Ogre d’Arnaud Malherbe, est dévoilé au festival de Deauville 2021, en Sélection officielle, suivant la même trajectoire que The Jokers avait tissée pour Teddy, avec une date de sortie pour avril 2022. A l’instar du film de loup-garou made in France, l’échec artistique sera malheureusement patent.
Synopsis : Fuyant un passé douloureux, Chloé démarre une nouvelle vie d’institutrice dans le Morvan avec son fils Jules, 8 ans. Accueillie chaleureusement par les habitants du village, elle tombe sous le charme de Mathieu, un médecin charismatique et mystérieux.
Mais de terribles événements perturbent la tranquillité des villageois : un enfant a disparu et une bête sauvage s’attaque au bétail. Jules est en alerte, il le sent, quelque chose rôde la nuit autour de la maison…
Un cinéma de genre français miné par ses prétentions métaphoriques
Critique : Ogre d’Arnaud Malherbe est un échec patent dans le cinéma de genre français. Incapable de viser un public précis, le conte réitère tous les défauts du cinéma fantastique français des années 2010, à savoir la prétention de vouloir être un objet signifiant, avant d’être un divertissement pour un public épris de frissons.
Jouissant d’une esthétique léchée et d’un sens réel de la photographie, la production ne manque pas de qualités formelles. Néanmoins, il pâtit d’arguments pour tenir en haleine le public qui restera au mieux somnolent au pire irrité. Le récit féministe, avec une métaphore construite sur l’image du mari et du père violent, s’accompagne d’une utilisation maladroite de la figure de l’enfant, dont le handicap devient un atout pour un final embarrassant entre Phenomena et La part des ténèbres, sans le talent narratif du maestro de l’époque Dario Argento et du grand George A. Romero.
Photo : Kris Dewiite
Dans la difficulté quand il s’agit de satisfaire les âges et les envies plurielles des spectateurs, Ogre tombe trop aisément dans les lacs de son hommage au conte, à savoir l’incapacité d’épaissir un script anémique par une intrigue et du suspense. On pense à L’esprit de la ruche de Victor Erice et à sa magnifique peinture des terreurs enfantines, ainsi qu’à L’échine du diable de Del Toro, mais le conteur Arnaud Malherbe ne pare jamais son ouvrage d’une intensité dramatique suffisante pour happer les amateurs d’un cinéma contemplatif subtil.
Pour l’épouvante, il faudra repasser. La classification “tous publics” du CNC est le marqueur d’une faiblesse inévitable aux yeux des adultes qui voudront percer des noirceurs trop à hauteur d’enfants pour faire grimper le trouillomètre.
Ogre, l’un des bides de l’année 2022
Après des problèmes de tournage et de production liés au grand confinement de 2020, Ogre est finalement distribué dans les salles en avril 2022 pour une carrière vite expédiée puisque le public lui a réservé un sort prévisible. A peine quatre semaines à l’affiche dans la capitale où il finit son repas à 4 693 entrées. Ce premier long métrage avait réalisé en fait l’essentiel de sa carrière lors d’une première semaine compliquée (3 697 spectateurs dans 13 cinémas de Paris-Périphérie). Cette coproduction franco-belge bénéficiait de surcroit de cinémas porteurs comme les UGC Ciné-Cité Les Halles et Bercy, ainsi que le Gaumont Parnasse, le Pathé Wepler, et le MK2 Bibliothèque. Sur les Champs Elysées, il n’a pu compter que sur le soutien du Publicis dont la programmation n’est pas des plus exigeantes. En deuxième semaine, le film sélectionné à Gérardmer s’écroule, avec 930 curieux dans 13 cinémas. Personne ne croît plus aux ogres.
La province ne lui fera aucun cadeau avec 12 501 entrées sur 114 sites. L’Ogre est achevé à 21 437 spectateurs sur l’ensemble du territoire, ne lui permettant en rien d’envisager un retour sur investissement.
A l’issue de l’année 2012, ce qui deviendra une curiosité avec le temps fait figure d’une œuvre esseulée. La production est boudée par les festivals de la planète et il semblerait que seule la Russie l’aurait exploitée, pour un score un peu plus satisfaisant qu’en France, en l’absence de concurrence américaine.