de celle de Tsui Hark. Le premier insistant surtout sur l’ambiance, les personnages et l’esthétique, tandis que le second préfère un montage cut et de l’action tous azimuts. Le torchon brûle assez rapidement entre les deux artistes et finalement, King Hu abandonne la production en plein tournage.

Une conception compliquée pour une histoire déjà passablement embrouillée

Tsui Hark fait alors le choix de multiplier les intervenants pour rattraper le temps perdu, au risque de la précipitation. En plus de sa propre participation, Tsui Hark a ainsi bénéficié du concours de quatre réalisateurs supplémentaires dont Ching Siu-tung, Raymond Lee, mais aussi et dans une moindre mesure Ann Hui et Andrew Kam.

Autant dire que le long-métrage ne se relève pas vraiment de cette multiplicité d’intervenants et qu’il apparaît dès lors comme un patchwork mal rapiécé. Déjà que l’œuvre de Louis Cha est complexe à scénariser, avec ses multiples personnages qui appartiennent tous à des sectes différentes, mais les aléas du tournage ont rendu la tâche de retranscrire cette histoire encore plus ardue. Dire que l’on ne comprend pas grand-chose à ce qui se passe à l’écran est un euphémisme. Non seulement l’intrigue est inutilement emberlificotée, mais la réalisation hystérique employée par Tsui Hark et ses compères n’en facilite aucunement la lecture.

Action illisible et montage bordélique au programme

Très honnêtement, on se demande même ce qui subsiste réellement du travail de King Hu dans le montage final, tant on a le sentiment d’assister à un film de Tsui Hark. Toutefois, si le réalisateur-producteur est capable de réaliser des œuvres impressionnantes, on ne peut pas compter ce Swordsman parmi ses réussites. Le montage épileptique rend notamment toutes les séquences de combat illisibles. Certains débordements bis font également plonger le film dans la médiocrité, de même qu’un humour pas toujours très finaud.

Au milieu de ce grand foutoir, l’acteur-chanteur Samuel Hui fait ce qu’il peut pour incarner un héros sympathique (à la Jackie Chan), mais il manque toutefois de charisme pour en imposer vraiment dans ce rôle ingrat où il subit les événements. Malgré ce manque total de cohérence, le long-métrage a tout de même attiré suffisamment de spectateurs dans les salles hongkongaises pour pouvoir donner lieu à une suite qui, elle, est devenue culte. Il s’agit de Swordsman : La légende d’un guerrier (1992) avec cette fois-ci Jet Li dans le rôle principal.

Assez méconnu chez nous où il n’est sorti que tardivement en coffret avec les autres volets de la saga, le premier Swordsman est donc une sacrée déception, comme une sorte de brouillon inachevé, dont la réputation peu favorable est malheureusement méritée.

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Critique du film :  Virgile Dumez

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